La 11e édition des matinales géopolitiques du Centre d’Études Diplomatiques et Stratégiques a été une occasion de poser le débat sur la menace terroriste.
Invité d’honneur de la 11e édition des matinales géopolitiques du Centre d’Études Diplomatiques et Stratégiques (CEDS), le commandant des éléments français au Sénégal, Pascal Facon, a appelé à beaucoup plus de vigilance dans un contexte marqué par le terrorisme. Se prononçant sur le thème : « Les peuples face à la mondialisation de la terreur : quels rôles pour les acteurs étatiques et non étatiques contre l’hyper terrorisme ? » il a surtout invité les uns et les autres à faire preuve de discernement. « Quelque chose qui, lorsque c’est révélé par la presse et qu’on utilise cette caisse de résonance, est incroyable. Cela fait quinze jours qu’à la télévision française, l’on parle tous les jours de ce qui s’est passé. Utiliser certains termes, c’est donner de l’importance à nos adversaires », déclare le général Pascal Facon. L’urgence dit-il, est à l’action intelligente.
‘’Avant de gagner la paix, il faut gagner la guerre’’
‘’La joie de l’âme est dans l’action. Agissons ! On voit bien que l’absence de discernement que l’on peut avoir, quand on observe ce phénomène, peut conduire à quelque chose que notre adversaire souhaite qu’est la division des individus’’, prévient l’officier. De ce fait, il ‘’vaut mieux faire preuve de la plus grande vigilance et peser bien tous les mots, lorsqu’il s’agit d’observer, d’analyser, de comprendre un phénomène comme le panel qui nous réunit ce matin. Puisque moi je ne suis qu’un modeste ‘’toubab’’, il y a des réalités qui m’échappent‘’.
Malgré ce subit accès de modestie, Général Facon n’en pense pas moins qu’un message d’espoir doit être véhiculé, face à celui des adversaires qui dit : ‘’On aime la mort autant que vous aimez la vie.’’ Selon lui, avant de gagner la paix, il faut gagner la guerre, en essayant de réduire les capacités de nuisance des adversaires. Il préconise donc l’action militaire comme étant un élément de résolution du terrorisme. Le commandant des éléments français au Sénégal souligne aussi la mutation permanente du modèle de l’adversaire. ‘’Il faut que l’on prenne la mesure qu’on a à combattre quelque chose qui se situe hors du chapitre 6 des Nations unies. Il faut se mettre en capacité de vaincre l’adversaire par des modes d’actions militaires : la rapidité et la mobilité.’’ ‘’Ne nous laissons pas aveugler, dit-il, submerger par la propagande.’’
‘’L’islam et le terrorisme n’ont rien à voir’’
Le général Mansour Seck a lui tenu à faire une précision : ‘’L’islam, c’est la paix’’. Selon lui, ‘’il y a un petit jihad qui est la défense de la religion musulmane, mais surtout le jihad qui est la guerre contre soi-même qui inclut la tolérance et qui n’a rien à voir avec tuer des gens et le montrer à la télévision’’. De ce fait, il invite les Occidentaux à ne pas avoir une ‘’over réaction’’, c’est-à-dire ne pas faire un rapprochement entre le terrorisme et l’islam. Le général Seck considère ainsi que l’intelligence doit être le moteur de toute action. ‘’Un des buts des terroristes est d’affoler les gens. Ce sont les Chinois qui ont défini le terrorisme pour dire : vouloir tuer un, vous terrorisez 10 000. Avec l’effet des médias modernes, la télé, internet, ce sont des milliards de personnes qui sont touchées’’. Avec la sur-médiatisation, les gens ont peur au lieu d’avoir une attitude de résistance et de sérénité, poursuit-il.
‘’Il est nécessaire de mettre en place une armée continentale’’
A la suite du général, Djibril Ndiaye, professeur de Géopolitique, a plaidé pour la mise sur pied d’une armée continentale. ‘’Le terrorisme n’est pas un phénomène nouveau. La guerre coloniale, l’esclavage avaient pour objectif d’instaurer la peur chez les populations concernées. Quand ce sont les États qui commettent des actes de cette envergure, c’est illégitime. Quand ce sont des combattants qui le font, là on sort l’étiquette terrorisme’’. À son avis, la vraie lutte contre le terrorisme est la lutte contre la pauvreté. ‘’Les personnes qui sont vulnérables économiquement et socialement constituent le bastion le plus favorable aux contingents terroristes’’. Il préconise donc une réponse aux problématiques sociales pour contrecarrer les discours des mouvements islamistes.
‘’Nous devons créer des espaces de confrontations’’
La modératrice, Penda Mbow, a elle invité à créer un espace de confrontations d’idées, pour résoudre le problème et éclairer l’opinion entre les shiites et sunnites. ‘’Nous devons accepter la critique et l’autocritique. Nous devons essayer de voir comment apporter des solutions. Le monde musulman est interpellé. Dans les débats, ce sont les non-musulmans qui percent et les musulmans sont là en train de revenir sur la charia, ce que dit la loi’’, dit-elle. D’après Penda Mbow, ‘’cela doit commencer par les oulémas, mais que ça ne se limite pas entre les familles religieuses. Les élites ont leur rôle à jouer : bâtir de larges consensus de paix pour repousser la menace mondiale’’. Pour la recherche de la paix, elle met en avant les valeurs comme l’éducation, la sensibilisation par l’implication des femmes. Car elle pense que les femmes sont trop instrumentalisées.
AIDA DIENE