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Conférence - Lutte contre le radicalisme par le dialogue : Le métissage, l’éducation et la tolérance religieuse convoqués
Publié le jeudi 14 avril 2016  |  Le Quotidien
Présentation
© aDakar.com par DF
Présentation sur: "Les nouvelles menaces : enjeux et défis"
Dakar, le 08 Octobre 2015 - L`enseignant chercheur Bakary Samb a présenté le cours inaugural ’’Les nouvelles menaces : enjeux et défis’’ lors du lancement du Master II en ’’Défense, sécurité et paix’’ du Centre des hautes études de défense et de sécurité (CHEDS). Photo: Dr Bakary Samb, enseignant-chercheur




La conférence sur le thème «Radicalisme et dialogue», qui s’est tenue hier à l’Ucad II, a offert un débat ouvert et très diversifié sur les sources et les manières de lutter contre la radicalisation. De la nécessité d’un dialogue comme arme anti-terroriste à l’importance de l’éducation et du métissage international en passant par le cas religieux du Sénégal ou les visés du terrorisme, les propos des panélistes étaient denses en enseignements.

Le radicalisme et le dialogue sont deux termes qui ont animé la salle de conférence de l’Ucad II hier. Organisée par la fédération Wallonie-Bruxelles, cette conférence a trouvé un sujet de réflexion quant à la manière de lutter contre la radicalisation (qui conduit au terrorisme) par le dialogue. «Je ne connais pas beaucoup de guerres qui se sont terminées sur les champs de bataille. Les solutions militaires n’ont jamais pu régler la question du terrorisme», a soutenu Bakary Samb, enseignant-chercheur au Centre d’Etudes des Religions à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, pour justifier le besoin d’échanges. Il est aussi l’auteur de la punch-line de cette rencontre : «Aujourd’hui, nous sommes devenus la communauté internationale des vulnérables.» Et pour cause, explique-t-il, le danger terroriste est partout et tout le monde est concerné. «Le radicalisme ambiant nous place donc tous au même niveau de vulnérabilité.» Pour M. Samb, c’est un élément qui doit pousser à la discussion.
L’invité d’honneur, M. Ruby Demotte, Ministre-Président de la Fédération Wallonie-Bru­xelles, a souligné qu’aujourd’hui, «les outils pour combattre les crises sont obsolètes». «Si les clés contre le terrorisme manquent, peut-être qu’il faut privilégier le dialogue», a-t-il dit. Une troisième paneliste, la professeure Ndioro Ndiaye, directrice générale adjointe de l’Orga­nisation internationale pour les migrations et présidente de l’Alliance pour la migration, le leadership et le développement, soutient néanmoins que «dès que dialogue il y a, je ne suis pas sûre que les éléments du dialogue sont ceux qu’il faut pour qu’on puisse voir ou entrevoir des solutions». Elle s’interroge sur le manque de dialogue actuel des pays, indiquant que les discussions peuvent prendre plusieurs formes.

La «négation des libertés humaines»
M. Rudy Demotte et plus largement les panélistes sont revenus sur les tenants et les aboutissants de cette radicalisation que l’humanité connaît de nos jours. «L’Amé­rique, orpheline de son ennemi historique communiste, s’en est inventé un nouveau à travers la notion de choc des civilisations. La rupture est arrivée le 11 septembre 2001 lorsque les Etats-Unis ont été attaqués sur leur sol. Depuis, les organisations terroristes que nous connaissons ont émergé et elles travaillent à détruire un modèle, à créer la peur et un clivage entre les musulmans et les non-musulmans : soit rompre le dialogue.» M. Demotte résume brillamment la situation à travers l’exemple de l’attentat contre le musée du Bardo en Tunisie en mars 2015 : «Qu’est-ce que c’est cet attentat du Bardo ? On ne parle pas nécessairement de gens, on parle aussi d’un symbole. C’est un musée où des milliers de gens venaient admirer des œuvres de la préhistoire, de la civilisation phénicienne, numide, chrétienne, arabo-musulmane. C’est la quintessence même d’une société qui avait vécu ces strates différentes de cultures qui ne se sont pas substituées les unes aux autres mais venaient, à un moment donné, se rencontrer sur le territoire d’un pays. C’est dans ce symbole-là que l’on dépose des bombes.»
Le Président-Ministre de la Wallonie-Bruxelles continue en comparant ces actes à ceux des nazis durant la Seconde guerre mondiale, lorsqu’ils détruisaient des œuvres juives ou condamnaient le jazz. «Ces actes à Abidjan, à Bamako ou à Ouagadougou sont de la même nature», assure-t-il. Pour lui, le terreau et le combat de ces organisations comme l’Etat Islamique conduisent à la «négation des libertés humaines».

Le métissage, une forme de dialogue
Le symbole attaqué au Bardo c’est la culture mais aussi un dialogue interculturel, une forme de métissage. En reprenant les thèses de l’écrivain Jean-Claude Guille­baud, auteur d’un livre sous-titré : «Vers une modernité métisse», Rudy Demotte parle d’une histoire de l’humanité où le métissage a toujours été présent. Affirmation que conteste le recteur de l’Uni­versité Ibrahima Thioub lorsqu’il parle de refus du métissage dans le monde actuel. «Nous le refusons tellement radicalement que nous ne nous en rendons pas compte», complète-t-il. Il prend l’exemple de Barack Obama que l’on désigne comme le premier Président noir des Etats-Unis d’Amérique. A l’en croire, c’est une appellation qui s’est banalisée alors que Obama est métis, pas noir. M. Thioub voit là, une corrélation inconsciente avec les lois racistes Jim Crow qui disaient qu’«une goutte de sang noir faisait de toi un noir». «Ce refus de mélange, de métissage est une origine de la radicalisation», a-t-il expliqué.

La clé : l’éducation
Les panélistes ont tous vanté le rôle majeur que l’éducation occupe dans la lutte contre la radicalisation. C’est elle qui ouvre les étudiants au monde, leur confère une panoplie de valeurs et surtout elle aide à prévenir tout rejet social ou isolement qui pourrait pousser un jeune à se mettre en rébellion et prendre la voie de la radicalisation. «L’enseignement, la culture sont des antonymes aux armes», garantit Rudy Demotte. Il ajoute qu’il faut «former les étudiants à la capacité à critiquer, à évoluer, à s’adapter». Sans surprise, le discours du recteur Ibrahima Thioub va dans le même sens. Il appelle à réformer le modèle pédagogique et assure que l’Université peut ainsi «poser les problèmes de nos sociétés, y apporter des solutions et transmettre à la jeunesse pour que celle-ci trouve les ressources matérielles, culturelles et spirituelles qui permettent de faire sens. C’est la réponse que l’Université peut apporter au phénomène de radicalisation».
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