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© AFP par SEYLLOU
Ouverture du procès de Hissène Habré Dakar, le 20 Juillet 2015 - Le procès de l`ancien président tchadien Hissène Habré s`est ouvert, ce matin, à Dakar. L`ancien chef d`État réfugié au Sénégal depuis 1990 est jugé pour "crimes contre l’humanité, crimes de guerre et crimes de torture". |
Il avait 14 ans quand il a été arrêté par les soldats de Habré. Aujourd’hui, âgé de 40 ans et directeur adjoint du service des renseignements généraux du Tchad, Souleymane Abdoulaye Taher qui aurait été torturé est traumatisé à «vie» par Habré.
«Je ne souhaite pas à quelqu’un ce que nous avons vécu. Je ne souhaite pas aussi à l’Afrique un autre Hissein Habré.» Souleymane Abdoulaye Taher, actuel directeur adjoint du service des renseignements, reste traumatisé par son passage entre les mains des hommes de Habré. Agé de 14 ans et élève en classe de 6ème au moment de son arrestation en 1989, il a connu une adolescence perturbée. «Je suis devenu adulte à l’âge de 15 ans», a-t-il dit avec beaucoup de peine. Il est victime de son «appartenance» à l’ethnie Zagawa. Laquelle était entrée en rébellion contre le pouvoir de Habré. «Quand les soldats m’ont arrêté, ils m’ont conduit à la Brigade spéciale d’intervention rapide (Bsir) où j’ai trouvé deux détenus. Quelques heures après, Djibrine est venu me chercher et m’a conduit au Sous-sol où j’ai passé 4 mois. Il y avait des mineurs dont le plus jeune n’avait qu’un an. C’est dans cette prison que Torbo m’a expliqué les raisons de mon arrestation. Il m’a dit que je suis Zagawa et depuis que la chasse aux Zagawas a commencé, ils n’ont pas réussi à mettre la main sur moi», explique-t-il.
Il aura connu toutes formes de «tortures et de sévices». «Ils m’ont sorti et conduit dans un trou. Ils ont mis du piment dans ce trou. On pouvait fermer les yeux, mais pas la bouche», a-t-il décrit la forme de torture qu’il a eu à subir dans la prison de la Piscine communément appelée Sous-sol. Selon le témoin, victime aussi d’une «électrocution», c’était les mineurs qui étaient chargés de sortir les cadavres des cellules. D’après lui, c’est Djibrine qui donnait des ordres et Aba Moussa les exécutait.
«Ce que Hissein Habré n’aime pas, Dieu aussi ne l’aime pas»
Conduit par la suite dans une autre prison, les conditions de détention n’étaient pas enviables. «Elle était pleine à craquer et les détenus étaient obligés de coucher avec les morts et on nous disait de les retourner pour avoir de la fraicheur», a-t-il expliqué. Il révèle que Hissein Habré avait les attributs d’un Dieu. Après cet épisode, le témoin a été ramené dans la cellule 11 où les prisonniers avaient du mal à se supporter à cause du nombre pléthorique. «Dans ces conditions, révèle-t-il, sur 300 détenus, il ne restait que 30 voire 40 détenus vivants. Le reste était mort à cause des mauvaises conditions de détention», précise-t-il.
Vers la fin de l’année 1989, il a été transféré à nouveau à la prison des Locaux par Aba Moussa. Au bout de deux mois, il a été ramené au Sous–sol et à la Présidence où il a trouvé des fonctionnaires, des militaires en prison. «Un jour, raconte le témoin, un détenu m’a demandé de regarder sur le balcon. C’était Hissein Habré qui était debout en train de fumer», relate-t-il.
Malgré la délivrance intervenue après la chute de Habré, le témoin n’était pas encore au bout de ses peines. «Quand nous sommes sortis de prison, nous sommes allés habiter dans un autre quartier, car tous nos biens étaient spoliés», a-t-il révélé. Aujourd’hui, la question qu’il a posée à Habré est simple : «Pourquoi moi alors que je n’avais que 14 ans ? Cet homme que je prenais pour le meilleur des chefs d’Etat quand j’étais petit n’est rien d’autre aujourd’hui que le pire que le monde n’ait jamais connu.»
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