Avec l'injonction de démantèlement de ses installations faite aux ICS (Industries chimiques du Sénégal), la direction du port est entrain d'achever une entreprise mise à genou depuis l'affaire Jérôme Godard. Mais cela ne sera pas aussi simple que le veulent les autorités du port, car les responsables des Ics ont décidé de mener la bataille avec des arguments juridiques et des concessions en bonne et due forme signée par le port.
En prenant la décision de faire partir les Ics du mole 8 du port autonome de Dakar, la direction commerciale du port ne signe t-elle pas l’arrêt de mort d’une grande entreprise installée sur le site depuis 1959 ? On peut le croire car au-delà des 56 travailleurs des ICS affectés sur le mole 8 du port qui seront victimes de cette décision, c’est plutôt la fermeture de l’entreprise et la perte plus de 2500 emplois permanents qui vont en découler, sans parler des 10.000 emplois temporaires avec les 380 PME/PMI, compte non tenu des avantages sociaux offerts aux populations de Mboro en termes de gratuité de l’eau et de l’électricité et de prise en charge des enseignants au niveau du lycée de la communauté.
Une perspective que les travailleurs et la direction de la boîte n’entendent pas laisser passer, à en croire Mansour Ndiaye, responsable syndical qui souligne que « la lutte sera âpre mais elle sera menée jusqu’au bout » et rappelle que les Ics détiennent un agrément en manutention, en transit et en consignation qui l’autorise à travailler sur le port. Cependant cette convention est destinée à l’usage exclusif de l’entreprise qui ne peut louer ou offrir ses services à un tiers.
En effet depuis 1959, le port est lié aux ICS par une convention signée par la commission permanente du Grand conseil de l’AOF. Après la fusion avec les Phosphates de Taïba, la concession fut transférée aux ICS en 1996. En 2001, la convention fut reconduite par un avenant renouvelable tous les 09 ans. En 2010, les deux parties ont renouvelé cet accord, ce qui veut dire que jusqu’en 2019, les ICS ont le droit d’exercer légalement et légitimement sur le port autonome de Dakar, précisément sur le terminal du mole 8. Une autre concession, signée en 1982, lie les deux entités et autorisant les ICS à faire des installations pour ses opérations de réception de matières premières et d’exportation de produits finis.
Autant d’arguments juridiques que les ICS ont brandi pour dénoncer l’illégalité de la mesure d’exclusion qui les frappe et la lettre de mise en demeure que la direction du port leur a adressée.
Cette secousse tellurique vient s’ajouter à un autre grand coup dur dont la société à encore du mal à se relever. Il s’agit de l’affaire Jérôme Godart, cet homme affaire qui avait bénéficié d’un contrat d’exclusivité pour l’achat des produits des Ics. Une grande nébuleuse qui avait défrayé la chronique sous l’ancien régime d’Abdoulaye Wade et qui avait fait perdre à la société plus de 250 milliards de FCfa.
Depuis lors, la société est à la recherche d’un second souffle, la recapitalisation tant attendue avec le groupe IFFCO tarde à se matérialiser d’où un retard dans la relance des activités de l’entreprise.
Cette mesure d’exclusion au mole 8 risque d’être le coup fatal et ainsi, Karim aura mis l’entreprise à genou et kanté l’aura achevée.
Pour l’heure l’espoir est entretenu par la promesse de l’Etat qui, par la voie d’Aly Ngouille Ndiaye, le ministre des mines avait déclaré que « l’Etat ne lâchera pas les ICS », quoique, le cours actuel des choses semble indiquer le contraire.