Le Sénégal a célébré hier, vendredi 16 octobre, la Journée mondiale de l’alimentation (Jma) dans la région de Matam, au niveau de la commune de NabadjiCivol où la réflexion a porté sur la protection sociale et l’agriculture pour briser le cercle vicieux de la pauvreté rurale.
Les festivités de cette journée organisée sous l’égide de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), en partenariat avec le Programme Alimentaire Mondial (PAM) et le Fonds International de Développement Agricole (FIDA) , se sont tenues sous la présidence de Moustapha LôDiatta , secrétaire d’Etat à l’Accompagnement et à la mutualisation des organisations paysannes, en présence de Madame le Délégué Général à la Protection Sociale et à la Solidarité Nationale, Dr AntaSarrDiacko, du gouverneur de région et du maire de Nabadji Abdoulaye Sall. L’événement parrainé par le Programme d’appui au développement agricole et à l’entreprenariat rural (PADAER), a aussi accueilli la présence des représentants de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture au Sénégal (FAO), du Programme alimentaire mondial (PAM), et des organismes et organisations internationales, régionales, les directeurs nationaux des services techniques relevant des ministères de l’agriculture, de l’élevage ainsi que de la pêche. Avec notamment une forte présence des autorités administratives, locales, religieuses et coutumières.
« Cette année, la célébration de la Journée Mondiale de l’Alimentation (JMA) du 16 octobre 2015, à Matam, marque un moment tout à fait particulier pour la FAO, puisqu’elle célèbre également le soixante-dixième anniversaire de notre organisation. Pour cette date anniversaire et 35e édition de la JMA, la FAO a choisi le thème « Protection sociale et agriculture : briser le cercle vicieux de la pauvreté », dans l’objectif de montrer que la nécessité de jumeler la protection sociale avec les programmes de développement agricole est indiscutable », a laissé entendre Dr. Vincent Martin, Représentant de la FAO au Sénégal.
Selon celui-ci, la protection sociale est une partie importante de l’Agenda pour 2030, car elle est considérée comme un élément essentiel pour tirer les communautés économiquement faibles de la pauvreté. L’expérience montre en effet que les transferts d’argent aux ménages pauvres (ne serait-ce que de petites sommes), s’ils sont réguliers et prévisibles, peuvent constituer une assurance contre les risques, pour faire en sorte que ces ménages poursuivent leurs activités. Dr. Vincent Martin est d’avis que « la protection sociale permet aux ménages pauvres et vulnérables de voir plus loin, en leur offrant l'espoir et la capacité de planifier pour l'avenir. Elle favorise aussi plus d’investissements dans l'éducation, la santé des enfants et réduit leur travail. La protection sociale augmente par ailleurs le pouvoir d'achat des ménages pauvres qui consomment plus de biens et services - produits dans une large mesure par l'économie locale - et entraine ainsi un cercle vertueux de croissance économique locale ».
DES LIMITES DE LA PROTECTION SOCIALE
Néanmoins, a-t-il tenu à faire savoir, « la protection sociale à elle seule ne pourrait suffire pour éradiquer la vulnérabilité et la pauvreté des ménages qui sont généralement confrontés à des contraintes et risques multiples ». Le représentant de la FAO est d’avis que, les moyens d’existence en milieu rural peuvent être améliorés grâce à des initiatives combinant agriculture et protection sociale. « A titre d’exemple, un programme agricole sur l’autonomisation des petits agriculteurs familiaux sera épaulé par un programme de protection sociale qui met l'accent sur l'alimentation scolaire. C’est l’exemple du projet d’Achats locaux d’Aliments ‘Purchase from Africans for Africa ‘ (PAA), mis en œuvre par le gouvernement du Sénégal, avec le soutien de la FAO, du Programme Alimentaire Mondial (PAM), et du gouvernement du Brésil. Le PAA vise en effet à stimuler la production de riz dans la zone de Kédougou, tout en améliorant l’approvisionnement des cantines scolaires, grâce à la distribution du riz acheté aux producteurs locaux.
La mise à l’échelle du PAA dans la Vallée du fleuve Sénégal est aujourd’hui en cours. Le Gouvernement du Sénégal a donc bien compris cet enjeu. Il décline aujourd’hui ses orientations politiques, économiques et sociales dans le Plan Sénégal Emergent (PSE), par de nombreuses initiatives, dont le Programme d’accélération de la cadence de l’agriculture sénégalaise (PRACAS) qui accentue les efforts pour la mise en œuvre d’une politique d’autosuffisance en riz d’ici à 2017 et pour la modernisation de l’agriculture sénégalaise dans son ensemble », a-t-il expliqué. Avant de signaler que, « le gouvernement du Sénégal a également pris l’option novatrice en Afrique de mettre en place le Programme de Bourse de Sécurité Familiale. La stratégie résilience en cours d’élaboration et pilotée par le CNSA, dans le cadre de l’initiative AGIR est aussi un exemple de la direction prise par le gouvernement pour éradiquer la résilience des communautés vulnérables en associant agriculture, sécurité alimentaire, nutrition et protection sociale».
La nécessité de fédérer les politiques sociales et agricoles
Il s’agit là d’une préoccupation bien prise en charge par la Délégation générale à la protection sociale et à la solidarité nationale (DGPSN). Ainsi, pour Mme le délégué général à la protection sociale et à la solidarité nationale, Dr Anta Sarr Diacko, « le principal défi pour les gouvernements est d’étendre la protection sociale aux personnes les plus démunies et les plus vulnérables, en particulier dans les zones rurales et le secteur informel urbain ». Ceci, à travers plusieurs axes qui favoriseront une amélioration de l’accès direct des ménages aux denrées alimentaires pour un bien être nutritionnel des enfants et des femmes ».
La stimulation du développement économique local, l’accès aux services de santé et d’éducation, le soutien opéré à l’endroit des agriculteurs, tout comme la promotion des systèmes alimentaires durables et la gestion des ressources naturelles, figurent aussi sur le registre des politiques à développer. « Il y a un besoin évident de tisser des liens et de promouvoir une plus grande cohérence et des synergies entre la protection sociale, la sécurité alimentaire, le développement agricole et la réduction de la pauvreté rurale. Pour parvenir à leurs impacts désirés sur le développement, les politiques sociales devront aller de pair avec des politiques de développement agricole et rural», note Dr Anta Sarr Diacko. C’est pourquoi d’ailleurs, selon elle, « le président de la République MackySall, accorde une importance capitale à la protection sociale en l’intégrant dans l’axe 2 du plan Sénégal Emergent (PSE) intitulé capital humain protection sociale et développement durable… » Prenant enfin la parole au nom du ministre de l’Agriculture, Moustapha LôDiatta se réjouira de la forte mobilisation du jour après avoir transmis aux populations les salutations de Dr Pape Abdoulaye Seck. « Au regard des résultats que nous enregistrons, tout porte à dire que l’agriculture sénégalaise présente un autre visage lié à la qualité et au rendement des productions. De plus en plus, nous construisons une agriculture forte pour l’amélioration de la sécurité alimentaire et la réduction de la pauvreté et des inégalités sociales des communautés », a déclaré Moustapha LôDiatta, secrétaire d’Etat à l’Accompagnement et à la Mutualisation des organisations paysannes. Et de poursuivre : « les différentes orientations développées intègrent le Programme d’accélération de la cadence de l’agriculture sénégalaise. Sur ce, il me paraît essentiel de rappeler que la région de Matam, avec un potentiel énorme de surface aménagée, a déjà obtenu un taux de couverture satisfaisant en ce qui concerne les besoins alimentaires de la région pour le riz, et d’autres cultures comme le maïs ».
Le Sénégal, bon élève en matière de protection sociale
Se référant au rapport de la FAO, le représentant de l’organisme onusien stipulera par ailleurs qu’au cours des vingt dernières années, les programmes de protection sociale ont connu une expansion rapide dans les pays en développement, secourant 2,1 milliards de personnes grâce à l’aide sociale, à l’assurance sociale et aux interventions sur le marché du travail. Pour dire que de nombreux pays en développement ont reconnu que les mesures de protection sociale sont nécessaires pour soulager, dans l’immédiat, les populations en situation d’insécurité alimentaire. Sur ce volet, le cas du Sénégal dont le gouvernement a pris l’option inédite de mettre en place le Programme de bourses de sécurité familiale a été novateur, car ayant participé à la réduction du taux de prévalence des personnes en sous-alimentation. Ce qui a permis au Sénégal d’atteindre le premier OMD et de recevoir les félicitations de la FAO. Avec cette performance, le Sénégal rejoint les 18 autres pays africains, dont 14 situés à l’Ouest, à avoir franchi ce cap. « Il y a eu une énorme amélioration car le taux de prévalence est passé de 24 % à 10 %. Mais s’il y a encore 10 % de personnes en sous-alimentation, cela veut dire qu’il existe encore des poches de vulnérabilité sur lesquelles il va falloir travailler », a-t-il alerté.