La Chambre criminelle du Tribunal de grande instance de Dakar a condamné, vendredi, un chauffeur à 15 ans de travaux de forcés pour le meurtre d’un ami, pour du chanvre indien.
De victime d’une accusation de vol de chanvre indien, Djiby Sarr est passé à meurtrier. A cause de cette accusation, il a poignardé mortellement un de ses amis avec une dent d’espadon ou rostre appelé ‘’bec naw-naw’’. Le 12 octobre 2009 au quartier de Wakhinane de Colobane, de retour du garage, le chauffeur Djiby Sarr a croisé en chemin Babou Tine. ‘’Il était très agité et il m’a demandé de lui rembourser les deux cornets de chanvre que deux de mes amis avaient pris auprès de lui’’, a raconté l’accusé vendredi, à la barre de la Chambre criminelle du tribunal de grande instance de Dakar. D’après son récit, lorsqu’il a rétorqué à son interlocuteur que cela ne le concernait pas, surtout qu’il avait cessé d’user de la drogue depuis sa première condamnation, Babou s’est mis à l’injurier. ‘’Je me suis plaint auprès de nos connaissances, mais il a exigé un remboursement. Alors, j’ai décidé de retourner au garage. Il m’en a empêché’’, a ajouté l’accusé.
A l’en croire, il est retourné chez lui pour éviter la bagarre. ‘’Quelque temps après, en me rendant au garage, il m’a intercepté dans la rue en brandissant le rostre. J’ai réussi à le désarmer’’. Djiby Sarr a poursuivi pour dire aux juges qu’il ignore comment le coup est parti, car son protagoniste est parti en courant, avant de s’affaler dans un coin.
Seulement sa thèse a été battue en brèche par les témoins qui ont défilé à la barre. Ils ont affirmé que Djiby Sarr a poignardé Babou Tine, à la suite d’un antécédent lié à du chanvre indien. D’ailleurs, lors de l’enquête, une dame qui n’a pas pu comparaître à la barre, pour défaut de pièce d’identité, a déclaré avoir vu Djiby Sarr, torse nu, très agité, et revendiquant le meurtre.
L’adjoint au délégué de quartier l’a conforté à la barre, en déclarant avoir vu Djiby Sarr furieux, en train de marmonner qu’il avait affaire à une personne, à cause de l’herbe du tue. ‘’Lorsqu’un enfant m’a dit que Babou a été poignardé, j’ai compris que c’était Djiby’’, a soutenu le témoin. Mais l’accusé a récusé ces différents témoignages, en déclarant qu’aucun d’eux n’a assisté à la bagarre. Qu’il n’a jamais poignardé la victime. ‘’Modou Tine, c’était mon ami. Il m’a même aidé à obtenir un permis de conduire. Donc, je n’ose pas tuer son frère et je ne vends pas non plus de yamba’’, a dit avec insistance Djiby Sarr, dont la perquisition de sa chambre a permis la découverte de 17 cornets et 400 kg de chanvre indien.
La représentante du parquet a requis les travaux forcés à perpétuité, en estimant que l’accusé ne peut se prévaloir de l’excuse de provocation. Mais qu’il y a bel et bien une volonté de donner la mort. Me Hilal Shérazad a réfuté cette thèse. Elle est convaincue que tout est partie de la victime qui a porté une fausse accusation contre son client. Sur la drogue et les ciseaux trouvés, elle a déploré l’absence d’analyse, pour vérifier s’ils contiennent les empreintes de l’accusé. Compte tenu de ces arguments, elle a demandé une application bienveillante de la loi pour permettre à Ndiaga Sarr, qui est soutien de famille, de retrouver les siens. Ce qui ne sera possible qu’en 2024, s’il purge l’intégralité des 15 ans de travaux qui lui ont été infligés.