La campagne de plaidoyer en faveur de l’avortement médicalisé devrait se terminer par une proposition de loi au ministre de la Justice, Me Sidiki Kaba, dont le souci est d’arriver à un consensus, qui permettrait l’élaboration d’un texte majoritairement acceptée par les Sénégalais, a indiqué, mercredi à Dakar, Fatoumata Guèye Ndiaye, présidente de l’Association des juristes sénégalaises (AJS).
"Nous avons des fondements juridiques dont le protocole de Maputo et les conventions que nous pouvons évoquer et dire au Sénégal qu’il faut les appliquer pour l’avortement médicalisé, mais nous voulons une démarche de consensus", a-t-elle déclaré.
La présidente de l’Association des juristes sénégalaises rencontrait la presse, pour faire le point sur la campagne de plaidoyer sur l’avortement médicalisé, en cours depuis un an au sein des communautés.
"Nous pourrions appliquer les lois mais nous voulons aller vers un consensus qui va réunir la majorité des populations’’, a souligné Fatoumata Guèye Ndiaye.
"Nous avons opté délibérément pour des campagnes de sensibilisation et de plaidoyer’’ ciblant les communautés, une stratégie qui permet de "parler de la gravité de la situation", a-t-elle dit, ajoutant des visites dans les prisons ont permis aux membres de l’association de documenter des cas.
Khady Bâ, chargée de programme à l’AJS, a pour sa part mis en exergue la gravité du problème, en soutenant que "51500 avortements provoqués ont été recensés au Sénégal en 2012, soit un taux de 17 avortements pour 1000 femmes âgées de 15 à 44 ans."
Cela signifie que "chaque année, près de 2 % des femmes au Sénégal font un avortement", a souligné Mme Bâ, citant une étude datée d’avril 2015.
Sur la base de ce constat, plusieurs associations et organisations de défense des droits humains ont décidé de mettre en place un comité technique, a signalé la chargée de programme à l’Association des juristes sénégalaises.
Cette Taskforce a l’ambition de mener "un plaidoyer en vue du changement de la loi sur la santé de la reproduction et du code pénal, pour permettre l’accès à l’avortement médicalisé aux femmes et aux jeunes filles en cas de viol, d’inceste ou d’atteinte
à la santé ou à la vie de la mère et du fœtus", a précisé Khady Bâ.
Dans ce cadre, une proposition de loi a été soumise au ministre de la Justice "il y a seulement deux mois’’, a-t-elle renseigné, ajoutant que "le gouvernement s’en est saisi pour discuter avec tous les ministères et les institutions concernés" par cette question.
"Nous avons eu une oreille attentive au niveau des plus
hautes autorités de ce pays. Des plaidoyers ont été menés pour que le débat puisse être posé officiellement, notamment avec le président de la République et le Parlement’’, a assuré Mme Bâ.
"Aujourd’hui le débat est posé au plus haut niveau. Nous avons bon espoir que cette loi, si elle est adoptée, répondra aux attentes de la majorité des Sénégalais", a-t-elle conclu.
Seulement, l’aboutissement d’une loi "prend du temps, nous avons l’exemple de la loi sur la parité, l’équité fiscale et la nationalité", a-t-elle fait valoir.