DAKAR, La décision du Tchad de se constituer partie civile au procès attendu de l’ex-président tchadien Hissène Habré est une violation du droit, a estimé jeudi une association soutenant M. Habré, inculpé de crimes contre l’humanité et détenu à Dakar où il est réfugié depuis 1990.
Mardi, "le gouvernement d’Idriss Deby (Itno, actuel président tchadien) s’est constitué partie civile dans cette affaire en violation flagrante" du statut des Chambres africaines extraordinaires, le tribunal spécial créé en vue de juger l’ex-président tchadien, déclare le Collectif africain de soutien à Hissène Habré (CAS-Habré) dans un communiqué.
"L’opinion nationale et internationale peut constater que la violation du droit est la règle dans l’affaire Habré", ajoute ce collectif, en exprimant "ses plus vives inquiétudes" face aux "derniers développements" dans ce dossier qu’il qualifie de "politico-judiciaire".
Il appelle le président sénégalais Macky Sall "à libérer sans conditions ni délai" M. Habré.
L’Etat tchadien a fait déposer mardi par ses avocats sa lettre de constitution de partie civile au greffe du tribunal spécial créé en vue de juger M. Habré, et basé à Dakar. Ses mandataires ont expliqué que le Tchad entendait ainsi ouvrir un volet économique dans l’affaire, estimant que M.
Habré, qui a dirigé le pays de 1982 à 1990, lui a causé un préjudice financier.
Hissène Habré a été inculpé de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et tortures commis au cours de ses huit ans au pouvoir avant d’être renversé en 1990 par Idriss Deby Itno. Depuis sa chute, il vit en exil au Sénégal.
Le Sénégal et l’Union africaine (UA) ont signé en décembre 2012 un accord pour la création au Sénégal du tribunal spécial en vue de juger Hissène Habré.
En mai 2013, le Tchad et le Sénégal ont signé un accord devant permettre
aux juges de ce tribunal chargés de son procès de mener des enquêtes au Tchad.
L’ex-président Habré a été arrêté le 30 juin 2013 à Dakar puis inculpé le 2 juillet 2013 par le tribunal spécial et placé en détention préventive.
Mardi, le collectif des avocats des victimes du régime d’Hissène Habré avait estimé que la démarche de l’Etat tchadien de se constituer partie civile au procès de l’ex-président Habré n’avait "pas de base juridique" et que son entrée dans la procédure "devrait être déclarée irrecevable".
En juillet 2013, plus de mille personnes, se considérant comme "victimes directes et indirectes" du régime d’Hissène Habré, se sont constituées parties civiles dans son procès.