Ils ont été seulement 5 sur 150 députés à avoir répondu hier à l’invitation du mouvement Y en a marre dans le cadre du projet ‘’wax ak sa député’’. C’était à la place du Souvenir africain.
Seynabou Wade de Bokk Gis-Gis, Zator Mbaye de l’Afp, Thierno Bocoum de Rewmi, Cheikh Oumar Sy de Bes du niakk et Pape Birame Touré de Benno Bokk Yaakaar ont tenté de défendre le travail des députés à l’Assemblée nationale. La rencontre s’est tenue hier à la place du Souvenir africain. Elle s’inscrit dans le cadre d’un programme dénommé ‘’wax ak sa député’’ initié par le mouvement Y en a marre.
Les députés présents ont été interpellés par des Sénégalais de divers horizons ayant pris part à la manifestation. Ainsi s’est invitée au débat la question de la rupture. ‘’Il n’y a pas de changement à l’Assemblée nationale’’, dit d’emblée Seynabou Wade. Elle semble en savoir quelque chose elle qui est parlementaire depuis 1998. Sans faire dans la langue de bois, elle déclare : ‘’Ce pourquoi vous vous êtes battus, vous les jeunes de Y en a marre, n’a pas changé’’. Son collègue Cheikh Oumar Sy de renchérir : ‘’Qu’on change Macky pour mettre un autre ne changera pas la donne. C’est le système qui est pourri à l’intérieur. Il faut arriver à extraire la pourriture.’’ Des propos que ne partage naturellement pas le vice-président du groupe parlementaire de la majorité Pape Birame Touré. A en croire ce dernier, ‘’comparée aux autres législatures, celle-ci est la meilleure’’. A titre d’exemple, ‘’le niveau du débat est plus élevé et il y a moins de laisser-aller’’. Cheikh Oumar Sy tranche la pomme en deux : ‘’On est dans une dynamique et un processus de rupture. On a des sessions de formation et c’est bien. Mais il reste des choses à faire’’, pense-t-il.
Zator Mbaye semble, lui, dire que tout ne peut pas être rose en un seul jour : ‘’La rupture n’est pas qu’un slogan, c’est un ensemble d’éléments.’’ Ce qui n’empêche pas M. Sy d’identifier les éléments manquants pour l’instant. Pour lui, il manque un vrai débat entre les parlementaires et l’Exécutif. ‘’Il faut libérer les énergies qu’il y a à l’Assemblée nationale. Il ne faut pas avoir peur du débat. Car quand on ne pose pas le débat à l’Assemblée, ça va finir à wax sa xalaat’’, affirme-t-il. Pourtant, c’est dans cette optique qu’un face-à-face mensuel entre les membres du gouvernement et l’Assemblée nationale est initié. ‘’Dans la forme, c’est bien mais dans le fond, il y a des choses à améliorer’’, déplore-t-il. L’un des intervenants du côté du public va plus loin et lance : ‘’On n’a pas élu des députés pour qu’ils aillent chanter les louanges des ministres et de Macky Sall ou les défendre. Macky Sall a un service de communication qui doit servir à le défendre quand le besoin se fait sentir.’’ Mais Seynabou Wade ne croit pas en cette thèse.
‘’Le député est issu d’un parti. Il est investi par le chef de ce parti et généralement, c’est ce dernier qui verse la caution. Il faut alors qu’il le défende. Il faut que vous citoyens, vous vous intéressiez à comment vous élisez vos députés. Il faut revoir le processus. Cela vous permettra de choisir vous-mêmes vos élus’’, conseille-t-elle. Et s’il y a un point sur lequel s’accordent ces représentants du peuple, c’est sur le travail du député. Un travail qui n’est pas facile, à en croire Cheikh Omar Sy. ‘’Les ministres viennent avec leurs experts et leurs conseillers alors que les députés n’ont rien de tout cela. On est obligé d’aller chercher l’information nous même pour pouvoir être en mesure de savoir si ce que le ministre nous propose est bon ou non pour le peuple’’, fait savoir le député de Bes du niakk. Par conséquent, tel que le dit Thierno Bocoum, ‘’la mission d’un député est lourde parce qu’il représente le peuple’’. Aussi, ‘’il ne passe pas tout son temps à dormir à l’Assemblée nationale’’, comme le croient certains, selon Zator Mbaye.
Plus de complaintes que de questions posées
‘’Wax ak sa député’’ devait servir de cadre d’échange entre les élus du peuple et le peuple lui-même. Malheureusement la rencontre tenue hier à la place du Souvenir africain sur l’initiative du mouvement Y en a marre avait des relents d’une ‘’foire aux problèmes’’. Le public a émis plus de complaintes qu’il n’a posé de questions. C’est ainsi qu’un groupe d’une vingtaine de personnes est venu représenter 600 agents de la Senelec qui seraient licenciés. ‘’Pape Dieng a décidé de licencier 600 agents de la Senelec. Certains ont passé 10, 15 voir 20 ans dans la boite’’, selon Ousseynou Tounkara, l’un des membres du groupe présent : ‘’Il a voulu nous regrouper en GIE.
Ce qu’on a refusé et qui nous a valu cette sanction’’, ajoute-t-il. On retrouve diverses catégories de travailleurs dans le lot des agents préposés au relevé des compteurs. ‘’Le directeur marketing de la Senelec a décidé que tous les clients dont les demandes excèdent 5 ampères doivent forcément acheter des compteurs woyofal. Ce sont des compteurs à crédit. Cela n’arrange pas tout le monde et nous, avec ces compteurs, nous n’avons plus de raison d’être à la Senelec’’, affirme un autre des ex-agents, Lumumba Fall. Seulement, ils semblent s’être trompés d’interlocuteurs.
Car, selon Seynabou Wade, ‘’ce problème doit être pris en charge par l’Etat. Nous, tout ce qu’on peut faire, c’est parler à votre responsable syndical et essayer de trouver avec lui un terrain d’entente’’. ‘’On ne peut pas accepter une politique qui cautionne des pertes d’emplois’’, a martelé Thierno Bocoum. Le député rewmiste soutient les ex-agents de la Senelec dans leur lutte. Ces derniers l’ont d’ailleurs souligné ouvertement. Ils ont rencontré M. Bocoum avant ‘’wax ak sa député’’ et il aurait commencé à les aider. Mais attention ! semble vouloir dire le député de BBY Pape Birame Ndao. ‘’Arrêtez de vouloir politiser un dossier qui a des soubassements techniques’’, déclare-t-il. Ce que certains n’ont pas aimé et ont commencé à le huer. Mais ils ont vite été arrêtés par de jeunes Y en a marristes.
La centrale à charbon de Bargny était aussi objet à débat. Des gens de cette localité étaient présents à la rencontre pour attirer l’attention des députés sur le danger qui guette les populations de ce village lébou. Ils soutiennent que la centrale est installée au sein d’une cité lotissée alors que le code de l’environnement stipule qu’il devait être à 500 mètres des habitations. Face à cette question aussi, les députés disent être impuissants même si Thierno Bocoum indique que le combat doit être mené. ‘’Vous les populations devez vous battre pour montrer que vous n’êtes pas d’accord’’, suggère-t-il.