Alioune Sow est un homme rodé dans la chose politique à l’image de son maître, Idrissa Seck. Rewmi et ses nombreux départs, coalition And défar Thiès, Présidentielle, entre autres questions, le maire de Thiès-Ouest dit tout.
Quelle lecture faites-vous aujourd’hui de la vie de votre parti, Rewmi, qui a enregistré plusieurs départs dont le maire de Khombole ?
Je crois qu’il faut partir des convictions politiques. Nous avons cheminé avec ces responsables qui nous sont venus du Pds. Après de multiples problèmes, nous avons avec Idrissa Seck, créé notre propre parti : Rewmi. Certains de ces responsables, que je ne minimise pas par respect à leur propre conviction, nous ont rejoints dans les moments les plus difficiles de la vie de notre leader. Et de ceux-là, il y a celui que vous venez de citer, notre grand frère Pape Mboup, maire de Khombole. Il a fait un travail extraordinaire au sein du parti et cela, il faut le reconnaître. Mais nous n’avons pas pu accéder au pouvoir comme tous le souhaitaient et nous le prenons avec beaucoup de philosophie comme tout bon croyant. Alors, ce qui s’est passé est simple : ceux qui sont restés dans leur parti sont imbus d’une déontologie politique et ont reçu une formation, que ce soit au Ps, au Pds ou ailleurs. Aujourd’hui, Khalifa Sall du Ps, Bara Gaye ou Modou Diagne Fada du Pds, Yankhoba Diattara ou Lamine Diallo de Rewmi, entre autres jeunes, sont ce qu’ils sont pour être restés fidèles à leur parti.
Est-ce à dire que les responsables qui ont quitté votre parti n’ont subi aucune formation politique et sont sans conviction politique ?
Certains ne l’ont pas. Au Sénégal, le malheur est que les gens adhèrent dans les partis politiques par affinité. Comme ces gens usent, peut-être, de considérations sociales pour adhérer à un parti, ils vont certainement user de ces mêmes considérations quand ils voudront le quitter. Et l’argument pour expliquer leur départ sera aussi simple : «Il n’a pas de considération pour moi.» Pour vous dire que ce sont des gens qui transhument au gré des considérations. A l’origine ce sont souvent des Socialistes qui sont devenus par la suite des Libéraux, pour ensuite atterrir au parti de Macky Sall et qui sont prêts encore à rejoindre d’autres partis. Certains vous disent même : «Moi, je ne vais pas rester dans l’opposition.» Ce qui veut dire que l’opposition, c’est la galère ; et le parti au pouvoir, c’est là ou on pense récolter certains revenus. C’est simplement décevant !
Que répondez-vous à ceux qui justifient ces départs par l’«inaccessibilité» de votre leader, Idrissa Seck, et son «mépris» à l’endroit de ses militants ?
C’est un faux débat. Avec l’accession du Pds au pouvoir, nous étions là. De 2000 à 2003, nous avons accompagné Idrissa Seck quand il était très fort au pouvoir. Et il nous arrivait de rester près d’une année sans le voir parce qu’à chaque fois que nous venions, nous tombions sur une Awa Guèye Kébé qui était là en train de discuter avec Idrissa Seck dans son salon au Point E, ou encore sur Oumar Sarr ou Pape Diouf. Et ils nous disaient souvent : «Le président (Idy) est occupé.» Ce sont des gens qui n’allaient jamais en week-end chez eux. Ils accompagnaient Idrissa partout. Ces gens-là n’ont jamais quitté Idrissa quand il était au pouvoir. Donc, c’est faux que de vouloir aujourd’hui dire qu’ils l’ont quitté pour cause d’inaccessibilité. Ils l’accompagnaient parce qu’ils avaient des intérêts à sauvegarder. Comment pouvez-vous comprendre que cette dame, qui a géré toutes les affaires juridiques de Idrissa Seck en prison, chez lui, avant et après, puisse parler d’inaccessibilité et de manque de respect pour justifier son départ. Qu’ils respectent les Sénégalais ! S’ils veulent partir, ils sont libres de le faire. Et puis, ce qu’il ne faudrait pas perdre de vue, c’est qu’à un moment donné, il fallait comprendre Idrissa Seck. Entre 2007 et 2012, il avait un problème de sécurité. On a attaqué sa maison à maintes reprises. Il était dans une situation telle qu’on ne pouvait pas le laisser à la portée de tout le monde. Il était poursuivi par l’ancien pouvoir qui lui en voulait à mort. Mais aujourd’hui que la situation a quelque peu changé, Idrissa Seck n’a plus qu’un seul garde du corps. Au cyber campus, vous pouvez le voir sans problème. Idem à Dakar. Idrissa est en train de s’ouvrir aux Sénégalais en faisant le tour du Sénégal. Et à ce titre, un voyage est prévu pour une tournée européenne et nous allons l’accompagner.
Le poids électoral de votre leader n’a-t-il pas connu un certain effritement ?
Ce qui peut-être, dément cet argument, c’est que Idrissa Seck est aujourd’hui le seul leader attaqué par le pouvoir. Après deux tournées dans deux seules zones du Sénégal, il commence à être, pour le pouvoir, l’homme à abattre. Peut-être parce qu’ils ont vu qu’il commence à être très accessible des Sénégalais, parce qu’il n’y a plus de problème de sécurité, qu’il commence aussi à voyager et à les rencontrer ; ce qui a été une vielle doléance des Sénégalais. Avec les consultations citoyennes, on se rend compte que les Sénégalais ont besoin d’être soulagés et de se confier à quelqu’un qui peut être l’homme du changement.
Vous n’avez gagné que Thiès. Pensez-vous que cela suffirait à élire Idrissa Seck à la magistrature suprême ?
Moi, je gère une commune de 82 mille âmes et c’est la moins peuplée de Thiès qui a un électorat supérieur à celui de toute la région de Fatick. A Thiès Nord, c’est 100 mille, à Thiès-Est 123 mille. Au total, la ville à elle seule fait presque 300 mille âmes. Et si on parvient à faire un maillage correct et à sensibiliser les Sénégalais autour de l’essentiel, avec une forte coalition pour atteindre 90% de l’électorat thiessois, il nous suffira de faire un excellent travail à Kaolack, Saint-Louis et Ziguinchor qui constituent de grands creusets électoraux dans ce pays. On ne va pas se battre à Fatick où on ne peut pas avoir plus de 1000 votants. Le problème c’est Dakar, Thiès, Saint Louis, Kaolack et Ziguinchor.
Mais vous avez été mis en ballotage à Thiès lors de dernières Locales par l’Apr…
Les élections locales, c’est une autre réalité. Les gens ne votent pas pour Idrissa Seck, mais pour son parti tout en respectant ceux qui sont susceptibles d’être maire. Si l’Apr a eu ce qu’il a eu lors des dernières élections, c’est parce qu’il y était allé avec la coalition Benno bokk yaakaar. Et à Thiès, la troisième force politique après Rewmi et le Pds, c’est bien le Parti socialiste qui fait partie de la coalition Bby. Voilà ce qui a un peu boosté les résultats de la mouvance présidentielle à Thiès. Mais aujourd’hui, la réalité est tout autre. Les Thiessois commencent à se rendre compte qu’il y a des maires qui sont là et qui sont en train d’améliorer leurs conditions de vie. Ce qui peut être d’un avantage certain pour notre formation politique.
L’Apr promet d’envoyer votre leader à la retraite lors de la prochaine Présidentielle. Qu’en dites-vous ?
C’est normal, nous sommes en politique. Mais je crois que ce pour quoi ils ont été élus, ce n’est pas d’envoyer Idrissa Seck à la retraite mais de trouver des solutions aux problèmes des Sénégalais. Et envoyer Idrissa Seck à la retraite, si c’est fait dans une coalition aussi forte et aussi désorganisée que la mouvance présidentielle, je dis tant mieux. Mais l’Apr, seule, ne peut pas le faire. Je crois que si Macky Sall s’aventure à aller seul à la Présidentielle, on ne parlera pas de la retraite politique de Idrissa Seck mais plutôt de ce que l’histoire retiendra de toute la vie politique du Sénégal : Il n’atteindra même pas un taux 10% sur tout le territoire national. Macky Sall a intérêt à s’agripper à cette mouvance présidentielle. C’est pourquoi il fait tout pour éviter le départ du Parti socialiste. Quel que soit ce que les gens disent, Idrissa Seck, est un leader politique incontesté.
Pouvez-vous encore compter sur la coalition And défar Thiès pour la prochaine Présidentielle ?
Oui. La coalition est en train de s’agrandir et ses jeunes sont en train de se battre pour tendre vers une coalition émanant des ambitions de la base. Nous voulons inciter nos leaders à aller ensemble à la Présidentielle. Nous y travaillons au niveau de la commune Ouest et des réunions sont organisées régulièrement entre Rewmi, le Pds, le Fsd/Bj, entre autres partis alliés.
Récemment, des populations de Grand Standing se sont opposées à l’installation d’une station d’essence et des riverains du quartier Mbour 4 Extension contre la construction d’un marché au poisson. Que pouvez-vous nous en dire de plus ?
Pour les populations de Grand Standing, je crois qu’il y a une incompréhension. C’est l’Etat du Sénégal qui a autorisé l’érection de la station d’essence parce que le quartier est un titre foncier de l’Etat. Nous en avons discuté entre nous et maintenant c’est très clair. Certainement des gens ont dû alimenter des citoyens avec de fausses idées. Mais vu la responsabilité que je porte, je n’étais pas obligé d’instaurer un bras de fer avec ma propre population. Et je crois qu’on devrait ne pas refuser une installation pareille à Thiès, sur une bande qui était inoccupée et qui va offrir de l’emploi à une trentaine de jeunes sans compter les impôts et les taxes qui vont renflouer les caisses. Et c’est un Sénégalais bon teint qui va investir (Ndlr : Entreprise Demba Kâ «Edk oil»). Le collectif de Grand Standing continue de mener son combat et de notre côté, nous accompagnons le promoteur à bien s’installer à Thiès.
Et pour Mbour 4 Extension ?
Pour Mbour 4 Extension, quand vous interrogez le décret 2009 répartissant Thiès en communes d’arrondissements, Mbour 4 est un des quartiers de la commune de Thiès Ouest. Les gens y ont acheté des terrains de manière fictive. Et pis encore, il n’y a pas sur le papier de l’acte de vente une mention indiquant que les propriétaires de maison où de terrain ont acheté leurs biens sur une forêt classée. Ils ont mis Mbour 4. Tous les actes de vente sont là. On ne peut pas comprendre que des populations se mettent à vendre des terrains de manière illégale. Mais, aujourd’hui, nous sommes en train de trouver un début de solution. Par rapport à ceux qui ont déjà construit des maisons, même de manière illégale, nous avons fait des correspondances adressées à l’Etat du Sénégal pour une dé classification de cette forêt classée qui se trouve après Mbour 4, parce que les populations de Thiès-Ouest n’ont plus de terrains où habiter. Et une fois déclassée, on pourrait avoir la possibilité d’aller jusqu’à 1000 parcelles et donner à ces jeunes qui veulent avoir un terrain, dans la légalité, de pouvoir bénéficier de cela. Nous y sommes en collaboration avec l’université de Thiès. Nous avons recruté un géomètre qui a fait les relevés typographiques et nous avons écrit à l’Etat du Sénégal, avec un dossier très solide, pour demander au Chef de l’Etat de déclassifier la forêt, étant donné qu’une partie a été allouée à Bara Tall. Ce qui nous a fait très mal parce qu’une zone aussi stratégique, on ne peut pas l’octroyer à un thiessois. Et ça aussi, nous avons fait des correspondances pour demander à l’Etat du Sénégal de changer l’endroit attribué à Bara Tall. Nous sommes en train d’y travailler parce qu’aujourd’hui, on ne peut pas se permettre d’octroyer plus de 10 hectares à un seul Sénégalais, à quelques mètres de l’aéroport. C’est l’enrichir définitivement au détriment des thiessois. Nous sommes en train de nous préparer, en collaboration avec tous les mouvements qui s’activent pour la défense des intérêts des thiessois. Nous allons les inviter sur le site pour demander à l’Etat du Sénégal de rectifier cela dans l’intérêt des populations de Thiès-Ouest et de Thiès, en général.