Dakar - Les Sénégalais sont appelés dimanche à un référendum sur des réformes constitutionnelles, dont la réduction du mandat du chef de l’Etat de sept à cinq ans, une consultation qui a pris des allures de vote pour ou contre son initiateur, le président Macky Sall.
La campagne d’une semaine a été émaillée d’accusations de corruption, de trafic d’influence et de désinformation, et même de violences qui ont fait des blessés en province, dans un pays réputé pour sa stabilité et présenté comme un modèle de démocratie en Afrique.
Le débat s’est cristallisé sur le retrait le 16 février par M. Sall, sur avis du Conseil constitutionnel, de la disposition portant sur l’application du quinquennat au mandat en cours, signifiant qu’il irait donc jusqu’au bout
de son septennat en 2019.
Elu face à Abdoulaye Wade (2000-2012) qui briguait un troisième mandat, en
contournant la Constitution selon ses détracteurs, Macky Sall avait promis
durant la campagne le retour du quinquennat, avec effet immédiat, un
engagement qu’il a réitéré depuis.
Il a sillonné plusieurs régions, rendant notamment visite aux chefs des
confréries religieuses islamiques, très influentes dans ce pays
majoritairement musulman.
Plusieurs collectifs, réunissant l’opposition et des organisations de la
société civile, appellent à voter "Non", reprochant au président Sall d’avoir
manqué à sa parole et dénonçant son empressement à convoquer le référendum.
Cette controverse a pratiquement occulté les autres dispositions de la
révision en quinze points, qui porte également sur le renforcement des droits
des citoyens et de l’opposition, ainsi que des pouvoirs législatif et
judiciaire.
- Présidentielle à l’horizon -
Le front du "Non" dont "Y’en a marre", un mouvement en pointe dans le combat contre un troisième mandat du président Wade en 2012, s’est élargi àndes responsables de la majorité, dont des députés et des maires, notamment celui de Dakar, le socialiste Khalifa Sall, présenté comme un potentiel candidat à la présidentielle de 2019.
La plupart des citoyens interrogés par les médias ont indiqué voter pour sanctionner positivement ou négativement le bilan du chef de l’Etat.
"On ne m’attaque pas sur mon bilan économique", a déclaré M. Sall à Saint-Louis (nord-ouest), accusant le camp adverse de se livrer à "de la confusion, de la désinformation et de l’intoxication" sur le contenu du projet.
La présidence a d’ailleurs publié sur son site internet un "vrai-faux du référendum" pour réfuter point par point les rumeurs ou les affirmations de certains militants du "Non".
Il y est ainsi précisé que la révision constitutionnelle "ne permettra pas au président Macky Sall de faire un éventuel troisième mandat à partir de 2024" en jouant sur une éventuelle ambiguïté due au passage du septennat au quinquennat, et qu’il n’a pas pour objet d’encourager l’homosexualité, d’ailleurs illégale au Sénégal.
Le camp du "Oui" a également été accusé d’"achat de conscience" en utilisant de l’argent pendant la campagne, selon ses détracteurs. Des soupçons alimentés par les déclarations d’un responsable du parti présidentiel, le député Moustapha Cissé Lô, selon lequel "l’argent va couler à flot" pour récolter des voix.
"Le Forum du justiciable", un mouvement citoyen, a invité le procureur de la République à "s’autosaisir" en réaction à ces propos violant selon lui le Code électoral.
Le chef de l’Etat "a transformé une promesse électorale en enjeu plébiscitaire", en organisant une "présidentielle à candidature unique" lors de laquelle il faut répondre "oui ou non à Macky", commentait l’hebdomadaire privé "Nouvel Horizon".
A travers ce référendum, il "cherche à se rassurer" en prévision des élections législatives prévues en 2017 et avant la présidentielle de 2019, selon des analystes.
Plus de 5 millions d’électeurs sont appelés aux urnes dimanche de 08H00 à 18H00 (GMT et locales). Mais près de 200.000 personnes vont être privées de vote en raison de problèmes techniques qui ont empêché la production de leurs cartes d’électeur, selon le ministère de l’Intérieur.
Les premiers résultats sont attendus dans les heures suivant la clôture du vote, précédé les 12 et 13 mars par celui des militaires, marqué par une très faible participation.
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