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Le Soleil N° du 15/11/2013

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Serigne Mbaye Thiam, ministre de l’Education : « Désormais, nous ne recrutons que des enseignants bien formés pour le métier ! »
Publié le dimanche 17 novembre 2013   |  Le Soleil


Serigne
© Autre presse par DR
Serigne Mbaye Thiam, Ministre de l`Education nationale


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PARIS (France) - Le ministre de l’Education nationale, Serigne Mbaye Thiam, a représenté le Sénégal à la 37ème édition de la Conférence générale de l’Unesco, du 5 au 20 octobre à Paris. Pour le Sénégal, l’édition de cette année revêt un caractère spécial dans la mesure où elle a été préparée à Dakar par la Commission générale de l’Unesco avec la participation d’autres départements ministériels. Dans cet entretien, le ministre évoque les points saillants du message du Sénégal livré à l’Assemblée des chefs d’Etat et de gouvernements.

Quel est l’objet de votre visite à Paris ?

«Nous sommes là pour faire entendre la voix du Sénégal à la 37ème Conférence générale de l’Unesco (5 au 20 octobre 2013). Nous avons également pris part à une série de rencontres parallèles, notamment la réunion du groupe africain à l’Unesco et celle de l’Isesco. Cette dernière est un peu le pendant de l’Unesco pour ce qui est des pays de la Oummah islamique».

Quel est justement le contenu du message du Sénégal que vous avez porté à l’Assemblée générale de l’Unesco ?

«Vous savez, la coopération avec l’Unesco prévoit, entre autres, la restauration de l’île de Gorée avec un projet conjoint avec le Royaume du Qatar. Lors de la Conférence générale, j’ai plaidé pour que ce projet soit réactivé au plus vite afin de sauvegarder l’île de Gorée. Il y a également d’autres projets dans les domaines de la culture et de la communication que j’ai défendus à travers le message du Sénégal qui a fait écho. Nous avons démontré la convergence qu’il y a entre les préoccupations de l’Unesco et la prise en charge de celles-ci par les orientations et les options politiques du Sénégal. Dans le domaine de l’éducation, par exemple, le gouvernement vient d’adopter un programme sectoriel dénommé « Paquet » (Programme d’amélioration de la qualité, de l’équité et de la transparence), qui vise l’accélération pour atteindre les objectifs de l’éducation pour tous d’ici à 2015 et même au-delà, puisque ce projet couvre la période 2013-2025. Il en est de même pour l’enseignement supérieur pour lequel les concertations nationales ont pris en charge l’accès équitable à l’enseignement supérieur, l’amélioration de la qualité, de l’équité et aussi l’utilisation de toutes les opportunités des Tic avec la création de l’Université virtuelle du Sénégal. A cela s’ajoutent la valorisation du patrimoine culturel et l’expression de la diversité culturelle. Pour ce qui est de la communication, un intérêt particulier est porté par le gouvernement sur la bonne formation des journalistes».

Quels sont les autres domaines d’interventions de l’Unesco au Sénégal ?

«Nous avons également eu une entrevue avec la directrice générale de l’Unesco, Mme Irina Bokova, à qui je disais d’ailleurs que Dakar est la capitale de l’Unesco. Pour cause, notre pays développe une coopération exemplaire avec cet organisme et cela, dans bien des domaines. Nous avons un projet sur l’alphabétisation que la directrice générale de l’Unesco a d’ailleurs eu l’occasion de visiter à Pikine. Dans le secteur de l’éducation toujours, l’Unesco intervient également dans la formation des enseignants, un autre aspect abordé avec la directrice générale dans le but d’avoir une plus grande implication de l’institution. Il est prouvé que la qualité de l’enseignant est un intrant pédagogique important pour la qualité des enseignements et des apprentissages.

Avec Mme Bokova, nous avons donc passé en revue tous les points sur la coopération avec le Sénégal qui va être suivie avec la délégation permanente du pays et la Commission nationale de l’Unesco. Nous avons aussi eu des rencontres avec l’Organisation internationale de la francophonie (Oif) où le Sénégal a porté un projet sur le renforcement de capacités des enseignants en compétence langagière en français. Au mois de juin dernier, nous avions initié un test de connaissance du français sur un échantillon d’enseignants. Ce dernier a révélé un réel besoin de renforcement de capacités en langue française».

Reconnaissez-vous donc que la formation des enseignants constitue un réel problème pour le Sénégal ?

«Effectivement ! Et c’est une préoccupation prise en compte par le gouvernement. Toutefois, il y a des progrès à noter dans la formation des enseignants et dans leur qualification. D’abord, au niveau du recrutement. Jusqu’à il y a deux ans, les enseignants du primaire étaient recrutés avec le diplôme du Bfem. Aujourd’hui, il faut être titulaire du baccalauréat pour prétendre au poste d’enseignant du primaire. Nous avons aussi supprimé le quota sécuritaire qui constituait à recruter des enseignants hors concours. Tous les enseignants sont aujourd’hui recrutés sur la base d’un concours. Il n’y a plus des enseignants formés sur une courte période de trois semaines à deux mois avant d’être affectés dans les salles de classe. Maintenant, après le baccalauréat, il faut aussi réussir le concours d’entrée dans le corps enseignant pour prétendre ensuite à la formation de 9 mois avant d’entrée dans la profession. Pour l’année 2012-2013, nous avons 2188 enseignants dans les écoles de formation qui vont être injectés dans le système éducatif après leur parcours pédagogique. Cette année encore, nous avons organisé un concours d’entrée pour la période 2013-2014. Pour ce qui est des enseignants du moyen secondaire, il y a aussi un concours. Nous ne recrutons plus des vacataires à touts vents, mais des enseignants bien formés à la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université Cheikh Anta Diop ou à l’Université Gaston Berger, comme c’est le cas cette année. C’est donc au niveau de la formation, des modalités de recrutement et le relèvement du niveau de recrutement pour les enseignants du primaire qu’on va trouver la qualité. Pour les enseignants recrutés quelques années auparavant sur la base du volontariat où de la vacation, nous avons un projet de formation diplômante déjà en cours pour renforcer leurs capacités».

N’est-il pas nécessaire de créer une école spécialisée dans la formation des enseignants ?

«Nous avons déjà au Sénégal ce que nous appelons le Crfpe (Centre régionaux de formation des professionnels de l’éducation) qui sont la fusion des écoles de formation des instituteurs et des pôles académiques pour le moyen secondaire. Notre ambition est de décentraliser ce Crfpe dans toutes les régions du Sénégal. Pour cela, les financements disponibles sont disponibles. Certains centres ont été construits par le gouvernement du Sénégal et d’autres vont l’être par un financement de l’Usaid. Dans le dernier projet qui a été approuvé par le conseil d’administration de la banque le 13 juin 2013, nous avons acquis la construction de quatre autres Crfpe. C’est dire que cette préoccupation est bien prise en charge par le gouvernement. Ces centres seront construits avant la fin du quinquennat».

Le président Macky Sall tient beaucoup à l’enseignement des valeurs de la République et notamment des matières comme l’instruction civique, longtemps délaissée dans le programme scolaire. Quelles sont les mesures prises par votre département pour l’exécution des recommandations du chef de l’Etat ?

«L’instruction civique n’a jamais disparu dans le système éducatif au Sénégal. Elle est toujours prise en charge dans le cadre du nouveau curriculum de base. Cependant, une initiative forte du président de la République, pour laquelle j’ai tenue à ce qu’elle soit relayée dans les écoles, c’est la levée quotidienne des couleurs nationales qui permet aux jeunes enfants de s’habituer à rendre hommage aux symboles de la République, dont le drapeau national. Dès que le chef de l’Etat a lancé cette initiative lui-même en donnant l’exemple avec la levée des couleurs au Palais, le premier lundi de chaque mois, j’ai instruit l’ensemble des inspecteurs d’Académie à faire en sorte que ce geste soit perpétué dans toutes les écoles du Sénégal. Je me suis assuré moi-même de sa mise en pratique. Chaque fois que j’ai présidé des Comités régionaux de développement sur l’éducation, dans les 8 régions que j’ai eu à visiter en 2013, les rencontres ont toujours débuté par la levée des couleurs dans une école et ce, dans les villages les plus reculés du Sénégal. Je continue de veiller à ce que cela se poursuive, car c’est aussi un aspect important».

Après l’arabe, est-ce que vous tendez vers l’intégration de l’enseignement des langues nationales dans le système éducatif ?

«D’abord, il faut noter que l’organisation du baccalauréat arabe à été une révolution silencieuse passée inaperçue, mais qui est l’aboutissement de beaucoup de revendications, de préoccupations de cette partie de la communauté nationale qui se reconnaît dans l’enseignement religieux et arabe. Dans le gouvernement, nous nous sommes très vite attelés à réunir les conditions pour l’organisation du baccalauréat arabe. Je pense que c’est désormais un acquis. Depuis plusieurs années, le Sénégal a développé l’enseignement franco-arabe avec des écoles et collèges spécialisés. Là aussi, c’est une forte demande qui a été prise en compte, car, dans sa déclaration de politique générale, Madame la Première ministre avait annoncée la construction de 19 collèges franco-arabes d’ici à 2017. Le financement est déjà acquis.

Au ministère de l’Education nationale, nous allons donner corps à cet engagement. L’autre aspect important et aussi pris en compte, c’est le volet modernisation des daaras. Il y a là également une partie importante de la communauté nationale qui se reconnaît dans ce type d’enseignement insuffisamment pris en charge par l’Etat depuis l’Indépendance. Nous avons un nouveau curriculum qui permet d’articuler les exigences de mémorisation du Coran et de l’enseignement formel. Il permet à un enfant d’être pris en charge à 5 ans pour finir à 13 ans avec la mémorisation du Coran et les acquis du cycle élémentaire permettant d’avoir le Cfee. Nous avons aussi en perspective, d’ici à la fin de l’année, de présenter à l’Assemblée nationale un projet de loi sur le statut des daara avec 4 décrets d’application. Ces documents déjà élaborés font actuellement l’objet de concertation au niveau du gouvernement. Il en est de même pour ce qui est des langues nationales.

Dans le « Paquet » 2013-2025, l’ambition du Sénégal est de faire des langues nationales non pas seulement des langues d’alphabétisation, mais des langues d’enseignement. Pour cela, nous avons des programmes d’écoles bilingues dans le primaire, en partenariat avec les Ong et un projet Elan (Ecole et langues nationales) avec l’Oif. Cette année, lors de la rentrée, il y a eu l’ouverture de 30 écoles pilotes d’enseignement bilingue dans les langues nationales et en français. C’est un début. Toutes les langues codifiées feront l’objet d’une attention particulière par le gouvernement».

Propos recueillis par notre correspondant Ousmane Noël MBAYE

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