S’il est révélé que les accidents médicaux tournent autour de 10% dans les pays développés, il est difficile de les chiffrer dans notre pays, en raison d’une absence d’études sur la question.
Pour des techniciens de la santé, un problème de statistiques sanitaires se pose. ‘’Il n’y a pas de statistiques fiables, des données ne sont pas mises à jour. Au niveau des services contentieux, il sera impossible d’avoir des chiffres car les Sénégalais sont très portés sur la fatalité.’’
Mais le professeur Mamadou Lamine Sow, spécialisé en médecine légale médecin, avec une option éthique médicale tient à trancher le débat. Il est l’expert généralement sollicité dans notre pays pour les dossiers d’instruction. Et souligne t-il, ‘’une erreur médicale ne peut être confirmée que par le médecin expert. Le corps médical est astreint au secret médical, car il existe une relation de confiance et de confidence entre le médecin et son patient. Tout ce que le médecin fait est inscrit dans un protocole opératoire, qui sert de document de référence au médecin expert mandaté soit par le juge d’instruction ou le Procureur’’.
Juste, précise t-il, ‘’il existe des comportements qui sont considérés comme fautifs. Les prétendues erreurs médicales résultent d’une incompréhension ou d’une attente non satisfaite. Il ne faut perdre de vue que l’on ne peut pas se lever du jour au lendemain et dire qu’on est victime d’erreur ou de négligence médicale. Il faut le prouver’’
Deux cas mis en relief
Lors d’une audience solennelle des cours et tribunaux de la république du Sénégal, au moins de janvier 2009, le vice-président du tribunal régional hors classe de Dakar, de l’époque, Monsieur Waly Faye, déplorait cet état d’esprit des Sénégalais. Et soulignait-il, ‘’il est inconcevable que les victimes d’accidents acceptent la fatalité de l’aléa thérapeutique’’.
Son discours sert de creuset pour les médecins en ce sens ce qu’il aborde la dimension juridique de la responsabilité médicale.
Il rappelle deux cas considérés comme des négligences médicales qui ont fait l’objet de sanction dans notre pays, il y a quelques années.
‘’Par arrêt du 26 juin 1986, la Cour d’Appel de Dakar a déploré un chirurgien entièrement responsable des conséquences de l’échec de l’intervention qu’il a pratiquée sur les seins d’une dame.
La Cour a décidé que le médecin ‘’qui n’avait pas utilisé toutes les données acquises de la science… a exécuté de manière défectueuse l’obligation de moyens qui lui incombait’’, aggravant ainsi l’état de disgrâce des seins de la dame au lieu de l’améliorer. ‘’
Et dès lors, précise t-il, ‘’si le médecin commet une faute dans l’exercice de son art, sa responsabilité pourrait être engagée par la victime devant les juridictions.
‘’La responsabilité médicale se traduit par la nécessité cumulative d’une faute, d’un préjudice souffert par le patient et d’un lien de causalité puisque dans l’exécution de sa tâche quotidienne, le praticien s’astreint à des obligations de moyens, résultat ou sécurité.’’
L’autre exemple qu’il a mis en relief. ‘’ En matière d’activités médicales, la Cour d’appel, par arrêt n° 502 du 27 juillet 1984 a déclaré l’Etat du Sénégal entièrement responsable de la cécité d’une dame, pour mauvais fonctionnement du service de l’Hôpital Aristide Le Dantec et l’a condamné au paiement. Elle avait perdu l’usage de l’œil droit par rupture du nerf optique, au cours d’une intervention chirurgicale effectuée par un interne sans surveillance du chef de service. Il ne peut en être autrement puisque l’article 142 alinéa 1 du code des Obligations de l’Administration pose le principe du droit à la réparation des tiers et usagers du service public, victimes de son fonctionnement défectueux. Le malade étant lié à l’hôpital, en qualité d’usager du service public, l’Etat du Sénégal répare le dommage que celui-ci a subi.’’
S’il est admis que le praticien est astreint à l’obligation de résultats, de moyens et de sécurité, pour l’expert en droit soulève un aspect du code pénal qui stipule qu’ ‘’ en règle générale, le praticien est assujetti à une obligation de moyen, ce qui correspond au régime de la responsabilité pour faute. Ainsi, en principe, le médecin ne sera condamné que si la preuve de la faute est établie.’’ Une disposition qui prête à confusion aux yeux du citoyen lambda, dans la mesure où il n’est pas toujours évident d’établir la culpabilité du praticien.
Pour autant, ‘’ le code pénal comporte plusieurs incriminations relatives aux activités des professionnels de la santé dans l’exercice de leurs fonctions notamment la délivrance de faux certificats médicaux.
‘’La responsabilité du médecin est engagée s’il est établi que l’acte dommageable procède d’une omission, imprudence, négligence, inattention ou inobservation des règlements’’.
Du coup, ‘’ un médecin tenu responsable d’une faute médicale encourt des sanctions pénales qui vont de ‘’l’emprisonnement, à l’amende, l’interdiction d’exercer, l’interdiction de séjour, l’incapacité absolue de l’exercice de la profession’’