Le Comité national de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) a rendu public son rapport “test”, premier du genre depuis l’adhésion du Sénégal à l’Itie, portant sur l’exercice 2013 des entreprises extractives. Rendu public vendredi dernier, le rapport a relevé que la contribution du secteur extractif s’élève à près de 41 milliards FCfa, malgré la remise en cause du caractère fiable des données présentées.
Le rapport portant sur l’exercice 2013 du Comité national de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE) du Sénégal rendu public vendredi dernier a relevé le problème de fiabilité des données présentées. En effet, les conclusions du rapport “test” ont fait savoir que seules 2 entreprises du secteur des hydrocarbures et 7 entreprises du secteur minier sur les 27 entreprises extractives ont participé à l’élaboration du document intitulé “Un pas vers la transparence dans les industries extractives”.
Le cabinet en charge de l’élaboration dudit rapport note dans les résultats de travaux, en parlant de fiabilité des données présentées, que 9 entreprises extractives (2 entreprises du secteur des hydrocarbures et 7 entreprises du secteur minier) seulement ont transmis des déclarations attestées par un auditeur externe.
Par conséquent, le cabinet indépendant estime ne pas pouvoir se “prononcer sur le caractère exhaustif des données présentes dans ce rapport”.
“C’est un rapport test et d’apprentissage. Le pays sera évalué à la production de son deuxième rapport, c’est-à-dire le rapport 2014 et le pays va passer à l’étape de la validation. Ce qui permettra de voir si la gouvernance des industries extractives dans notre pays se fait selon les conditions et les normes Itie”, a souligné le président du Comité national de l’Itie.
Ismaila Madior Fall de renseigner : “on va tirer les enseignements des insuffisances et améliorer la collecte des données qui intéressent l’Itie”.
L’Etat encaisse 41 milliards FCfa
Malgré la fiabilité des données avancées, le rapport test sur les activités des entreprises minières établit près de 41 milliards FCfa la contribution du secteur extractif au budget de l’Etat, soit 2% à l’économie sénégalaise. La contribution du secteur des hydrocarbures est estimé à seulement 3 milliards FCfa. En revanche, celle du secteur minier avec la bagatelle de 38 milliards FCfa a été dominée par la Sococim à hauteur de 32.785 millions de dollars US, suivis de Les ciments du Sahel avec 15.420 millions de dollars US, de Sabadola Gold Operations avec 7.233 millions de dollars US.
Les 16 autres entreprises du périmètre ITIE couvrent 15.840 millions de dollars US.
Ce qui fait dire à Ismaila Madior Fall que “le chiffre est modeste parce que ça fait moins de 2% du Pib de 2013 et moins de 2% du budget. C’est un rapport qui est produit pour la première fois, mais au fur et à mesure que nous avancerons, on va tirer les enseignements. Ça peut aller jusqu’à 50 milliards si on procède aux corrections. D’autant que le cadrage est déjà lancé avec le premier rapport test de l’ITIE“.
Un plan Cadastre pétrolier préconisé
Dans une logique de présenter toujours les contours du secteur extractif sénégalais, le rapport propose quelques orientations pour consolider la gouvernance publique des industries extractives dans le pays. Ainsi, le Comité de Pilotage de l’ITIE Sénégal a été encouragé pour la mise en place d’un véritable Cadastre pétrolier. Il permettra, indique le rapport, de centraliser les “contacts, ainsi que toute l’information disponible sur les entreprises extractives titulaires de permis de recherche et d’exploitation d’hydrocarbures en zone territoriale sénégalaise, ainsi que sur la zone maritime commune”.
“Les coordonnées de certaines entreprises couvertes par le Rapport ITIE 2013 n’étaient pas disponibles auprès des instances de tutelle au moment du lancement de nos travaux, ce qui a retardé l’envoi de leurs déclarations Itie”, lit-on dans le rapport.
Mobilisation des parties déclarantes
Le cabinet en charge du rapport a souligné le fait que la collecte des données a été prolongée à plusieurs reprises en raison du nombre insuffisant de déclarations ITIE reçues. Face à cette difficulté majeure qui risque de porter atteinte à la crédibilité du processus ITIE au Sénégal, les résultats du rapport invitent le “Comité de Pilotage de multiplier, à très court terme, à tenir des ateliers de vulgarisation et à des actions de sensibilisation à l’ITIE, y compris au plus haut niveau, auprès des différentes parties déclarantes Itie”.
REACTIONS… REACTIONS… REACTIONS…
ISMAÏLA MADIOR FALL, PRESIDENT DU COMITE NATIONAL ITIE : « L’INTERET ET L’ENJEU DE PARTICIPER AU RAPPORT »
«Le Sénégal a maintenant l’obligation de produire chaque année un rapport Itie. Ce rapport doit donner toutes les informations relatives aux industries extractives (secteur minier, pétrolier, gazier) du Sénégal. Pour la première fois, nous avons produit un rapport dans lequel on peut retrouver toutes les informations qui concernent le secteur de l’industrie extractive et qui explique, de façon détaillée, la contribution du secteur à l’économie.
Le rapport recommande de renforcer le dialogue de haut niveau avec les institutions de l’Etat du Sénégal qui sont intéressés par le rapport Itie. Il faut que les administrations et les industries minières comprennent davantage l’intérêt et l’enjeu de participer. Le rapport recommande aussi de renforcer les capacités de certaines structures de l’administration, par exemple la direction des hydrocarbures, logée au ministère de l’Energie. Mais aussi qu’il y ait un cadastre pétrolier. La création d’une cellule coordination composée des différentes directions qui sont intéressées par la collecte des données, notamment la Direction générale des impôts et domaines, celle du Trésor ; la Douane de l’Environnement, entre autres, pour coordonner l’ensemble des informations pour pouvoir produire à temps et de qualité».
IBRAHIMA SORRY DIALLO, PRESIDENT DE LA COALITION DES ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE DES INDUSTRIES EXTRACTIVES : “Nous Sommes Restés Sur Notre Faim”
«Je dois à la vérité de dire que nous, autres acteurs de la société civile, sommes restés sur notre faim, après avoir parcouru le rapport Itie 2013. Nous avons du mal à comprendre qu’il y ait, malgré la pertinence du plan de travail national, avec la panoplie d’activités de sensibilisation et de renforcement de capacités faits par le Secrétariat Permanent, 6 entreprises du secteur des hydrocarbures et 5 autres du secteur minier n’aient pas daigné déclarer leurs paiements. Parmi celles des entreprises à avoir sacrifié à cet exercice, le rapport met en exergue un problème de fiabilité dans la mesure où seules 7 déclarations du secteur des mines par exemple, ont été attestées par des auditeurs externes. Il s’y ajoute le manque d’exhaustivité mis en relief avec la livraison de données incomplètes. Sous ce rapport, nous voudrons inviter les pouvoirs publics à peser de tout leur poids pour mieux comprendre les mobiles de ce manquement et amener les entités déclarantes encore réfractaires à se conformer à l’exercice Itie. Dans le même sillage, nous invitons l’Etat à tout mettre en œuvre pour que la disponibilité de l’information au sein des organismes collecteurs ne soit guère un facteur bloquant».
AZIZ SY, PRESIDENT DE LA CHAMBRE DES MINES DE SENEGAL : “Il y a certainement des imperfections”
«Le Sénégal en est à sa 1ère production de ce type de rapport depuis qu’il a été déclaré pays candidat au principe de l’ITIE en octobre 2013. Le fait de produire et la diffuser le rapport ITIE est très important à nos yeux parce que d’abord, cela permet à tout un chacun de prendre connaissance de l’importance de la contribution du secteur extractif dans l’économie nationale. Ensuite, cela favorise la transparence en ce sens que le rapport tente de concilier les déclarations qui sont faites entre deux partenaires, notamment les sociétés minières et l’Etat. Pour les communautés, la production du rapport permet de connaitre les revenus issus de ce secteur et l’utilisation que le gouvernement en fait. Ce rapport étant le premier, il y a certainement des imperfections et des leçons apprises et à en tirer et pour ce qui nous concerne, nous avons pris bonne note de toutes les recommandations émises et plus particulièrement les recommandations nº3 sur la fiabilisation des données et la nº7 sur l’extension des flux du secteur minier aux autres paiements significatifs. J’espère voir les ajustements et améliorations qui seront apportées aux prochains rapports et qui nous conduiront au statut de pays–conforme.»