L’écrivain Boubacar Boris Diop faisait partie des animateurs de la conférence sur la décolonisation, le panafricanisme et la renaissance culturelle qui a eu lieu hier au Monument de la renaissance. Mais son speech s’est appesanti sur la notion de Françafrique.
Quelle définition donnez-vous de la Françafrique ?
Le terme de Françafrique a été utilisé pour la première fois par Houphouët Boigny. Il n’avait pas à cette époque son actuel sens. C’est avec François-Xavier Verschave qu’il acquiert sa connotation d’aujourd’hui qui suppose les relations politiques, économiques, militaires que la France entretient avec ses anciennes colonies d’Afrique. Avec François Xavier Verschave l’on comprend que la Françafrique n’est en réalité qu’un système de domination rétrograde et immorale, avec le refus de la France de décoloniser…
Mais la Françafrique existe-elle toujours ?
Cette notion de Françafrique n’a pas disparu, elle s’est justement muée. Avant la France soutenait les dictatures africaines, mais elle a réussi aujourd’hui à négocier le passage démocratique en exerçant un strict contrôle sur nos élites aussi bien au pouvoir que dans l’opposition. Nous pensons que nous pouvons nous libérer de la Françafrique, mais ne soyons pas naïfs. Depuis que le Sénégal est indépendant, les intérêts de la France n’ont jamais été aussi servis que sous le régime de Macky, mine de rien.
Voulez-vous dire que l’Afrique n’est pas décolonisée ?
Les chaînes sont là. Elles sont justement devenues invisibles. La France n’a en effet, accordé à l’Afrique son indépendance que du bout des lèvres. Autrement dit, la décolonisation n’a été qu’une façon pour les Français de quitter l’Afrique pour mieux y rester. La France continue de tirer d’énormes avantages de ses ex-colonies d’Afrique. Sans l’Afrique, la France ne serait pas ce qu’elle est.
Que faire pour stopper cette Françafrique ?
La Françafrique est un monstre à deux têtes. Paris, et les Palais présidentiels africains qui ont cédé leur souveraineté aux Présidents français. Le Peuple français n’en sait rien, les Peuples africains n’en sont que de simples victimes. La véritable question, c’est la souveraineté de nos dirigeants. Ce que nous devons faire, c’est de faire comprendre à nos dirigeants qu’ils seront redevables à la fin de leur souveraineté et de leurs relations avec l’extérieur. Le monstre commence déjà à afficher une troisième tête quand on pense à aux 2 000 soldats qui sont envoyés en Arabie Saoudite.