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Suite de l’entretien avec... Cheikh Hamidou Kane, auteur de l’aventure ambiguë: "Macky Sall, Alpha Condé (...) n’ont pas de vrais pouvoirs. C’est des joujoux et des sucettes qu’ils ont"
Publié le vendredi 26 juin 2015  |  Sud Quotidien
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© aDakar.com par MC
Les Sénégalais aux urnes pour élire leurs conseillers municipaux et départementaux
Dakar, le 29 juin2014- Le Sénégal élit les conseillers municipaux et départementaux de ses différentes collectivités. Plusieurs personnalités ont accompli ce matin leur devoir citoyen. Photo: L`écrivain Cheikh Hamidou Kane a accompli son devoir citoyen




Dans la suite de cet entretien, Cheikh Hamidou Kane évoque son départ pour Monrovia, au Liberia. Une mission qui, dans le fond, a surtout servi, comme il dit lui-même, à l’éloigner du pays, et surtout du procès de Mamadou Dia qui sera finalement condamné, en son absence. C’est à cette période qu’il parcourt pratiquement tous les pays au sud du Sahara, et qu’il assiste à «l’un des épisodes les plus tristes » des troubles post-indépendance : la crise du Biafra au Nigéria. Cheikh Hamidou Kane, qui suit toujours de très près l’actualité du Continent, pense que nos chefs d’Etat n’ont qu’un pouvoir illusoire. Le célèbre auteur de « L’Aventure ambiguë » se prononce aussi sur la situation politique au Sénégal, et sur l’affaire Karim Wade. Voilà ce qu’il disait d’ailleurs, quelques jours avantle verdict du procès à l’époque : «Il ne faut pas que le pays tout entier soit suspendu à ça.»

La mission à Monrovia, c’était donc pour vous éloigner ?

Voilà. Il (le président Senghor, Ndlr) ne voulait pas que j’apparaisse au procès comme témoin. Il ne voulait pas que publiquement les gens sachent que je lui étais opposé, parce que tout ce qui s’était passé entre lui et moi, c’était dans son bureau. Il avait beaucoup d’amitié pour moi, mais en même temps je crois qu’il était poussé par ses amis, par son clan, et donc j’ai quitté Dakar le 1er mai, autrement dit seulement quatre jours avant le début du procès de Mamadou Dia. Quand je suis allé à Monrovia et que Mamadou Dia a été condamné, j’ai écrit aux amis que j’avais dans le Gouvernement, dont Daniel Kabou, Christian Valentin, pour leur dire que je ne pensais pas rester à Monrovia et que j’allais rentrer au Sénégal. Effectivement, à la fin du mois de juillet 1963, quand j’ai touché mon salaire, j’ai fait mes bagages, j’ai quitté l’ambassade et je suis rentré au Sénégal.
A ce moment-là, un Français, que j’avais connu à l’Ecole nationale de la France d’Outre-Mer, est venu me voir à Dakar au mois d’août ; lui-même travaillait déjà pour l’Unicef à New York, et c’est lui qui m’a dit que l’Unicef cherchait à recruter des Africains. Je crois maintenant que c’est Senghor, qui avait aussi enseigné à l’école d’Outre-Mer, qui lui a demandé de me faire cette offre. C’est ainsi que j’ai été nommé pour aller travailler au bureau régional de l’Unicef. A l’époque, l’Unicef avait un bureau pour l’Afrique au sud du Sahara, avec pour siège Lagos au Nigéria. Et donc on m’affectait à Lagos comme adjoint au directeur du bureau régional de l’Unicef. Au mois de septembre 1963 je quittais donc Dakar pour Lagos, où je suis resté jusqu’en février 1967. Pendant ces 3 années, j’ai donc vécu dans le pays le plus peuplé d’Afrique. Là-bas j’ai rencontré quelques-uns des artistes et des intellectuels noirs les plus importants : Wole Soyinka, Chinua Achebe, ce peintre qui s’appelait Ben Evonvu etc. J’ai aussi fait la connaissance des hommes politiques du Nigéria de l’époque. J’étais fasciné par ce pays, et j’y étais d’ailleurs au moment du premier coup d’état militaire, jusqu’au début de la guerre du Biafra. J’ai donc assisté à l’un des épisodes les plus tristes des crises post -indépendance. 60 a été l’année des indépendances. Déjà en 62-63, les crises ont commencé. 62 au Sénégal entre Senghor et Mamadou Dia, 66-68 la crise du Biafra au Nigéria.
Je suis resté là, aux premières loges, dans les soubresauts de ce grand pays d’Afrique, et un de mes enfants, une fille, est né à Lagos, et en 1967, j’ai quitté le Nigéria parce que j’avais été affecté par l’Unicef à Abidjan. L’Unicef avait subdivisé son administration africaine en deux bureaux pour l’Afrique au sud du Sahara : un à Lagos, et celui que j’allais ouvrir en Côte d’Ivoire, et qui couvrait une vingtaine de pays. Pendant cette période, j’ai parcouru pratiquement tous les pays d’Afrique au sud du Sahara et j’ai vu se produire principalement tous les coups d’Etat militaires en Afrique de l’ouest et en Afrique centrale. C’est là que j’ai connu le reste de l’Afrique. J’ai donc été témoin des mésaventures de la construction nationale dans chacun des petits pays que nous étions, et donc je crois que c’est quand j’étais à Monrovia, entre le mois de mai et le mois d’août 1963, que j’ai écrit les premières pages des «Gardiens du Temple», j’ai décrit cette crise qui s’est produite ici au Sénégal. En arrière-plan, c’était ça que je décrivais, avec les personnages de Lascol, qui représentait Senghor, et de Dankaro qui représentait Mamadou Dia. Mais vous voyez bien que dans «Les Gardiens du Temple», les militaires n’ont pas pris le pouvoir, ils ont arbitré. Ce n’est pas l’écrivain, c’est le témoin. J’ai été témoin de mon époque. Dans «L’Aventure ambiguë», témoin des dernières années de la colonisation, et dans «Les Gardiens du Temple », témoin des premières années de l’indépendance. Et c’est en ce sens que je dis que je suis plus un témoin qu’un écrivain. C’est quelqu’un qui a une plume, qui a un style, et qui porte témoignage de son époque. C’est cela qui a été mon moteur, ce n’est pas le goût d’écrire, ni l’ambition d’être un écrivain reconnu. Si grâce à Dieu et du fait de la qualité de mon écriture, j’ai pu écrire des livres qui ont retenu l’attention du monde, ce n’était pas cela mon objectif premier.

C’est aussi une façon de vous engager ?

Oui, tout à fait, une autre manière d’être engagé, parce que par ailleurs, aussi bien quand j’étais étudiant que plus tard quand je suis devenu fonctionnaire ou ministre, je menais de front mes activités, toujours avec engagement. Etudiant, j’ai milité dans les organisations syndicales estudiantines, notamment l’association des Elèves africains de Dakar vers les années 50-52, et ensuite comme responsable de la fédération des Etudiants africains de France (Feanf), et ensuite aussi comme militant du Mouvement de libération nationale (Mln), qui est un parti politique qui avait été créé par Joseph Ki-Zerbo. J’ai donc milité politiquement dans les partis et dans les organisations syndicales et politiques, mais j’ai en même temps participé à la construction nationale, aussi bien au Sénégal qu’au plan international. Voilà donc mon engagement.

Ce sont des questions qui vous préoccupent encore ?

Oui, parce que ce sont des questions qui restent encore très présentes. J’ai toujours eu la conviction, comme un certain nombre de penseurs et de militants africains, que la véritable pointure qui convient en politique, c’est une pointure africaine puisque le continent africain, notamment l’Afrique au sud du Sahara, a vécu une histoire commune, qui est une culture traditionnelle orale. Cheikh Anta Diop a bien décrit ce qu’il appelle l’unité culturelle du monde noir. C’est une réalité, qu’on peut encore constater aujourd’hui. Il y a quelques années, quand j’ai lu l’autobiographie de Nelson Mandela intitulée « Un long chemin vers la liberté », quand j’ai lu la description que Mandela faisait de sa société, de son enfance, de son ethnie, les khosa, quand je vois la façon dont il décrit aussi la vie dans la grande maison (Keur gumagg)…Mandela était le neveu du chef coutumier qui était le frère aîné de son père, et Mandela décrit les classes d’âge des garçons avant la circoncision, il décrit l’initiation traditionnelle, un peu comme les « Ndiouli » chez nous, l’éducation par laquelle on façonnait les garçons, l’éducation par laquelle on façonnait les filles etc. Mandela décrit la manière dont le chef traditionnel, le chef de famille ou le chef de canton, résolvait les discussions, les conflits. Tous ceux qui étaient en conflit étaient là, et on discutait pendant les palabres. Et en fin de compte, le chef arbitrait. Quand j’ai vu ces descriptions, j’ai eu le sentiment qu’il décrivait les choses comme je les avais moi-même vécues dans la vallée du Fleuve Sénégal. Ce qui veut donc dire qu’il y a une vérité profonde dans l’analyse faite par Cheikh Anta Diop, d’une certaine unité culturelle. Notre réaction, nous les Noirs, n’est pas toujours tout de suite de nous battre, mais c’est de trouver le consensus, la conciliation etc. Et donc, je suis comme Cheikh Anta, et comme beaucoup de gens de notre génération, convaincu que la pointure naturelle de l’Afrique, ce n’est pas le Sénégal, ce n’est pas l’Afrique du sud, ce n’est pas non plus le Bénin, c’est le Continent. C’est au niveau du continent que l’on doit construire les choses, sinon c’est insignifiant. J’en ai toujours été convaincu, et jusqu’à présent, je considère que les petits pays que nous sommes, le Sénégal, le Mali, la Guinée, la Gambie, le Nigéria, tout cela c’est de petits pays. La preuve, c’est que le Nigéria est mis en échec par des terroristes. Je continue de penser que nous ne ferons rien de sérieux tant que ce qu’on appelle l’Afrique sera constituée par plus d’une cinquantaine d’entités que se dispute une cinquantaine ou une soixantaine d’hommes politiques pour être présidents, que se dispute une cinquantaine de parlements, et aujourd’hui que vont se disputer, dans le cadre du Sénégal, 300 ou 400 communes avec des élus. Ça, en 1955-1960, au moment de la loi-cadre, la question s’était posée de savoir, puisque la libération des colonies était devenue une échéance inéluctable, si les Français allaient donner l’indépendance à l’Afrique occidentale, à l’Afrique équatoriale, ou s’ils allaient casser ces ensembles. Eux-mêmes avaient éprouvé le besoin, ici quand ils avaient colonisé le Sénégal, la Mauritanie, la Guinée etc., de créer une fédération d’Afrique occidentale française (Aof), avec 8 colonies, de la Mauritanie jusqu’en Haute-Volta (Burkina Faso, Ndlr). Ce qui avait nécessité de créer l’Afrique équatoriale française (Aef) avec 5 colonies. Au moment où il a fallu abandonner la colonisation, ils ont cassé tout cela : Senghor a appelé cela la balkanisation. Au moment de la balkanisation, Senghor discutait au Parlement français pour savoir s’il fallait donner l’indépendance à l’Afrique occidentale française et à l’Afrique équatoriale française, ou s’il fallait la donner à l’ensemble des 13 pays qui constituaient ces deux entités. Senghor a dit qu’à la place du pouvoir réel, on nous donnait «des joujoux et des sucettes ». Effectivement, je considère que les pouvoirs des chefs d’Etat actuels…

Ce ne sont pas de vrais pouvoirs ?

Non, ce ne sont pas de vrais pouvoirs, au regard de la perspective historique : Macky Sall, Alpha Condé, Yahya Jammeh etc. Vous croyez qu’ils ont de vrais pouvoirs, qui leur permettent réellement de gérer leurs pays comme il faut ? C’est des joujoux et des sucettes qu’ils ont, par rapport au pouvoir que leur donnerait un gouvernement fédéral. Aujourd’hui, un pays comme le Niger a été obligé de céder son uranium à une multinationale française, à des conditions dictées…Les pays pétroliers d’Afrique ont été obligés de céder leur pétrole à la compagnie Elf en son temps, à des conditions qui n’étaient pas favorables, sinon aux hommes politiques, et pas aux populations, alors que si on avait eu un pouvoir fédéral, celui-ci aurait négocié avec les multinationales et aurait obtenu, pour les peuples d’Afrique, des conditions meilleures. Donc, ma conviction, et le monde entier s’en rend compte aujourd’hui, c’est que le continent africain, ce sont les dernières réserves de l’Humanité, en matière de produits énergétiques, en matière d’environnement, en ressources hydriques, en ressources humaines. Le continent africain, le monde entier le sait maintenant, sera en 2050 le continent le plus peuplé du monde, et d’une population qui sera la plus jeune du monde. Voilà un continent qui garde les richesses les plus importantes matériellement, qui a la ressource humaine la plus nombreuse et la plus jeune. Voilà aussi que tout le monde se rend bien compte que l’Afrique c’est l’avenir, tout le monde sauf l’Afrique elle-même, et sauf les hommes politiques qui dirigent la cinquantaine de pays que nous sommes. C’est pour cela que les jeunes de ces pays doivent se donner la main, pour imposer aux adultes l’entente et l’unité. Si on gère les ressources africaines d’une manière commune, la jeunesse africaine aura du travail, et elle ne sera pas obligée d’émigrer, de prendre des embarcations pour traverser l’Atlantique ou la Méditerranée, au risque de s’y noyer. Elle trouvera la prospérité chez elle, sur le continent.

Vous êtes apparemment un panafricaniste convaincu ? Vous y croyez, vous, à l’unité africaine ? C’est possible selon vous ?

C’est tout à fait possible. Qu’est-ce qui s’oppose à cette unité ? Les petites ambitions des différents pays. Non seulement je pense que c’est possible, mais je l’ai vécu dans une certaine mesure, puisque, comme je vous ai dit, jusqu’à l’âge de 30 ans, en tant que Sénégalais, j’avais comme camarades et amis des Dahoméens, des Voltaïques, des Soudanais, des Mauritaniens, des Guinéens, qui étaient mes frères, avec qui j’ai fréquenté l’école, l’université, je me sentais un citoyen de l’Afrique de l’ouest. Mes ambitions, elles étaient à ce niveau-là. J’avais l’ambition, si je sortais comme instituteur ou comme médecin, d’avoir la possibilité de servir au Soudan, au Dahomey, en Guinée etc.

Et pas seulement au Sénégal ?

Tout à fait. Mais c’est en 1960 qu’on m’a proposé un marché de dupes en balkanisant, en me disant : « Oui, tu deviens indépendant, mais tu ne peux plus servir qu’au Sénégal. » Si on m’avait donné le choix, entre rester instituteur et pouvoir aller servir au Dahomey, et devenir instituteur et ne servir qu’au Sénégal, j’aurais choisi la première option, parce que la seconde est une impasse. Si je ne suis professeur qu’au Sénégal, c’est une impasse.

Si on reste au Sénégal, que vous inspire comme réflexion (s) la situation politique dans notre pays ?

J’ai le sentiment qu’on pourrait faire mieux, et surtout dans d’autres directions. D’une part, dans les relations entre les élites nationales, autrement dit les cadres, les dirigeants, et la base. Aujourd’hui, ces liens sont essentiellement d’ordre partisan, ou d’ordre syndical, ainsi de suite. Mais, j’ai surtout l’impression qu’il n’y a pas une véritable mobilisation, un véritable partage, à la fois de la vision et de l’action. En quelque sorte, je regrette un peu ce que du temps de Senghor et de Mamadou Dia, on avait commencé : organiser les communautés de la base jusqu’au sommet. C’était ce fameux mouvement d’animation qui, à toutes les échelles, depuis le village jusqu’à l’arrondissement, jusqu’à la communauté rurale (c’est nous qui avions créé les communautés rurales à l’époque), jusqu’à la région (c’est encore nous qui avions créé les 7 régions), jusqu’au niveau national, cette espèce de mobilisation de la population, entre les cadres, moniteurs, instituteurs, infirmiers, médecins, les coopératives de production et de commercialisation etc. Cette organisation, depuis la base jusqu’au sommet, on l’a perdue, et il faudrait y retourner. Je crois que c’est cette vision d’ensemble qui nous manque. Mais il y a aussi un autre élargissement qui est nécessaire, qui est celui de l’intégration régionale, le mouvement vers l’unité. Non seulement il faut qu’on se retrouve et se mobilise ici au Sénégal, mais il faudrait aussi que les Sénégalais, qui ont toujours été au premier plan pour revendiquer l’unité, l’indépendance, j’ai le sentiment qu’ils doivent délibérément s’engager dans la lutte pour l’unité, pour l’intégration avec les autres pays. Je trouve qu’on ne se bat pas suffisamment pour cela. Nous sommes trop tournés vers les problèmes, et pas assez tournés vers l’ouverture. Or il me semble que les problèmes du Sénégal, comme les problèmes du continent d’ailleurs, ne peuvent se résoudre que dans le cadre, par exemple, de la CEDEAO (Communauté économique des états d’Afrique de l’ouest), de la CEEAC (Communauté économique des états d’Afrique centrale), des 5 grandes régions que contient le Continent aujourd’hui.

Ça vous inquiète vous aussi la date du 23 mars, le verdict du procès de Karim Wade ?

Je pense que ce sont des querelles subalternes, j’espère qu’on va passer cette étape du 23 mars, et qu’on va retrouver une vie tournée vers des questions plus importantes que cela. S’il y a des gens qui ont mal géré, il faut l’établir, les sanctionner, et continuer le chemin. Il ne faut pas que le pays tout entier soit suspendu à ça. Le 23 mars, le verdict va donc être prononcé, et j’espère que très rapidement, on passera cette période pour nous concentrer sur des choses plus importantes pour l’avenir du pays.

Et si on reparlait littérature ? Pourquoi ne vous êtes-vous arrêté qu’à deux ouvrages ?

Peut-être parce que…J’ai eu effectivement l’ambition de continuer à écrire, mais en me situant à l’échelle africaine, pas à l’échelle du Sénégal avant l’indépendance, ou l’échelle de l’Afrique post –indépendante des années des coups d’Etat militaires etc. C’est dépassé maintenant. Et j’ai eu l’ambition de tirer exemple d’une page importante de notre histoire, qui est celle de la fondation de l’Empire du Mali, qui a vu au début du 13ème siècle, une Afrique de l’ouest divisée, elle aussi en une douzaine de petits royaumes, se battre sous la supervision de Soundiata Keïta qui a permis de passer de tout petits états qu’il y avait à l’époque, à l’empire du Mali, et qui pour ça, a senti la nécessité de créer une armée qui regroupe l’ensemble des petits états, a senti la nécessité de créer une Constitution qui regroupe l’ensemble de ces petits états, a senti la nécessité de créer un espace économique important. Les griots à l’époque, quand l’empire a été créé, ils ont dit : « Il faut créer l’empire de telle sorte que si tu veux du sel, tu dois aller à Niani, si tu veux de l’or, c’est à Niani que tu vas. Si tu veux du bétail, c’est à Niani que tu dois aller, et pas dans la région du Sahel. » Bref, l’empire du Mali avait été un exemple, dont j’aurais bien voulu que le monde contemporain, l’Afrique contemporaine, s’inspire. A l’époque, j’avais commencé, j’avais mobilisé un certain nombre d’écrivains, d’historiens, dont Djibril Tamsir Niane, pour réfléchir à cette histoire de l’empire du Mali, et mobiliser aussi les griots, les artistes, pour créer un spectacle. Ça, ça avait été mon ambition. Malheureusement, je n’ai pas pu aller au-delà. J’ai toujours cette ambition, mais c’est peut-être que des circonstances tenant à ma vie familiale ne m’ont pas permis de le faire, mais c’est à ce niveau-là que se situe mon ambition. C’est là que se réconcilieraient ma vocation de témoin, et ma vocation d’écrivain, en créant ce spectacle. Si vraiment je le pouvais, c’est à cela que je m’attellerais.
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