L’imaginaire populaire sénégalais s’est déjà confectionné sa petite fable. Au lendemain du voyage présidentiel en Chine et du Groupe consultatif de Paris, les rêves les plus douillets découvrent un Macky Sall comblé d’un bonheur extatique, brassant à l’intérieur de la Pointe de Sarène des montagnes de milliards de francs Cfa, juste mesure d’une moisson effectuée en bonne et due forme auprès des bailleurs.
En réalité, à la place des billets froufroutant, Macky Sall s’est surtout assuré de l’engagement de bailleurs, de leurs promesses solennelles. Avant d’envisager la question sinusoïdale des procédures de décaissement de ces montants.
Les procédures varient d’un bailleur à l’autre
Or beaucoup de spécialistes de la question contactés par Le Quotidien avertissent : «Les choses ne sont pas aussi simples qu’elles le paraissent.» C’est dit. Entre la promesse solennelle et la levée de fonds pour la traduction du projet structurant nourri par les autorités sénégalaises, il y a très souvent un pas de géant à franchir. Pour nombre d’experts, ces situations sont variées. «Les procédures de décaissement dépendent des bailleurs, et en général chaque bailleur a ses propres procédures de décaissement», remarque Mame Biram Diouf, économiste consultant. De l’avis de l’expert, les décaissements ne sont pas les mêmes pour tous les bailleurs. Par exemple, la Banque mondiale, le Programme des Nations-Unies pour le développement (Pnud) ou encore l’Union européenne (Ue) ont des procédures de décaissement qui ne sont pas forcément les mêmes sans être éloignées les unes des autres. Dans la phase d’exécution, le bailleur a deux possibilités. «Il peut, sur la base d’un ensemble de critères, mettre l’argent au niveau du trésor. On appelle cela l’appui budgétaire. En ce moment-là, les décaissements vont suivre les procédures nationales, ils sont régis par le Code des marchés», renseigne encore une pointure en finances publiques. Dans l’autre cas, et la plupart des bailleurs comme la Chine le font, les procédures de décaissement leur sont propres.
Au Groupe consultatif, en général il y a des conventions annexées et qui stipulent les modalités de décaissement. Elles s’étendent souvent sur plusieurs années. Généralement les bailleurs font tout pour faciliter les procédures de décaissement comme la mise en place d’ordonnateurs qui sont installés dans les pays et qui ont le pouvoir de décaisser.
Des préalables requis
Pourtant, avant le décaissement, des préalables sont souvent requis. Ils ont pour noms : études de faisabilité et évaluation ex-ante, c’est-à-dire avant que la mise en œuvre soit faite. Ici, le bailleur et la partie nationale, qui est très souvent le ministère des Finances, vont procéder à la signature de la convention après quoi un premier décaissement est fait et les autres suivent. «Tout dépend de la nature du projet et son ampleur», précise cependant ce haut cadre du ministère des Finances. Cela pose aussi la problématique de l’absorption des crédits et les capacités du Sénégal dans ce domaine qui ne sont pas toujours satisfaisantes. «Mais cela dépend de la qualité des ressources humaines qui gèrent les fonds. Si elles maîtrisent très bien les procédures de décaissement, notamment les procédures de passation des marchés et autres, en général il y a pas de problème», précise Mame Biram Diouf.
Toutefois, les professionnels du ministère de l’Economie et des Finances, assure-t-on, maîtrisent bien les procédures de décaissement de tous les bailleurs et la «Direction de l’investissement est rompue à ce genre de tâches». Pour les bailleurs, l’important c’est également de sauver la mise. «Les bailleurs ont des procédures telles que leur argent ne passe pas par la fenêtre», garantit encore Mame Biram Diouf.