Pour éviter que des individus ne défient les Forces de l’ordre en brandissant des armes blanches comme lors de la grève de la Css, le préfet de Dagana a décidé de prendre des mesures. En attendant l’application de la mesure, la Css évalue ses pertes.
Le préfet du département de Dagana a demandé depuis le 12 janvier dernier d’interdire aux ouvriers de la Compagnie sucrière sénégalaise (Css) la détention et la circulation de leurs coupe-coupe en dehors de leur lieu de travail. Ces travailleurs, en l’occurrence les coupeurs de canne à sucre, qui sont un peu plus de 2 000, ont pris l’habitude, depuis des années, de rentrer chez eux avec ces instruments ou de circuler en ville avec, car ils constituent pour eux des outils de travail. Il a fallu qu’une partie de ces gens entament un mouvement de grève sauvage en début d’année et se mettent en situation de confrontation avec l’autorité pour que tout le monde prenne conscience du danger que ces coupe-coupe pouvaient poser pour la sécurité publique.
En effet, du 8 au 10 janvier derniers, un groupe de travailleurs saisonniers, affectés à la coupe de la canne, a voulu prendre en otage toute l’entreprise sur la base de revendications qui pour la plupart avaient trouvé solution depuis bien longtemps. Face à l’intransigeance de la direction qui dans la foulée a décidé de licencier 69 de ceux qui étaient considérés comme des meneurs, les autres ont décidé d’empêcher les autres d’accéder à leur lieu de travail et ont assiégé l’usine de la compagnie, empêchant à quiconque d’y accéder.
1 800 coupe-coupe distribués par an
Armés de leurs coupe-coupe, ces gens qui à un moment étaient estimés à 300 personnes n’ont pas hésité à défier les gendarmes venus en renfort de Saint-Louis, et à vouloir s’en prendre à ces derniers, car ils estimaient sans doute qu’ils étaient supérieurs en nombre. La confrontation qui en a suivi a vu un certain nombre de gendarmes blessés par ces armes blanches. Auparavant, ces individus n’avaient pas hésité à faire la chasse de manière violente à tous ceux qui manifestaient la volonté de se rendre au travail. La compagnie sucrière de Richard Toll a ainsi connu des journées où le périmètre de l’usine n’était occupé par personne, alors que certaines machines fonctionnaient toutes seules, au risque que l’éthanol produit et stocké sur les lieux pour plusieurs mètres-cubes prenne feu et fasse littéralement exploser la ville.
Maintenant que l’autorité a décidé que ces armes blanches ne devraient plus quitter l’enceinte de la Css, la direction veut mettre la mesure en application à partir du 1er février prochain. Mais avant, elle va entamer un travail pédagogique pour convaincre les ouvriers que les désarmer ne revient pas à leur priver de leur boulot. «Ces gens ont depuis des dizaines d’années pris l’habitude de rentrer chez eux avec ces coupe-coupe. Quand on veut les leur retirer, ils pensent qu’ils n’ont plus le droit de travailler», indique le Dg André Froissard. Néanmoins, c’est chaque année 1 800 coupe-coupe qui sont distribués en début de campagne. Si la Css a eu pour excuse que l’on n’avait jamais connu auparavant une telle fronde de coupeurs de canne armés, il n’en reste pas moins que depuis quarante années que cette activité de coupe de la canne se fait de manière manuelle, c’est des millions d’armes blanches qui circulent dans la zone. Avec tous les dangers.
1,8 milliard perdus
En dehors du bilan social, la Css a aussi fait les comptes sur le plan financier pour se rendre compte que les près de 4 jours de lock-out lui ont coûté cher. Entre les frais fixes, les cannes perdues en sur-séchage, la campagne de coupe à prolonger, le «décyclage» d’une partie de la canne, etc., c’est un total d’un milliard et 800 millions de francs Cfa que ce mouvement aura coûté à la compagnie.