Une mission d’experts africains a rencontré, mercredi, à Tambacounda (est), des responsables des services déconcentrés et des acteurs non étatiques de divers secteurs d’activité, pour recueillir des informations complémentaires devant enrichir le rapport d’auto-évaluation de la gouvernance du Sénégal.
Cette mission est organisée en prélude au prochain sommet de l’Union africaine (UA), prévu en juillet à Kigali (Rwanda) et lors duquel le chef de l’Etat sénégalais, Macky Sall, devra présenter la situation du pays, pour une évaluation dans le cadre du Mécanisme africain d’évaluation par les pairs (MAEP).
Une mission du secrétariat continental du MAEP séjourne au Sénégal depuis le 11 avril, pour effectuer une revue-pays, en s’appuyant sur le rapport d’auto-évaluation validé le 31 mars par la commission nationale de gouvernance (CNG), indique un document remis à la presse. La mission qui était à Kolda lundi, compte visiter 9 régions. Elle se poursuivra jusqu’au 27 avril prochain.
Des consultations citoyennes avaient été organisées dans les 14 régions du pays par la Commission nationale de gouvernance (CNG) – celles de Tambacounda avaient eu lieu en septembre.
Les résultats de ces entretiens avec les services déconcentrés, les acteurs non étatiques et les représentants de divers secteurs d’activité, ont été consignés dans un rapport national d’auto-évaluation, validé en mars.
"L’objectif (de la mission) est d’apprécier la crédibilité du processus et d’enquêter auprès des institutions, pour avoir des informations complémentaires", a expliqué Mbaya Kankwenda, membre de la mission, originaire de la République démocratique du Congo (RDC).
Conçu en 2003 par les chefs d’Etat sud-africain Thabo Mbeki, algérien Abdelaziz Bouteflika, nigérian Olusegun Obasanjo et sénégalais Abdoulaye Wade, ce "mécanisme novateur" vise à évaluer les pays membres dans les quatre thématiques que sont la démocratie et la gouvernance politique, la gouvernance et la gestion économique, la gouvernance des entreprises et le développement socio-économique, a expliqué le secrétaire général d la RADDHO, Aboubacry Mbodj.
Sur la base du rapport d’auto-évaluation du Sénégal, les experts africains effectueront d’autres enquêtes complémentaires dans un échantillon de 9 régions du pays, dont Tambacounda, afin de produire le rapport national d’évaluation du Sénégal.
"Ce n’est pas une mission d’inspection", a précisé M. Kankwenda, relevant qu’il s’agit de mettre l’accent sur les choses que le rapport d’auto-évaluation a "perdu de vue" et celles qui "méritent plus d’attention et d’approfondissement".
"Etre évalué par ses pairs, c’est une notation qui ne dit pas son nom", a dit pour sa part, le gouverneur Bouya Amar, qui présidait la rencontre à la Chambre de commerce de Tambacounda.
Selon M. Amar, le Sénégal, en tant que "leader sur le plan démocratique" et sur le plan économique, souhaiterait être évalué "positivement et non négativement".
Il a évoqué les efforts actuels du pays, à la faveur desquels "les notions de bonne gouvernance et d’autoévaluation s’appliquent à toutes les politiques publiques", soulignant qu’une bonne place est accordée au contrôle citoyen.
Sur la base du rapport des experts devant être présenté par le président de la République, ses homologues africains relèveront les "points forts" devant être copiés par les autres pays, de même que "les points faibles" du Sénégal dans les quatre thématiques concernées, avant de faire des suggestions.
Le Sénégal est le seul parmi les quatre pays membres fondateurs du MAEP à n’avoir pas encore été évalué par les pairs. Les trois autres membres co-fondateurs se sont déjà fait évaluer et s’apprêtent à entamer un deuxième processus d’évaluation, a dit Mbaya Kakwenda.
Le Sénégal avait lancé un processus d’évaluation en 2004, mais il avait été interrompu, a noté Aboubacry Mbodj.
Pour Bangaly Diallo, point focal du MAEP à Tambacounda et président de l’antenne régionale de la plateforme des acteurs non-étatiques, malgré ses acquis démocratiques, le Sénégal "ne doit pas dormir sur ses lauriers, car beaucoup reste à faire en matière de gouvernance".
A ce sujet, M. Diallo estime que "le Sénégal n’a pas de problèmes de textes, mais le blocage se trouve au niveau des hommes et des femmes chargés de(les) appliquer".
Les Sénégalais doivent revoir leur rapport à la gestion du bien public, a-t-il recommandé, suggérant l’introduction d’un module "citoyenneté" dans toutes les écoles et institutions formant les gouvernants. "Nous sommes 13 millions de Sénégalais, mais je ne suis pas sûrs qu’on soit 13 millions de citoyens", a-t-il dit.