Amath Dansokho a tiré sur le gouvernement, après la Ligue démocratique qui a payé d’ailleurs le limogeage de Moussa Sarr. Des attaques qui retentissent au moment où le Parti socialiste cherche à s’appuyer sur les forces de gauche, favorables à l’application des conclusions des Assises nationales. Quand Oumar Youm parle de «stratégie concertée de destruction» des actions du gouvernement, on peut supposer qu’il s’agit d’une allusion à un éventuel regroupement du Ps, de la Ld et, peut-être, du Pit. Macky Sall aurait alors du pain sur la planche. Décryptage d’un contentieux.
Qu’est-ce que le Président Macky Sall a fait à ce jour des conclusions des Assises nationales ? Cette question donne des sueurs froides et suscitent de vifs regrets de la plupart des responsables de la Gauche avant 2012 et actuellement au pouvoir. L’annonce d’un référendum atténue les soucis. Mais encore avec quelles réformes ? D’ailleurs, d’aucuns conditionnent leur soutien au candidat sortant à la pertinence de ce qu’il tirera des travaux de la Commission nationale de réforme des institutions (Cnri), une sorte d’Assises nationales bis. A moins que les membres de la Confédération des forces de Gauche, réunis en février dernier, décident de miser sur leur propre cheval. Possible, mais peu probable. La Ligue démocratique (Ld), le Parti de l’indépendance et du travail (Pit), le Rassemblement national et démocratique (Rnd) de Dialo Diop, Yonou askan wi (Yaw), le Rassemblement des travailleurs africains/Sénégal (Rta-S), l’Union pour la démocratie et le fédéralisme, (Udf/ Mboolo-mi), etc., tous membres de Benno bokk yaakaar, n’excluent pas, en effet, de s’allier avec d’autres. Si l’objectif fixé à l’Endss est de «rassembler» et «moderniser» la Gauche, il reste que celle-ci n’hésitera pas à se rapprocher de formations qui avaient porté les Assises nationales. Le coordonnateur de ce regroupement de la Gauche, Pape Demba Sy, ajoutait que ce regroupement vise une «grande organisation politique en vue d’un projet alternatif de transformation sociale et la prise démocratique du pouvoir autour de partis d’obédience marxiste-léniniste». Un projet alternatif à celui du gouvernement de Macky Sall ? En tout cas, cette «Gauche nouvelle» se dit «ouverte» à toutes les forces qui tiennent à l’application des conclusions des Assises nationales. Une autre façon d’exprimer ses frustrations de l’accueil réservé au rapport de la commission Mbow qui dort encore dans les tiroirs du président de la République qui promet d’en tirer ce qu’il en jugera «bon»
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L’insinuation de Youm
Ce choix de Macky Sall n’agrée pas bon nombre de Marxistes, Maoïstes et Léninistes pour qui les réformes institutionnelles devraient accompagner la politique de développement en ce sens que ce pays ne saurait émerger sans une «refondation de l’Etat». Mais leur allié aux commandes a choisi de décider en 2016 par un référendum, à un an seulement de la Présidentielle. Mais ce timing serré n’arrange pas les Socialistes qui votent plutôt 2015. Et sur ce point, le Ps exploitera à fond les divergences. Déjà, Tanor annonce la Ld dans ce «grand rassemblement de la Gauche» sur lequel le Ps mise pour porter son candidat. Et c’est peut-être cette tentative de rassemblement du Ps et de certaines forces de Gauche qui justifie l’insinuation de Oumar Youm, répondant à Amath Dansokho qui avait déclaré dans L’Observateur du samedi que «notre pays est en danger». «Je crois qu’il y a une stratégie concertée derrière cette tentative de destruction de ce que nous sommes en train de faire. Au-delà de cette maladresse, il y a une volonté d’imploser le Benno et de l’imputer à l’Apr. Mais nous sommes sereins et, peut-être, les prochains jours nous révélerons les tenants et les aboutissants de cette stratégie», a dit le porte-parole du gouvernement dimanche, à Mbour.
Le Ps, candidat des forces de Gauche ?
En jetant un regard critique sur la gestion à laquelle ils participent, ces «faiseurs de roi» s’éloignent également de leur allié habituel, Moustapha Niasse, qui a déjà embarqué ce qui reste de son parti dans le bateau de la réélection de Macky Sall. Malgré les «biscuits» du pouvoir, La Ld et le Pit préfèrent garder leurs couleurs d’objecteurs des pratiques que de porter celles de perroquets qui ressassent sous tous les toits la chanson de «l’émergence». Même la popularité n’atteint pas souvent le niveau de la pertinence de la critique servie, le souci des conditions des «masses» poussent souvent à des sorties qui dépassent les cadres fermés du pouvoir. Ainsi le veut le col de Mao qui ne saurait être troqué avec les nœuds coulants qui étranglent le «peuple des assises». Le Président Macky Sall, ancien de And Jëf/Pads, se réclame socio-libéral. Il a gagné l’élection présidentielle de 2012 avec les partis de gauche, aussi bien au premier qu’au deuxième tour. Ils gouvernent ainsi ensemble. La soif présidentielle avait amené Macky Sall à la buvette des membres de Benno siggil senegaal cornaquée par Niasse. Aujourd’hui, l’espoir d’une refondation institutionnelle est tourné vers celui qui a plus ou moins fait siennes les recommandations des «Assisards» : le maire de Dakar. Sans aucune obligation, Khalifa Ababacar Sall a été l’un des rares élus de Bss à effectuer une déclaration publique de patrimoine au lendemain de son élection, en 2009. Si Cheikh Guèye est resté premier adjoint de Khalifa Sall et, de façon générale, si la Ld l’a accompagné dans Taxawu Dakar, c’est en partie dû à une conviction partagée par Abdoulaye Bathily. «(Khalifa Sall) est un maire qui a développé un esprit Benno. Il faut dire les choses honnêtement. Et je ne vois pas parmi les maires des grandes villes quelqu’un comme lui et qui ait fait autant», avait reconnu le prédécesseur de Mamadou Ndoye. Voilà qui expliquerait les rencontres du secrétaire général de la Ld avec le Parti socialiste. Des tentatives de rapprochement sont en cours et se précisent. A l’issue de la dernière réunion du Comité central du Ps, Ousmane Tanor Dieng a annoncé la mise en place d’un groupe de travail avec la Ld. ça ressemble à une révolte ou une révolution de la Gauche (avec le Ps)