Dakar, 29 mai 2015 (AFP) - Un organe spécialisé de l'Union africaine (UA) a invité le Sénégal à mettre fin à la mendicité des enfants, à la suite d'une requête de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l'Homme (Raddho), a indiqué cette ONG vendredi à Dakar.
Le Comité africain d'experts sur les droits et le bien-être de l'enfant, une instance de l'UA, avait été saisi en 2012 d'une plainte de la Raddho, basée à Dakar, et du Centre pour les droits de l'Homme de l'Université de Pretoria sur les violations par le Sénégal des textes nationaux et
internationaux sur les enfants.
Les plaignants avaient notamment indiqué qu'au Sénégal, des milliers d'enfants, appelés "talibés", "âgés de 4 et 12 ans, sont forcés par leurs marabouts (chefs religieux) de travailler dans les rues comme mendiants" et vivent dans des conditions de promiscuité favorisant des maladies et des déviances sociales.
Le Comité a jugé la plainte "recevable" et a demandé au Sénégal "de s'assurer que tous les talibés soient immédiatement retirés des rues et remis à leur famille" et que les auteurs de cette mendicité "soient traduits en justice", a dit le responsable de la Raddho, Aboubacry Mbodj, lors d'une conférence de presse.
Le Comité a donné "180 jours" au Sénégal, "à compter de la date de réception" de la décision, pour commencer à l'appliquer, a indiqué M. Mbodj.
La décision du Comité a été prise en avril 2014 mais publiée seulement le 15 mai à Dakar en raison d'un long circuit d'approbation interne à l'UA, a-t-il précisé.
Joint par l'AFP, un responsable du ministère sénégalais de la Justice a affirmé que la décision "ne leur est pas encore parvenue".
Plusieurs ONG dont Human Rights Watch (HRW) avaient le 20 avril estimé, dans un rapport, que les enfants mendiants dans les écoles coraniques au Sénégal sont toujours plus nombreux à souffrir de violations de leurs droits malgré une loi adoptée il y a dix ans.
Cette loi de 2005 interdit notamment la mendicité forcée et punit ses auteurs de deux à cinq ans de prison, peine assortie d'amendes pouvant aller jusqu'à 2 millions de FCFA (plus de 3.000 euros).
Au quotidien, des enfants aux pieds nus et en haillons, sébile à la main, sont visibles dans plusieurs villes sénégalaises, à Dakar. Une étude gouvernementale réalisée en 2014 estime leur nombre à plus de 30.000 rien que dans la capitale sénégalaise.
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