C’est un Seydi Ababacar Ndiaye en toute liberté. Le rastaman secrétaire général du Saes ne mâche pas ces mots. Pour l’une des rares fois, le Saes est d’accord avec l’autorité et félicite même le président de la République Macky Sall. Ce n’est pas pour autant qu’il lui donne carte blanche. A propos des jets de pierres sur le cortège du Président vendredi dernier, le physico-chimiste met tout sur le dos du directeur du Coud, Cheikh Omar Hanne, qu’il accuse d’avoir politisé la visite du Président.
Comment interprétez-vous la visite du président à l’Université Cheikh Anta Diop ?
Après les évènements qui ont abouti à la mort de Bassirou Faye, le président nous avait demandé de l’aider à apaiser la tension dans les universités, à l’Ucad particulièrement. Je lui ai dit que nous étions de tout temps dans cette dynamique-là. Et que par la suite, nous l’inviterions à venir visiter l’université. Personnellement, je prends ça comme une réponse à l’invitation. Ça peut être tout de même interprété différemment. Ensuite, j’ai interprété cela positivement car le Président a quand même un certain nombre de renseignements à partir de canaux multiples. Mais il a tenu lui-même à venir et à toucher du doigt les problèmes. Je crois qu’il faut le féliciter, très sincèrement, sans démagogie aucune.
Est-ce que le Président a répondu à vos attentes ?
Je crois qu’il ne pouvait pas venir et donner des réponses comme ça. En tout cas nous, en tant qu’organisation syndicale, nous avions déjà suivi notre processus depuis son élection. Depuis le mois de mars, nous avons signé un PV et nous sommes arrivés à trouver des pistes de solutions. Nous ne l’attendions pas pour une séance de questions/réponses. Nous devions le recevoir d’une façon solennelle. Nous avez vu le ton du discours, il a été solennel. Ce n’est pas un discours au ton revendicatif, guerrier. Mais nous en avons profité pour lui parler sur une question qui nous tient véritablement à cœur. C’est la question de la retraite. Là, nous avons vraiment insisté sur ça. Qu’il est inadmissible que des enseignants du supérieur qui sont quand même au-dessus de l’échelle des fonctionnaires, les seuls à être recrutés au doctorat et évalués en dehors de leur pays et qui passent 30 à 40 ans à servir le pays, soient dans certaines conditions à la retraite.
Je regarde toujours le cas de mon professeur et qui est aussi mon maître, le Pr Libasse Diop. Celui-là va à la retraite et se retrouve avec 300 000 F. imaginez le nombre de professeurs qui ont été encadrés par le Pr Libasse. Et ceux qui ont été encadrés par ceux qu’il a encadrés. Sur le plan scientifique, il est un arrière grand-père. Et voilà qu’il est obligé de revenir à l’université, non pas par amour du métier, mais parce que la situation est difficile. Ce n’est quand même pas normal. Au Niger, les enseignants partent avec leur dernier salaire. Ici au Sénégal, les généraux de l’armée partent avec leur dernier salaire. Pourquoi les enseignants du supérieur ne pourraient pas partir avec leur dernier salaire, étant donné qu’ils sont au-dessus de la hiérarchie. C’est pourquoi nous avons insisté longuement et lourdement sur cette question. Nous avions proposé une cotisation sur la base d’une de nos indemnités qui est l’indemnité spéciale de recherche formation. Cela veut dire qu’on accepte d’éroder notre pouvoir d’achat. Est-ce que vous connaissez un travailleur qui fait ça. Il n’y a que le Saes qui puisse faire ce genre de proposition patriotique et positive. C’était pour que nos pères fondateurs qui sont déjà à la retraite puissent avoir une meilleure retraite, mais pour nous aussi, quand on les rejoindra. Mais le gouvernement nous a dit qu’il fallait attendre l’étude sur le Fonds national de retraite (FNR) qui est déficitaire et qui a commencé à être déficitaire depuis 1996.
L’autre point sur lequel nous avons insisté, c’est la question du budget. Les universités étouffent aujourd’hui. Chaque année, quand on arrive au mois de septembre octobre, les difficultés commencent. Il y a des moments où on reste jusqu’au 15 du mois sans être payés. Quand on a un budget qui ne peut même pas couvrir les charges salariales, comment peut-on faire des investissements. Dans nos écoles, si ça fonctionne encore, c’est grâce à la fonction de service.
Avez-vous évalué le déficit des universités ?
L’évaluation a été faite depuis 3 ans. Le déficit cumulé est estimé à 14 milliards de Francs Cfa. La banque mondiale elle-même avait dit qu’elle allait faire l’audit pour vérifier la véracité de cela et elle l’a fait. Mais quand on a discuté avec le ministère de tutelle, on nous a dit qu’il n’était pas possible d’éponger tout cela en une année. Ce qu’ils nous ont proposé, c’est que les universités fonctionnent comme si elles n’avaient pas de dette et que le gouvernement endosse cette dette-là. Nous avons aussi insisté sur le taux d’encadrement. Imaginez que dans toutes les universités du Sénégal confondues, nous faisons à peine 1 900 enseignants chercheurs permanents. Alors qu’aujourd’hui, le nombre d’étudiants tourne autour de 100 000. A Dakar, on ne maîtrise même pas les chiffres, on donne toutes sortes de chiffres. Quand on fait la moyenne (nationale), ça va relativement. Mais quand on regarde la situation à Dakar, on a 1 400 enseignants pour au moins 85 000 étudiants. Et vous descendez pour regarder à la faculté des Lettres, au département d’anglais par exemple, les taux d’encadrement n’ont même pas de sens. Nous avons dit au Président que nous mesurons l’effort qui a été fait pour recruter 200 enseignants chercheurs plus 10 pour l’école polytechnique de Thiès.
Mais que cet effort doit être soutenu, d’autant plus que ces 200 postes ont été décidés depuis le 29 novembre 2013. Ça fait bientôt 2 ans. Entre-temps, 50 collègues sont allés à la retraite, d’autres sont malheureusement décédés, par la surcharge de travail. Il n’y a pas de prise en charge médicale encore moins de suivi, alors qu’on devait avoir un suivi médical continu. Rien de tout cela. Pour vous dire que ces 200-là risquent d’être absorbés avant d’être définitifs. C’est pourquoi le Saes soutient le plan Marshall qui consiste à recruter 500 enseignants pendant 5 ans. Ça ferait 2 500. Et même ça, si vous fêtes le calcul, parce que nous, nous nous basons toujours sur les chiffres… Ils ont dit que quand les universités de Diamniadio et du Sine Saloum auront atteint leur vitesse de croisière, elles feront 30 000 étudiants chacune. 30 000 fois 2 c’est 60 000. Si vous appliquez le taux de 1/25, (1 enseignant pour 25 étudiants), ça fait 400 enseignants dont on a besoin déjà.
Est-ce que les négociations se passent bien avec le ministère de tutelle ?
La loi-cadre par exemple a été adoptée en conseil des ministres dernièrement et attend d’être votée par les députés, quoi que nous devions avoir un séminaire avec les députés qui s’étaient portés garants lors des négociations. Il y a aussi la réforme des titres qui va être adoptée à la rentrée prochaine du Conseil des ministres, puisque nous avons déjà reçu la mouture modifiée pour qu’elle soit intégrée dans la loi 81/59 qui nous régit. Il est vrai aussi que nous avons reçu les 140 logements, mais le Président lui-même nous a dit spontanément pendant qu’on visitait les appartements qu’il faudrait qu’on puisse appuyer les enseignants pour qu’ils aient des logements privés. L’Etat ne peut pas continuer à construire des logements de fonction. De toute façon, ce n’est même pas son option. Dans l’entre deux tours, on a discuté ; il m’a parlé de son option. On l’a vu avec les autres fonctionnaires qui sont sortis.
Le président fait des investissements. Il a pris l’option de mettre 300 milliards. C’est quand même énorme. Quelqu’un qui ne croit pas à cela ne mettra pas autant d’argent. Mais ça, c’est le côté pédagogique. C’est très bien. Mais si ceux qui sont chargés de dérouler tout cela, c’est-à-dire les acteurs que nous sommes ne sont pas dans les conditions qui les délaissent un peu des contraintes matériels, il est difficile qu’ils soient performants. Le Président a dit quelque chose de fort et pratiquement, il nous met au défi, un défi positif qui est de faire en sorte que l’université sénégalaise soit dans le top 100 des universités du monde à l’horizon 2020/2025. Cela demande une confiance aux enseignants et de les mettre dans les conditions qui leur permettent de relever le défi. On est capable de le faire.
Le Président vous a lancé un appel pour une pause des grèves. Etes-vous prêts à répondre favorablement ?
C’est la même réponse que j’ai toujours donnée au Président et à tous les autres : la paix sociale, ce n’est pas un slogan, c’est un processus. Je suis un physico-chimiste, l’exemple que je donne tout le temps, c’est une réaction d’équilibre chimique. Quand les produits sont à part, il n’y a pas de réaction. Mais lorsque vous mettez ensemble les différents réactifs, il y a une interaction jusqu’à ce qu’on trouve un équilibre. Et là, plus rien ne bouge. Si vous rapportez cette métaphore à la recherche de la paix, cela veut dire que c’est le gouvernement qui définit la politique et qui détient les moyens. Et il y a de l’autre côté les acteurs que nous sommes, enseignants, étudiants, PATS. Si le gouvernement met les moyens, nous allons nous en approprier pour faire notre travail, les étudiants seront dans de bonnes conditions. Donc les batailles qui ont lieu actuellement sont les réactions chimiques avant qu’on ne trouve l’équilibre. L’équilibre pour nous, c’est la paix. Et avant qu’on n’y arrive, c’est le fait que les moyens ne soient pas suffisants. Quand les moyens seront suffisants, ce sera l’équilibre.
Parlons d’autre chose. Comment avez-vous apprécié l’attitude de certains étudiants qui ont jeté des pierres sur le cortège du Président ?
Il est inadmissible que quiconque, encore moins un étudiant, dans le temple du savoir de Cheikh Anta Diop, jette des pierres en direction des autorités, surtout du président de la République. Je ne suis pas persuadé qu’un étudiant puisse jeter de façon intentionnelle une pierre en direction du président de la République. Je n’y crois pas. Si vous voulez mon avis, franchement, je pense que la faute revient au responsable du Centre des œuvres universitaires de Dakar (COUD). C’est eux qui ont politisé. Le président de la République a pausé une première pierre dans le campus social. Il y avait des étudiants. J’ai même vu un étudiant qui fait partie des groupes d’étudiants de master 1 qui barraient la route quelques jours avant. Il était là, il était venu me saluer, il était avec le Président, tranquillement. Je peux même donner son nom. Vous n’avez pas entendu de problème.
Ensuite, il est parti à la faculté de Sciences, vous n’avez pas entendu de problèmes. Pourquoi il s’est passé cela au portail séparant le campus dit social à celui pédagogique. Parce que ça été politisé pour dire la vérité. Il faut dire les choses telles qu’elles, j’assume mes responsabilités. J’étais avec Cheikhou Sylla (SG de la section supérieure du Sudes) qui peut témoigner. Quand le Président nous a quittés, on est rentré. Au camp Jérémy-là, on a trouvé des femmes qui parlaient pulaar. Je les ai entendus, ce sont des gens qui ont été ramenés de Ndioum. Mon ami Cheikh Omar ne sera pas content, mais ce n’est pas mon problème. Ils ont rendu un mauvais service au Président.
Le chef de l’Etat savait qu’il n’était pas en terrain conquis. C’est évident. Il était aussi accompagné du ministre de tutelle qui n’est pas non plus un ami des étudiants. Donc, le Président savait très bien où il venait. Donc pourquoi vouloir lui cacher des choses qu’il n’ignore pas. C’est absurde et ridicule. De la même façon qu’on a laissé des étudiants porter des t-shirts à l’effigie du Président, de la même manière, on devait laisser les autres qui avaient dit qu’ils mettraient des brassards rouges. Si c’était le cas, vous croyez qu’un étudiant oserait, après qu’on a tout mis en place, se lever et jeter une pierre sur le Président. Non ! Parce qu’il sait très bien qu’il aurait commis un attentat contre le Président.
Autre chose, la police a un contentieux avec les étudiants. Elle a été stationnée dans le campus du 21 novembre 2013 jusqu’au 14 août 2014, date de la mort par balle de l’étudiant Bassirou Faye. C’est presque un an, malgré tout ce que le Saes a fait pour les faire partir. Ils étaient là, à se trimbaler, à provoquer les étudiants. Entre-temps, ils ont saccagé deux fois les chambres des étudiants, détruisant leurs cours, leurs matériels et tout ce qui est une violation de domicile. Les photos et les vidéos sont là. Dès le matin du vendredi 31 juillet 2015, les étudiants ont commencé à chanter policiers assassins. Si ces mêmes policiers se permettent de filtrer les étudiants, parce qu’ils ont des brassards rouges, vous voyez ce que cela peut donner. Je pense que les forces de l’ordre n’ont pas rendu service aux étudiants. Je suis tellement triste et peiné pour le Président qui avait commis un acte historique, en venant visiter l’université.
Vous pensez qu’il est possible d’extirper la politique de l’Ucad ?
Non. Non parce que les dirigeants au pouvoir ont toujours manipulé les étudiants. C’est connu. Déjà je trouve ridicule de porter des t-shirts à l’effigie du Président. Macky Sall n’est pas venu ici en tant que chef de parti. C’est le président de la République qui est venu. Si j’étais le directeur du Coud, j’aurais interdit cela, parce que ce n’est pas un meeting politique. Ce n’est pas le chef de l’APR qui est venu visiter les militants de son parti. C’est le président de la République qui vient dans un espace d’un niveau élevé qu’est l’université. De toute façon, le Président a été élu à 65%. Il y a 35% de Sénégalais qui ne l’ont pas élu. Parmi ceux-là, il y a des étudiants. De façon arithmétique, le Président sait très bien qu’il y a au moins 35% des étudiants qui ne sont pas contents qu’il soit président de la République. Il est le Président de tout le monde. Mais il exerce ce pouvoir grâce à la majorité qui lui a donné cela, tout en respectant la minorité. Quand les gens croient que c’est par la politique qu’on obtient des promotions sociales, voilà toujours les résultats.
Faut-il en arriver à la solution proposée par votre collègue Moustapha Sall, c’est-à-dire interdire à l’université toute activité qui n’est pas académique ?
Ce sera difficile (rires). L’université est une partie de la société. On ne peut pas interdire ces manifestations, mais la solution est de réglementer. Ça avait commencé. C’est dommage, l’ancien directeur, Abdoulaye Diouf Sarr, à qui je rends hommage, l’avait commencé, même en touchant aux confréries, à tout ce qui est religion, ce qui était quelque chose de sensible. J’avais appelé pour lui témoigner ma sympathie, pour lui dire qu’on était en phase avec lui et qu’on le soutenait dans ce combat. Le Président lui-même l’a dit aux étudiants : ‘’Concentrez-vous sur vos études.’’
Et c’est la vérité. Maintenant, on n’est pas dans un camp militaire non plus. Ceux qui veulent faire la politique ont le droit de le faire, mais dans un cadre beaucoup plus organisé. Ceux qui veulent vivre leur religion peuvent aussi le faire. Mais, il ne faut pas instituer des choses comme ça et perturber tout le monde. Des ‘’thiant’’ a n’en plus finir. Il y a d’autres qui font les tam-tams et ça ne devrait pas être permis. Ce sera difficile de vouloir interdire ça, mais il faut essayer. Si Abdoulaye Diouf Sarr était encore là, peut-être que les choses auraient changé. Il avait sorti des textes. Il était en train de poser des jalons. Dans un endroit où vivent des milliers et des milliers de personnes, il faut un minimum de réglementation.
Au-delà du Président, il y avait votre ministre de tutelle Mary Teuw Niane. Est-ce qu’il mérite l’accueil qui lui a été réservé ?
C’est-à-dire ?
Les huées !
Ce sont les étudiants qui l’ont hué, ce n’est pas nous. Pourquoi vous voulez que je réponde à cette question ? Non, vous demandez aux étudiants (rires). Nous ne l’avons pas hué. Il faut vraiment le dire aux étudiants.
Vous avez dénoncé le fait que des militaires soient nommés à des postes de responsabilité à l’université. Qu’est-ce qui vous dérange dans ces nominations ?
Cette question, elle commence à durer. Véritablement, ça fait mal parce que nous sommes tous des citoyens sénégalais. Dans ce pays, chacun est régi par des statuts. Nous, en tant qu’enseignants-chercheurs, nous sommes régis par la loi 81-59. Eux, si je ne me trompe, sont régis par un autre décret. Selon leur grade à l’armée, ce sont des associés (à l’université). Ils ont des contrats de deux ans ou trois ans. Quand on est contractuel, à la fin du contrat, on peut être reconduit, comme on peut ne pas être reconduit. Comment on peut vous confier des postes qui dépassent la durée de votre contrat ? C’est une question de logique. Depuis une quinzaine d’années déjà, il y avait des velléités de collègues militaires pour ‘’compétir’’ pour être doyen. Ça n’a même pas de sens.
L’autre chose aussi est qu’il ne faut pas trop insister ou trop tirer sur ce que la nation vous donne. Pourquoi je dis ça ? Ces collègues militaires, ils ont toujours été dans des conditions meilleures que les autres collègues civils. C’est vrai, ils ont fait le concours pour entrer à l’école militaire de santé mais, dès qu’ils sont là, ils ont leur propre campus. Ils n’ont pas de problème de déplacement, de restauration. Ils sont logés, habillés, nourris, blanchis comme on dit. Ils viennent ici avec leur propre bus. Ils ont tout reçu de la nation. Ils sortent, ils sont à l’université. Ils avancent plus vite que leurs autres collègues de l’armée qui ne sont pas à la faculté et, en plus, ils veulent continuer à avoir d’autres privilèges.
Quand ils viennent à l’université, ils mettent leurs toges universitaires alors qu’ils ne sont pas syndiqués parce qu’ils n’ont pas le droit. C’est des collègues, c’est des universitaires comme nous. On les a même laissés ‘’compétir’’ dans les logements universitaires, et on n’aurait pas dû, puisque quelqu’un qui est là pour deux ou trois ans, qui peut ne pas être reconduit, on n’aurait pas dû les laisser faire. Pourtant on l’a fait. Maintenant, quand ils vont pour l’armée, ils enlèvent la toge et mettent les uniformes. Il y a un problème d’équité. Quand ils sont à la retraite à 59 ans dans l’armée, on les recrute ici. Ils deviennent des professeurs civils. Donc, nous avons toujours fait preuve de bonnes intentions et de tolérance avec eux, mais il y a quand même des limites à ne pas dépasser. Maintenant, tous les collègues sont braqués. Ils ne seront plus acceptés. L’Etat peut essayer de dire qu’on va faire une loi pour contourner, on sera là. Il ne faut pas arriver à des histoires comme ça. Je crois qu’il y a un des collègues militaires qui a été directeur d’UFR santé à Thiès et je crois qu’il a entendu mon conseil. J’avais dit, il y a deux ans, que les militaires n’ont qu’à créer une faculté de médecine militaire s’ils veulent, pour s’occuper des questions spécifiques de blessures qu’on peut avoir en temps de guerre. Ou bien s’ils veulent rester avec nous, qu’ils démissionnent. Celui-là a démissionné. Mais eux, ils ne veulent pas démissionner.
Au-delà des cumuls, avez-vous d’autres craintes par rapport aux nominations des militaires ?
Bien sûr. Si ça continue, on peut arriver un jour à avoir un certain président de la République avec certaines idées et qui n’hésiterait pas à nommer à l’Université un recteur militaire. Vous pensez qu’on va accepter ça, même si on est ancien enfant de troupe ? On ne va pas l’accepter. L’universitaire, sa nature, c’est d’être libre. Beaucoup d’entre nous sont venus à l’université non pas pour des questions d’argent, mais parce qu’on a une certaine liberté de ton, de pensée, une autonomie. Ça, on ne peut l’échanger avec rien d’autre. Personnellement, c’est l’une des raisons principales pour lesquelles je suis à l’université. Je pense que la plupart des collègues sont dans mon cas.