Bien qu’elle soit membre de l’Union économique monétaire des Etats d’Afrique de l’Ouest africain (UEMOA), le Sénégal rechigne toujours à autoriser les avocats à assister leurs clients, dès les premières heures de leur arrestation. Ce n’est qu’à la fin de la garde-à-vue que le conseil a un contact avec son client. C’est pourquoi les organisations de défense des droits de l’Homme sont montées au créneau, à travers un communiqué conjoint, pour exiger ‘’l’application sans délai du règlement relatif à l’harmonisation des règles régissant la profession d’avocat dans l’espace’’.
Selon la Ligue sénégalaise des droits humains (LSDH), la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’Homme (RADDHO), Article 19 Afrique de l’Ouest et Amnesty international Sénégal, signataires du communiqué, le règlement visé a été adopté par le Conseil des ministres de l’UEMOA à Lomé, au Togo le 25 septembre 2014 et entré en vigueur le 1er janvier 2015. Il contient, d’après les organisations de défense des droits de l’Homme, ‘’plusieurs dispositions visant à renforcer l’indépendance de la justice, les droits de la défense et la protection des personnes contre la torture, les mauvais traitements et d’autres types d’atteintes aux droits et à la dignité humaine observés pendant les interpellations et la période de garde-à-vue’’.
C’est la raison pour laquelle, l’article 5 stipule que ‘’les avocats assistent leurs clients, dès leur interpellation, durant l’enquête préliminaire, dans les locaux de la police, de la gendarmerie et devant le parquet sans même qu’ils n’aient besoin de produire une lettre de constitution’’. Le même article dispose également que ‘’les avocats assistent et défendent leurs clients, dès la première comparution devant le juge d’instruction’’. Mais la situation est tout autre, puisque le règlement n’est pas en vigueur. Or, soulignent les défenseurs de la liberté, ‘’en tant que règlement, il s’impose, dès son entrée en vigueur, au Sénégal et à tous les Etats membres de l’UEMOA sans qu’ils ne puissent invoquer le besoin d’apporter des changements à leur législation interne’’. Face à cette situation, les organisations invitent l’Etat du Sénégal ‘’à se conformer à ses obligations communautaires. Mais aussi, elles l’invitent ‘’à respecter son engagement maintes fois réitéré de tout mettre en œuvre pour protéger les personnes sous sa juridiction contre la torture, les mauvais traitements et toutes les formes d’atteinte aux droits et à la dignité humaine’’.
Si l’UEMOA a instauré ce règlement, c’est que d’aucuns ont considéré que la plupart des abus sont commis pendant la garde-à-vue. D’après plusieurs avocats c’est à ce moment-là que les procès-verbaux sont chargés avec souvent des aveux extorqués à des mises en cause qui peuvent faire l’objet de tortures. Ainsi du côté des avocats, après avoir longtemps plaidé pour leur présence, dès les premières heures de la garde-à-vue, l’on s’impatiente de voir l’application du règlement. Du côté de l’administration, c’est toujours la réserve. Une réserve justifiée par la crainte de voir les avocats biaiser l’enquête par l’élaboration d’un système de défense basé sur la dénégation.