La réunion du Groupe consultatif 2014 de Paris sur le Sénégal vient de se tenir. Si beaucoup de publicité a entouré la tenue de ce rendez-vous important, et que le Sénégal s’en est sorti avec des engagements de financements de l'ordre de 3 789 milliards de F Cfa auprès de bailleurs de fonds étrangers, il n'y a pas encore de quoi applaudir des deux mains...
De la rencontre du Groupe consultatif 2014 de Paris que le Sénégal a préparée dans le plus grand bruit, les autorités étatiques escomptaient s’en sortir avec une manne financière auprès des bailleurs de fonds de 1 853 milliards de F Cfa. En termes d'engagements, le Sénégal a obtenu plus des bailleurs de fonds regroupés au sein du Groupe consultatif. Aussi 3 789 milliards de F Cfa viennent-ils d’être bouclés (sur le papier) au sortir de ce grand oral de Paris.
Les financements promis par ces bailleurs de fonds traditionnels sénégalais concerneront pour l’essentiel des secteurs comme les infrastructures, l’énergie, mais aussi l’agriculture, l’éducation, la formation, entre autres. Vaste programme, d’autant plus que le Sénégal compte sur le Pse présenté aux bailleurs de fonds pour mettre son économie sur l’ornière du développement avec à la clef un taux de croissance à deux chiffres.
Le Secteur privé en question
S’il est vrai que pour atteindre de tels objectifs, le Sénégal a besoin de booster des secteurs comme l’agriculture, l’éducation, la formation, les infrastructures ainsi que l’énergie, il va sans dire aussi qu’il a besoin de compter sur l’appui d’un secteur privé national très fort. Le Pse ne prend justement pas compte de toutes les perspectives qu’il y a pour s’appuyer sur le secteur privé fort. C’est un leurre que de penser que toute cette manne financière obtenue auprès de nos bailleurs de fonds traditionnels l’a été gratuitement. Les 3 789 milliards de F Cfa viennent s’ajouter, en grande partie, à la dette du Sénégal.
Avec un taux de remboursement qui parfois peut être insoutenable à l’effort de développement de l’économie nationale. C’est pourquoi il urge en dehors des secteurs présentés aux bailleurs de fonds pour la mise en branle du Pse, de réfléchir sur des projets qui, économiquement, mais aussi socialement pourront générer des ressources capables de renflouer les caisses de l'Etat et de lui donner les capacités de remboursement. Ce qui doit passer obligatoirement par un programme de partenariat public–privé soigneusement élaboré.
Présent à Paris, même si son profil n'est pas le mieux indiqué pour parler du Secteur privé, Baïdy Agne semble bien capter le sens et l'importance de la prise en compte du Secteur privé sans lequel rien ne pourra se faire. Il a demandé à Paris, au Président Macky Sall, d'organiser le plus rapidement une rencontre sur le Partenariat Public-Privé. Le Président du Conseil national du Patronat (CNP) a sans doute raison de tirer la sonnette d'alarme, même si cela est assez timide.
Partout en effet dans le monde où les pays ont réussi à sortir du sous-développement, cela s’est fait en adéquation, mais aussi avec la participation d’un secteur privé national fort. Il n’y a pas de secret. Le Sénégal ne pourra réfléchir sur ses perspectives de sortie du sous-développement durant les prochaines années qu’en associant son secteur privé. La vocation de l’Etat n’est pas de recruter en masse. Seul un environnement propice des affaires pourra permettre la création d’emplois des jeunes confinés au chômage et qui constituent le Sénégal de demain. C'est sans doute en créant de la richesse qu'on va produire de la croissance et faire mieux de social.
Qui pour surveiller l'application ?
L'autre question que ne manquent pas de se poser les acteurs économiques, c'est la capacité du Sénégal à non seulement attirer et absorber les financements promis. C'est une question de dire ''je m'engage'' et une autre de franchir le Rubicon. Le Président Sall semble bien le comprendre en demandant aux investisseurs de ne pas céder au chantage de fonctionnaires qui leur demanderaient de l'argent. Si le message a été très brutalement délivré, il renseigne sur le niveau du malaise perceptible surtout au niveau de l'administration sénégalaise.
Quels nouveaux mécanismes vont être rapidement activés pour donner des signaux plus rassurants aux investisseurs hormis la contraction des délais pour les marchés ; débat qui a déjà fait rage à l'Assemblée nationale ? Pour beaucoup d'acteurs aussi bien au niveau de la Haute administration que des bailleurs, l'idée de mettre en place une Task force opérationnelle qui transcende les ministères fait son petit bout de chemin. Une équipe qui va suivre le niveau de réalisation des projets et programmes pour voir qui fait quoi. Et surtout qui ne fait rien... Selon nos sources, le Président Sall lui-même y travaille.