Du fait d’une intervention à l’usine de Keur Momar Sarr qui alimente en eau la capitale, la Sénégalaise des eaux (Sde) avait indiqué qu’une partie de la région en serait privée.
L’intervention réalisée, le flux a été rétabli dans la journée d’hier. Mais de par la distance à parcourir (300 kilomètres), de la pression augmentant graduellement et le fait que les populations sevrées se servent allègrement au long du parcours effectué par l’eau, le retour dans certains quartiers de Dakar est progressif. D’après Ndiaya Diop de la Sde, les usagers qui peuplent les hauteurs sont les plus impactés par cette latence : «Pour ceux qui habitent sur des points en hauteur comme à Ouakam ou au Plateau vers l’avenue Jean Jaurès ou la rue Thiong, le retour à la normale sera plus long en raison du déficit de pression.»
Sde, société «d’eau-rreur» !
Le Sénégal est un pays de paradoxes. On rêve d’émergence alors qu’on ne peut pas alimenter correctement la capitale en eau. Depuis deux ans, la rupture de la distribution du liquide précieux est devenue une règle imposée par la Sde, filiale du groupe français Bouygues. Comme si de rien n’était. Dakar est assoiffée depuis trois jours à cause des travaux à l’usine de Keur Momar Sarr qui l’alimente en eau. Les communiqués publiés à l’avance et les camions citernes sont une grosse farce comparée aux épreuves imposées aux consommateurs.
Trimballant leurs bouteilles dans les différentes artères de la ville, les populations supportent stoïquement cette souffrance. Ce n’est pas l’image d’Epinal d’un pays qui aspire à connaître l’émergence. C’est une représentation grotesque d’un pays qui peine à satisfaire correctement un besoin primaire.
Evidemment, la Sde bénéficie d’une facture d’impunité. Elle est multirécidiviste. En 2013, Dakar a connu une semaine de souffrance. Des engagements ont été pris. Des sanctions annoncées. Les autorités avaient même émis l’idée de réviser le contrat d’affermage. Quelques mois après, il a été renouvelé. Jusqu’ici, les rapports promis par les autorités n’ont jamais été publiés pour situer les responsabilités. Après le quart d’heure de compassion, on a rangé tout aux oubliettes. Ce pays fonctionne toujours de la même manière. Après l’émotion, on retombe dans nos travers. Ainsi se propagent le laxisme et l’impunité.
La Sde ne nous respecte pas. Allez demander à Bouygues si elle ose assoiffer Paris pendant 72h ? Jamais ! Face au silence coupable des autorités, les populations continueront à encore supporter cette souffrance volontaire imposée par la Sde. C’est un échec.
Pourtant, l’Etat définit la politique sectorielle, gère les ressources en eau, élabore le cadre législatif et réglementaire et approuve la politique tarifaire. En 1995, une réforme institutionnelle, qui a été mise en œuvre par l’ex-Société nationale d’exploitation des eaux du Sénégal (Sones), a été éclatée en trois entités en vue de rechercher des solutions au déficit en eau de la région de Dakar et au manque d’équilibre du secteur de l’hydraulique urbaine et de l’assainissement. La Sones est chargée de la gestion du patrimoine de l’hydraulique urbaine, du contrôle de la qualité de l’exploitation et de la sensibilisation du public. La Sde est chargée de l’exploitation des installations, de l’entretien de l’infrastructure et du matériel d’exploitation, du renouvellement du matériel d’exploitation ainsi que d’une partie du réseau de distribution d’eau potable. Elle dispose aussi d’un contrat pour assoiffer les Sénégalais.