Des Sénégalais ont estimé que seules des instances de contrôle autonomes et une justice indépendante peuvent garantir une bonne gestion des deniers publics.
Ce point de vue a été exprimé suite à la publication récente du rapport de l'Inspection général d'Etat (IGE, organisme de contrôle) qui a mis en cause la gouvernance administrative et la gouvernance économique et financière dans des sociétés et agences nationales.
Le rapport, qui couvre le second semestre de 2014 et le premier trimestre de 2015, a épinglé plusieurs structures nationales pour mauvaise gestion des deniers publics. Une mal gouvernance qui a fait réagir plusieurs citoyens sénégalais dans les médias.
Selon le journaliste sénégalais Dame Babou, "ce sont des problèmes de gestion qui reviennent depuis des années dans tous les rapports de l'IGE, mais on peine à y remédier parce que les fautifs ont souvent la couverture de leurs marabouts (guides religieux musulmans, leurs supérieurs, etc".
"Le décideur public a des contraintes politiques et ne peut décider des suites judiciaires à donner à des manquements de gestion dans les entreprises publiques", a-t-il estimé et de relever qu'"il y a conflit d'intérêts quand celui qui nomme est celui qui sanctionne et qui envoie devant le juge".
"Un procureur qui lit un tel rapport devrait avoir la latitude de s'autosaisir immédiatement et de convoquer les mis en cause", a estimé M. Babou.
"La structure de la loi doit être changée pour que la justice puisse s'autosaisir ou que les organisations de société civile puissent porter plainte quand l'argent du contribuable est dilapidé", a-t-il soutenu.
De son côté, l'avocat Me Mame Adama Gueye, membre de la société civile, a souligné que "les rapports de l'IGE n'ont pas de suite parce que l'inspection est sous l'autorité du président de la République et c'est lui qui décide, seul, du sort à réserver au rapport".
"Il y a un traitement politique du rapport, ce qui est contraire à l'équité, à la bonne gouvernance et à la transparence", a-t-il ajouté.
"Le système de contrôle fonctionne mais il y a un manque de volonté politique réelle de sanctionner les personnes coupables de mauvaise gestion des deniers publics", a-t-il déploré.
"Il faut réformer les textes qui régissent l'IGE en sortant cet organe de contrôle du bureau de président de la République pour lui donner une autonomie totale afin qu'elle puisse décider, elle- même, de la suite à donner au rapport", a-t-il suggéré.
Le secrétaire d'Etat chargé de l'Alphabétisation, Youssou Touré, a pour sa part, fait remarquer que "le Sénégal est un pays économiquement faible, confronté à beaucoup de problèmes dans plusieurs domaines et où sévit encore la pauvreté".
"Le président avait pris l'engagement de faire en sorte que la gestion soit sobre et vertueuse et avait dit qu'il ne protègerait personne", a-t-il rappelé. Il faut donc, a-t-il ajouté, "aller jusqu'au bout de cette logique en poursuivant les auteurs de mauvaise gestion des deniers publics".
"Il ne faudrait pas que l'argent du contribuable soit dilapidé de façon impunie. Les mis en cause doivent comprendre qu'il faut gérer les biens de l'Etat de façon transparente", a-t-il conclu
En recevant le rapport, le président de la République, Macky Sall, avait déploré "les carences dans le contrôle interne de l' administration", assurant que le rapport de l'IGE "fera l'objet d' un examen attentif pour prendre toutes les mesures idoines".
Il avait aussi exhorté "ministres de tutelle et conseils de surveillance à renforcer le contrôle dans leurs entités".