Dakar désertée, Dakar libre, mais Dakar sous un tas de saletés. Comme à chaque lendemain de tabaski, la capitale encore dans la torpeur de l’après-fête bataille avec ses vieux démons que sont les déchets. Malgré les efforts des structures en charge de la propreté pour y remédier, les tas d’immondices sont toujours visibles. Aux HLM, la situation a même failli dégénérer entre l’équipe municipale et certains marchands déjà de retour.
Même les 215 rotations pour ramasser les poubelles effectuées le jour de la Tabaski n’y ont rien fait. Dakar présente sa face hideuse comme une maladie congénitale après la fête du sacrifice. Les efforts de Moussa Tine, Dg de l’Entente Cadak-Car, pour éviter à la capitale cette image peu reluisante sont louables, mais n’ont pu empêcher que cette situation n’engendre des moments de conflits. Au marché HLM par exemple, le congé de la plupart des marchands faisait ressortir cet aspect commun à beaucoup de localités de la capitale après la fête : la saleté.
Des débris d’ordures ménagères amoncelées se sont mêlés aux résidus textiles des couturiers et aux eaux stagnantes des dernières pluies. Résultat : les trottoirs des ruelles du marché étaient pratiquement invisibles. A l’intérieur du marché, dans un dédale d’étals vides, un mince filet de chaussée résistait à l’avancée de la saleté qui rognait ce qui avait été naguère une ruelle goudronnée. Ce qui a motivé la mairie à entreprendre une fermeture pour une opération de nettoiement. Prétextant de la fête pour relooker le marché, la mise en œuvre tardive a révolté les marchands. Ainsi, le lendemain de fête y a été tumultueuse. Après les présentations des vœux, ce sont des explications à bras raccourcis qui ont ponctué l’après-midi d’hier.
Le maire de cette commune, Pape Seck, a donné le ton en s’en prenant physiquement à une vendeuse d’eau, avant que l’un de ses employés ne se défoule sur un vendeur nommé ‘‘Imam’’, devant les récriminations d’un public en émoi. Malmené sur la chaussée par d’autres hommes en compagnie du maire, le vendeur a accusé ces derniers de lui avoir piqué une somme de 300 mille F CFA, devant le directeur général de l’entente Cadak-Car, Moussa Tine, venu jouer les bons offices. Ses marchandises, constituées de tissus, étaient arrachées de sa table par des hommes et mises dans la petite benne d’une voiture de la mairie entourée de l’équipe de déménagement.
‘‘Si tous les marchands étaient présents, nous ne nous serions pas laissés faire aussi facilement’’, lance un des marchands en direction du maire et son équipe. Ces derniers, dont certains étaient armés de pieds de biche, étaient occupés à confisquer le téléphone d’un jeune homme qui filmait la scène. L’altercation, qui a été très violente par moments, s’est terminée devant les locaux du poste de police de la localité qui a dépêché un gendarme venu interpeller le maire, quelques membres de son équipe, ainsi que le vendeur ‘‘Imam’’. Moussa Tine qui a minimisé l’évènement, a expliqué les actions d’après-fête entreprises pour faire reluire la capitale. ‘‘La situation d’après Tabaski est diverse. Nous avons un rôle d’appui pour les mairies d’arrondissement. Mais les marchés qui posent le plus de problèmes sont Petersen, Cinéma Unité 3, et HLM. Il faut savoir que ce sont les régies internes qui s’occupent des marchés et non l’Entente Cadak-Car qui s’occupe d’ordures ménagères.
Il y a les ordures ménagères qui ont été enlevées en partie car il y a une diminution du parc automobile due au non-paiement de certains concessionnaires. Il y a également le temps de séjour très long à Mbeubeuss, à cause de la pluie’’, s’est-il justifié, ajoutant que la gestion de la propreté des marchés échoit aux régies internes. Selon Kéba qui s’en occupe pour les HLM, ce sont les tasseuses de Cadak Car qui font défaut car bloquées à Mbeubeuss. Ceci étant dit, ‘‘51 tonnes ont été enlevées de ce marché depuis samedi’’, fait-il savoir. Pour ensuite demander aux marchands d’attendre jusqu’à demain, mercredi (à 18h) pour la réouverture du marché. Dans ce problème, transparaissent les mesures inachevées de l’Acte III de la décentralisation. ‘‘L’Etat doit doter les collectivités locales des moyens de pouvoir mener à bien leurs politiques’’, continue-t-il.
‘’Des ordures à la place des marchands ambulants’’
Les communes avaient pourtant tout mis en œuvre pour éviter cette situation, assure Moussa Tine. Ainsi, au rond-point liberté 5, du sable de dune a été utilisé et des bancs publics installés pour éviter l’installation des vendeurs. ‘‘Seulement, l’autorité supérieure en a fait un foirail pour la vente de moutons’’, s’est-il désolé. La majeure partie des rues, les avenues et les marchés sont envahis par des ordures ménagères. Pareille situation était constatée à la Rue 18 de la Médina. D’habitude très animée, l’ambiance est plutôt calme en cette après-midi du lundi 28 septembre. A la place des nombreux marchands ambulants qui occupaient les deux voies, les ordures étaient visibles de partout : tas de pneus entassés, monticule de foins, rebords de trottoirs remplis d’eaux usées..., constituaient l’essentiel du décor.
En face du super marché Sahm, tout près du terminus de la ligne 39 des minibus Tata, se trouve un dépôt d’ordures qui constitue un véritable supplice pour les yeux. A quelques dizaines de mètres, une odeur nauséabonde se dégage. Pour ne pas arranger les choses, une fine pluie s’abat sur le terre-plein central ressemblant à un grand dépotoir assailli par tous les types d’insectes. Entre les ordures ménagères et celles laissées sur place par les vendeurs de moutons qui avaient transformé les lieux en foirail, l’air est irrespirable.
Malgré ce décor peu attirant, les habitants continuent de vaquer le plus normalement à leurs occupations. Les enfants pataugent dans les flaques d’eau, s’acharnant sur un ballon de football dans les dédales étroits alors que les gérants d’une boutique d’alimentation générale se trouvant à moins de 5 mètres du dépôt semblent être immunisés contre la senteur désagréable. ‘‘Je ne sais pas depuis quand le camion-poubelle n’est pas passé’’, indique un jeune homme qui déchargeait des sachets d’eau devant la boutique. Le Dg de l’entente Cadak Car estime que les nettoyages domestiques d’avant-fête y sont aussi pour quelque chose, car les dépôts d’ordure des populations participent à salir leur cadre de vie.
Une synergie d’actions entre les collectivités locales et l’administration publique est requise pour mettre fin à cette situation répétitive.