Le Saes/section Ziguinchor n’a pas fait dans la dentelle pour s’attaquer ce lundi au recteur de l’Université Assane Seck de Ziguinchor (Uasz). Lors d’un sit-in suivi d’un point de presse organisé devant le rectorat de l’Uasz, les enseignants du supérieur n’y sont pas allés de main morte pour fustiger et décrier, dans une lettre ouverte adressée au président de la République, la «mauvaise gestion» de l’Uasz, institution qui est tout simplement en phase de banqueroute, disent-ils.
«Le maigre budget de l’Université ne peut servir de fonds politiques», «Le Saes réclame un budget de vérité pour un enseignement de qualité», «Monsieur le Président, il faut sauver le soldat Uasz», «Offre d’emploi, l’Uasz cherche recteur», etc. Tels étaient les slogans qu’on pouvait lire sur les pancartes de la cinquantaine d’enseignants membres du Saes/Uasz venus dénoncer devant le rectorat la gestion financière, administrative, des affaires pédagogiques, entre autres, au sein de l’Uasz.
Par la voix de Younouss Dieng, secrétaire général du Saes/Uasz, ces enseignants ont soutenu dans leur lettre ouverte adressée au président de la République que, par rapport à la gestion financière, le budget de l’Uasz n’a subi aucune augmentation conséquente depuis trois ans au moment où les effectifs du Per, du Pats et des étudiants n’ont cessé, disent-ils, de croître avec les charges induites. «Pendant que les recteurs des autres universités, par leur tact, leur habileté et leur perspicacité dans le plaidoyer, parviennent au moins à se faire entendre, notre recteur adopte un profil bas», a déclaré M. Dieng. Pour qui le budget de l’Uasz est géré de façon inique par l’ordonnateur principal qui se taille toujours la part du lion avec près de 94% des ressources allouées au rectorat. Et ce, au moment où les Ufr, les départements et les services non rattachés au rectorat doivent, note-t-il, fonctionner avec 6% du budget.
Une «banqueroute» causée par «diverses dettes»
Le secrétaire général du Saes/Uasz a dénoncé la création par l’administration rectorale de directions illégales et le paiement de primes toutes aussi illégales pour récompenser, justifie-t-il, un clan d’amis. «Avec ce budget insuffisant, une bonne partie est consacrée aux charges de transport du recteur, une autre à l’entretien de l’hôtel du recteur, aux charges locatives de maisons de fonction et d’une maison de l’Université devenue un gouffre à millions pour caser des militants, sans compter les prétendus frais d’entretien de bâtiment et de mobiliers invisibles», soutient-il. Et la conséquence de cette mauvaise gestion est que l’Uasz, selon le Saes/Uasz, est en banqueroute. Une situation justifiée, selon les enseignants, par le cumul de dettes envers les structures hospitalières et qui fait que les personnels de l’Uasz sont systématiquement renvoyés des hôpitaux, la dette contractée auprès de la Senelec et qui a atteint 132 mille francs Cfa sans que l’origine de cette dette ne soit connue, tout comme celle de 100 mille francs Cfa contractée auprès de la Sonatel, une dette estimée à plus de 400 millions de francs Cfa, correspondant aux heures supplémentaires du Per du premier et du second semestre 2014-2015, aux émoluments des vacataires du second semestre 2015, y compris les sommes dues au Pats, un cumul des dettes de l’Uasz qui s’élève déjà à 900 millions de francs Cfa, sans compter les cotisations sociales non versées. Et pour les responsables du Saes/Uasz, le projet de budget 2015-2016, qui couvre à peine les dépenses de fonctionnement sur 12 mois, ne prévoit pas de ressources pour éponger cette lourde dette. Et sans l’octroi de fonds supplémentaires, il est illusoire de combler un tel gouffre financier qui représente 31% de la dotation pour l’exercice 2015-2016.
«Des collègues nouvellement recrutés sont déjà candidats au départ»
Pour Younouss Dieng et ses camarades, les fautes administratives à l’Uasz ne sont jamais sanctionnées et pis, leurs auteurs promus. Et l’année 2015-2016 a débuté, selon le secrétaire général du Saes, avec un désordre chaotique dans l’élaboration des emplois du temps et du calendrier académique. «On assiste avec désolation et regret à la suppression de tout ce qui pouvait être source de motivation pour attirer et retenir des compétences à l’Uasz, naturellement handicapée par son enclavement. Ainsi, des collègues nouvellement recrutés sont déjà candidats au départ», a déclaré le patron local du Saes. Pour qui la nouvelle trouvaille de l’administration rectorale pour cacher les difficultés de la communauté universitaire est la prolifération de fêtes inutiles et budgétivores : la «Fête de l’excellence», la «Fête du mérite», la «Prime du meilleur enseignant-chercheur», la «Prime du nouveau maître de conférences», etc. Et pourquoi pas la «Prime du meilleur Pats» ou encore la «Prime du plus fidèle serviteur du recteur» etc., s’est-il interrogé. Et pour Younouss Dieng, il s’agit pour le Saes par cette énième série de déclarations régulières de manifester à l’endroit du président de la République la déception d’un corps enseignant ambitieux, mais malheureusement freiné dans son élan de faire de l’Uasz une université de référence.
Kéba Courfia Diawara, recteur de l’Uasz : «Nous sommes surpris par de telles confusions»
La réaction du recteur de l’Université Assane Seck de Ziuginchor à la sortie du Saes/Uasz ne s’est pas fait attendre. «Au moment où l’Uasz est dans une logique de performance saluée et reconnue, nous sommes surpris par de telles confusions qui émanent d’une frange de la communauté universitaire. Cela est suffisamment sérieux pour que mon équipe et moi prenions la peine d’éclairer l’opinion nationale et internationale par rapport à cette situation», a déclaré face à la presse Kéba Courfia Diawara. Qui estime qu’il y a énormément de confusions dans cette lettre et des confusions étonnantes. Et cela est d’autant plus étonnant que cette lettre émane, souligne-t-il, d’acteurs qui vivent les réalités de cette université. Et le recteur de se demander si une telle sortie n’est tout simplement pas faite à dessein.