La visite d’Etat du président Macky Sall à Beijing a démarré hier soir par une rencontre avec les Sénégalais de Chine. Aujourd’hui, il va s’entretenir avec son homologue Xi Jinping, ainsi qu’avec le Premier ministre, Li Keqiang, et le président du Congrès national populaire (Parlement), Zhang Djiang. Les président Sall et Jinping vont signer des accords de coopération qui vont renforcer les échanges économiques entre les deux pays, nous a signalé, hier, une source officielle chinoise.
BEIJING (Chine) - Le président Macky Sall et son épouse Marième Faye Sall sont arrivés hier matin à Beijing, un peu avant 11 heures (3 heures Gmt) pour une visite d’Etat qui va durer trois jours. Dans la délégation officielle, figurent les ministres des Affaires étrangères, Mankeur Ndiaye, de l’Enseignement supérieur, Mary Teuw Niane, des Infrastructures, Thierno Alassane Sall, de la Femme, Anta Sarr, de l’Industrie, Aly Ngouille Ndiaye, de la Pêche, El Ali Haidar et le ministre conseiller Amsatou Sow Sidibé. Des leaders du patronat tels que Mansour Kama (Cnes), Baïdy Agne (Cnp), Mbagnick Diop (Mdes), Mamadou Lamine Niang, président des Chambres de Commerce du Sénégal, Idy Thiam, président de l’Unacois, font également partie de la délégation. On y retrouve aussi deux leaders de centrales syndicales, Mody Guiro de la Cnts et Mademba Sock de l’Unsas. Des dirigeants de structures publiques et des hommes d’affaires sénégalais sont présents à Beijing, parmi lesquels le directeur général de l’Apix, Mountaga Sy, l’architecte Pierre Goudiaby, le directeur de Ccbm, Serigne Mboup, le patron de Tse, Cheikh Amar, le directeur de l’entreprise Jean Lefèbvre, Bara Tall, etc. La composition de la délégation officielle montre l’importance de cette visite qui est la première d’un chef d’Etat africain pour l’année 2014. Le chef de l’Etat, Macky Sall, sera reçu aujourd’hui à 17 h (9 h Gmt) par le président Xi Jinping au Grand Palais du peuple, le lieu ou le leader chinois reçoit ses homologues, juste à côté de la Place Tiananmen et tout près de la Cité interdite. Quinze minutes plus tard, les deux présidents vont s’entretenir en tête-à-tête.
Cet échange sur de grands sujets de l’actualité internationale et sur les échanges sino-sénégalais sera suivi de la signature d’accords de coopération et d’un dîner offert à Macky Sall et à sa délégation. Demain vendredi, le président sénégalais rencontrera le Premier ministre, Li Keqiang, au Fujian Hall du Grand Palais du peuple, puis le président du Congrès national populaire (le Parlement chinois), Zhang Dejiang. Le président Sall quittera Beijing samedi après-midi pour Paris où se déroulera la rencontre sur le Groupe consultatif durant laquelle sera présenté le Plan Sénégal Emergent qui sera également soumis aux autorités chinoises durant cette visite d’Etat à Beijing.
Le président de la république sur la réforme des institutions : « Je ne suis pas obligé d’accepter toutes les propositions de la commission »
BEIJING - Le chef de l’Etat, Macky Sall, a évoqué la question sur la réforme des institutions hier, lors de sa rencontre avec les Sénégalais de Chine. « C’est moi-même qui ai voulu mettre sur pied la commission. Cependant, je ne suis pas obligé d’accepter toutes ses propositions, mais ce que je jugerai bien pour le renforcement de la démocratie au Sénégal », a-t-il tenu à préciser afin, sans doute pour couper court à la polémique qui s’est emparée du monde politique depuis la remise du rapport par le président de la commission, Amadou Mahtar Mbow.
Selon Macky Sall, la politique de l’Etat est définie par le président et non par une commission. « Nous devons nous concentrer sur l’essentiel et arrêter les discussions inutiles qui contribuent à retarder le Sénégal. L’élection présidentielle a été transparente et la légitimité du président ne peut pas être posée au Sénégal. C’est moi qui ai signé le décret instituant la commission de réforme des institutions. J’ai également accepté de réduire mon mandat à 5 ans, ce que personne n’avait fait auparavant », a-t-il martelé en wolof.
Il estime qu’après le dépôt d’un rapport, il faut attendre que le président de la République l’examine sans pression, ni délai.
« Après les élections locales, je proposerai ce qui est conforme à mes convictions et ma vision pour l’avancement de la démocratie. Il ne faut pas croire que parce que le président est gentil, on peut lui glisser toutes les propositions. La stabilité du pays, nous ne la marchanderons pas. Notre démocratie est chantée à travers le monde car c’est un modèle de réussite. Il ne faut donc pas la déstabiliser avec d’autres systèmes qui risquent de créer le désordre. Nous sommes prêts à accepter tout ce qui va améliorer la transparence et la démocratie », a-t-il déclaré. Il demande à ses alliés de ne pas polémiquer sur ce sujet ou de critiquer qui ce soit.
« Il y a eu d’autres commissions comme celle sur la réforme foncière ou sur l’Acte 3 de la décentralisation dont toutes les propositions n’ont pas été retenues. Ce sera pareil pour la Commission nationale de réforme des institutions. Le véritable enjeu est de nous concentrer sur le Plan Sénégal Emergent que nous allons soumettre aux autorités chinoises ainsi qu’aux autres partenaires lors de la réunion de Paris dans quelques jours », a-t-il conclu.
MANKEUR NDIAYE, MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES : « Des entreprises chinoises vont accompagner les grands travaux du chef de l’Etat »
BEIJING (Chine) - Le ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur, Mankeur Ndiaye, a souligné, hier, l’intérêt de la visite du président Macky Sall en Chine. C’était lors de la rencontre entre le chef de l’Etat et les Sénégalais établis dans ce pays. Selon lui, la décision souveraine des autorités chinoises de choisir Macky Sall comme l’un des premiers dirigeants du monde et le premier président africain à être reçu à Beijing traduit bien l’importance des relations entre les deux pays. Il y a quelques semaines, le ministre chinois des Affaires étrangères avait d’ailleurs séjourné à Dakar dans le cadre des préparatifs de cette visite d’Etat de trois jours.
M. Ndiaye a mis l’accent sur la forte mobilisation des entreprises chinoises qui s’intéressent aux huit grands travaux que Macky Sall veut parachever durant son mandat. Parmi les structures désirant accompagner le Sénégal, il a cité Eximbank Chine, le Fonds sino-africain, le Fonds chinois de développement et d’autres entreprises qui veulent accompagner le partenariat solide qui lie les deux pays depuis des décennies et qui s’est déjà traduit par la réalisation de grandes infrastructures : routes, stades, théâtres, hôpitaux, etc. « La Chine est devenue la destination privilégiée de tous les pays du monde et le président chinois, durant vos entretiens, vous attend sur votre vision du partenariat entre la Chine et l’Afrique », a dit Mankeur Ndiaye à l’endroit de Macky Sall.
Aux étudiants et autres résidants sénégalais qui ont exprimé des doléances sur divers sujets, le ministre a tenu à les rassurer : « Si vous voulez obtenir des facilités sur les bagages à faire venir au Sénégal, déposez votre carte consulaire et une demande d’exonération à l’ambassade lorsque vous décidez de rentrer ». En ce qui concerne le renouvellement des passeports, il a promis que des missions diplomatiques itinérantes seront démultipliées dans des pays éloignés comme la Chine.
Le ministre a aussi évoqué la question cruciale de quelques Sénégalais détenus en Chine, parmi lesquels un homme condamné à une peine de 15 ans à Guangzhou. « Nous sommes en train de négocier un accord avec la Chine afin que des détenus sénégalais puissent purger leur peine au Sénégal. Il y a aussi un autre compatriote dont tous les papiers ont été confisqués par les autorités chinoises et qui n’a plus la possibilité de rentrer. Nous suivons son cas et espérons qu’il sera résolu tout prochainement», a expliqué le ministre des Affaires étrangères. Il a parlé du Fonds d’appui à l’insertion des Sénégalais de l’extérieur, d’un montant de 2 milliards de FCFA, destiné à ceux qui désirent rentrer pour investir au pays. « Nous allons faciliter aux femmes l’accès à ce fonds afin qu’elles financent et développent leurs projets », a promis Mankeur Ndiaye.
Les Sénégalais de Chine expriment leurs doléances
BEIJING - Les étudiants sénégalais, par la voix de leur représentant Cheikh Diop, sollicitent la mise en place d’un bureau des passeports en Chine. Ils souhaitent aussi leur insertion dans la Fonction publique sénégalaise ou dans des projets d’entreprises chinoises au Sénégal. La question de l’acheminement de leurs bagages au pays, après leurs études, a été aussi évoquée. Le représentant des étudiants souhaite l’augmentation du complément des bourses afin de faire face à la cherté de la vie en Chine, mais aussi l’instauration d’aides pour les étudiants non boursiers de la coopération chinoise. Le cas des étudiants qui passent 5 ans en Chine sans avoir la possibilité de rentrer, faute de moyens, a été rappelé par Cheikh Diop qui demande à l’Etat de leur permettre de venir au pays au moins une fois tous les deux ans.
Le porte-parole des hommes et femmes d’affaires sénégalais établis à Yiwu a félicité le président Macky Sall et a cité des mesures sociales telles que la couverture maladie universelle et les bourses de sécurité familiale. Il s’est aussi félicité de la prise en compte de la diaspora dans les politiques nationales. Cependant, il souhaite plus de facilités pour leurs activités afin de mieux favoriser les échanges entre hommes d’affaires sénégalais et chinois.
Le représentant des Sénégalais de Guangzhou, Sidy Laye, a cité les actions que leur association mène afin d’aider les membres dans le besoin (cas de décès, assistance aux malades et aux nécessiteux). Ils ont ainsi signé un contrat d’assurance de 150.000 yuans auprès d’un opérateur chinois. Les membres cotisent 100 yuans afin de faire face aux difficultés. Chaque année, 20.000 Sénégalais viennent en Chine et font parfois face à des difficultés administratives. Nos compatriotes souhaitent aussi mettre en place une coopérative d’habitat. La représentante des femmes, Anna Ndiaye, demande une bonne réinsertion de ceux qui souhaitent rentrer et espère que les tracasseries administratives seront levées. Elle aimerait bien que les Sénégalais s’inspirent de l’esprit et de la discipline des Chinois. Pour cela, elle veut que la Télévision publique sénégalaise leur donne un temps d’antenne durant lequel la diaspora expliquerait les stratégies utilisées par les Chinois pour parvenir, en si peu de temps, à un développement que leur envient tous les pays du monde.
RENCONTRE AVEC LES SENEGALAIS DE CHINE : Macky Sall insiste sur le travail et la productivité
BEIJING (Chine) - Le chef de l’Etat, Macky Sall, a rencontré hier soir à Beijing, vers 20 heures (12 h Gmt), les Sénégalais établis en Chine. Ces derniers lui ont fait par de leurs doléances et préoccupations.
La rencontre entre le chef de l’Etat, Macky Sall, et les Sénégalais de Chine a eu lieu dans une salle du Shangri-La Hôtel prise d’assaut par des hommes et femmes d’affaires, des étudiants, des travailleurs…, venus des principales villes chinoises comme Shanghai, Guangzhou, Yiwu, etc. Il y avait aussi le personnel de l’ambassade du Sénégal à Beijing et les membres de leur famille. Avant les discours, des enfants de la colonie sénégalaise ont livré un beau spectacle interprété en langue chinoise. Dans la salle, étaient présents les membres de la délégation (voir article sur l’arrivée du chef de l’Etat en Chine) parmi lesquels les députés Moustapha Diakhaté et Abou Mbow du Groupe parlementaire Benoo Bokk Yaakaar.
L’ambassadeur du Sénégal en Chine, Abdoulaye Fall, a souhaité la bienvenue à Macky Sall et lui a présenté le personnel diplomatique, les étudiants et les travailleurs disséminés un peu partout, particulièrement dans les villes du Sud. Le chef de l’Etat a insisté sur le programme Sénégal Emergent qui, selon lui, devra être soutenu par tous les Sénégalais. « Mais pour cela il faut que tout le monde se mette au travail car sans le travail, il ne sert à rien de parcourir le monde pour solliciter l’appui des bailleurs. Il faut changer les mentalités et comprendre que sans une mobilisation nationale, sans la contribution de chacun pour le développement du pays, nous compterons encore longtemps parmi les pays les moins avancés. Comme le disait l’autre, ne demandez pas toujours ce que votre pays peut faire pour vous, mais ce que vous pouvez faire pour votre pays », a dit Macky Sall.
Selon le chef de l’Etat, c’est une chance de vivre dans un pays comme la Chine qui a une longue tradition, une vieille histoire et qui a affronté de nombreuses difficultés avant d’en arriver là où il est. « Nous allons vers 60 ans d’indépendance du Sénégal et au moment de l’accession à notre souveraineté, nous étions mieux profilés que la Corée du Sud. C’est pourquoi Il faut faire un bilan et un diagnostic et avoir le courage d’affronter les réformes sans lesquelles notre pays n’ira jamais de l’avant », a-t-il déclaré. C’est la raison pour laquelle il a engagé la réflexion autour du Sénégal Emergent.
Le président de la République a déploré sur l’inefficacité des dépenses publiques car, selon lui, la plupart des moyens de l’Etat sont engloutis dans les dépenses de fonctionnement. « Nous passons tout notre temps à revendiquer des primes et des augmentations de salaires. Si toutes les ressources sont pompées par les dépenses de fonctionnement, nous n’atteindrons jamais une bonne croissance. Et nous serons les derniers de la classe, même au niveau de la sous-région ouest-africaine. La Côte d’Ivoire, qui sort d’une guerre, a une croissance de 9%, le Burkina est à 7%, un taux que le Sénégal veut atteindre dans les prochaines années. Nous peinons à dépasser les 5%, alors que notre taux de croissance démographique est de 2,7% », a dit Macky Sall.
Inefficacité des dépenses publiques
Il milite pour l’établissement d’une économie solidaire afin que tout le monde puisse bénéficier des retombées du développement. « On ne peut pas, par exemple, faire autant d’efforts et mettre autant de ressources pour une université qui passe son temps à faire des grèves. Aucun Etat ne peut donner un emploi pour tout le monde. Nous avons 130 mille fonctionnaires et plus du quart du budget est alloué à la masse salariale. Nous devons travailler pour améliorer l’environnement des affaires, l’Etat de droit, la transparence afin que le Sénégal attire les investisseurs. Vous qui étudiez ici, devez profiter des opportunités qu’offre la Chine », a-t-il poursuivi. Il a exprimé sa volonté afin que, durant son mandat, le Sénégal aille de l’avant. « Pour cela, il faut l’apport des forces vives du pays. C’est pourquoi j’ai tenu à intégrer dans ma délégation des représentants du patronat, des syndicats, des hommes d’affaires, etc. »., a déclaré Macky Sall. Il a insisté sur la productivité qui doit être améliorée au Sénégal car, selon lui, dans les collectivités locales, mais aussi à l’Université de Dakar, près de 95 % du budget est consacré au fonctionnement. « Nous devons voir comment redistribuer les ressources et mieux collecter les taxes et impôts. Il faut aussi une énergie électrique suffisante, un réseau de transport moderne, des réseaux énergétiques interconnectés. Aujourd’hui, il n’est pas normal qu’il n’existe pas d’interconnexion entre deux villes comme Mbour et Kaolack, ainsi qu’au niveau d’autres localités du Sénégal », a déploré Macky Sall. Il a remercié les Sénégalais de Chine pour leur discipline et leur mobilisation et a promis des réponses à leurs doléances. Après lui, le ministre de l’Enseignement supérieur, Mary Teuw Niane, et le directeur de l’Apix, Mountaga Sy, ont répondu aux préoccupations soulevées par les étudiants et hommes d’affaires sénégalais établis en Chine.
