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Envoi de 2.100 soldats en Arabie Saoudite: Le Sénégal se lance dans la ‘’Tempête décisive’’

Publié le mercredi 6 mai 2015 | Enquête Plus

© aDakar.com par DF
Le Sénégal célèbre son indépendance par une prise d`armes
Dakar, le 4 Avril 2015 - Le chef de l`État Macky Sall a présidé à la prise d`armes marquant la célébration du 55e anniversaire de l`indépendance de la République du Sénégal.

Le Sénégal va envoyer 2 100 soldats en Arabie Saoudite dans le cadre de l’opération ‘’Tempête décisive’’ pour freiner l’avancée des groupes terroristes qui ont fini par occuper le Yémen. Le ministre des Affaires Etrangères et des Sénégalais de l’Extérieur Mankeur Ndiaye était hier à l’Assemblée nationale, pour délivrer ce message du chef de l’Etat aux députés.

C’est désormais officiel. Le Sénégal va envoyer 2 100 soldats en Arabie Saoudite dans le cadre de l’opération ‘’Tempête décisive’’. C’est le ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur, porteur d’un message du président de la République, qui en a informé hier la représentation nationale. Dans son édition du 20 avril 2015, EnQuête avait déjà annoncé la visite du Général de corps d’armée Mamadou Sow en Arabie Saoudite ‘’à la tête d’une délégation composée d’officiers de haut rang’’ pour baliser la voie. Selon le ministre Mankeur Ndiaye, les ‘’modalités et autres arrangements nécessaires au déploiement ont été conclus entre les Etats-majors des Forces Armées des deux pays’’. Ainsi, ce schéma qui se dessinait de plus en plus s’est concrétisé. Sous peu, un contingent va rallier l’Arabie Saoudite même si le ministre n’a pas encore annoncé la date de leur départ.

Avec l’envoi de ces soldats, le président de la République Macky Sall répond ‘’favorablement’’ à la demande de Ryad. D’après toujours le Chef de la diplomatie sénégalaise, la décision du chef de l’Etat n’est pas fortuite. Elle a était prise, dit-il, ‘’dans l’intérêt compris des deux pays’’ et vise ‘’à sécuriser les Lieux Saints de l'Islam, Médine et La Mecque, qui se trouvent aussi menacés par ces groupes terroristes qui veulent imposer à la Umma leur façon de vivre et de penser l'Islam’’. ‘’L'engagement du Sénégal est naturellement conforme aux dispositions de la Charte des Nations unies et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité adoptées sous le Chapitre VII de ladite Charte’’, se défend Mankeur Ndiaye.

Toutefois, le Sénégal ne sera pas seul aux côtés des forces saoudiennes. D’autres pays comme le Maroc, la Turquie, le Koweit, les Emirats Arabes unis et le Qatar vont composer cette coalition internationale pour freiner l’avancée des groupes terroristes qui ont fini par occuper le Yémen. ‘’A ce jour, la coalition internationale a réussi à freiner l’avancée des groupes terroristes, ce qui justifie la décision de mettre fin à l'opération «tempête décisive» à laquelle s'est substituée l'opération «Redonner l'espoir»’’, renseigne-t-il.

25 000 militaires déployés depuis les indépendances

Cependant, le Sénégal n’est pas à son premier coup d’essai. Lors de la guerre du Golf, quand les forces irakiennes ont envahi le Koweit, le Sénégal avait déployé des militaires pour libérer l’Emirat. Les Forces Armées sénégalaises ont aussi été à d’autres théâtres d’opération. C’est pourquoi le Sénégal a été classé, informe le ministre des Affaires étrangères, ‘’septième (7ème) pays contributeur de troupes au profit de l'Organisation des Nations unies (Onu), à la date du 31 mars 2015, avec 3 400 hommes’’. Et depuis son indépendance, poursuit-il, le Sénégal a envoyé ‘’près de 25 000 militaires dans plus de vingt (20) Opérations de Maintien de la Paix’’.

REACTIONS DES PARLEMENTAIRES

MOUSTAPHA DIAKHATÉ (PRESIDENT GROUPE PARLEMENTAIRE BBY)

‘’C’est légal’’

Aujourd’hui, tout le monde sait ce qui se passe dans le monde. Est-ce qu’il y a un seul Sénégalais qui souhaite que l’Arabie Saoudite connaisse le même sort que la Syrie ou l’Irak ? L’Arabie Saoudite est aussi le pays des deux lieux Saints de l’Islam. Le président Macky Sall, le président d’un pays où 95% de la population sont des musulmans, en participant à sécuriser les frontières de l’Arabie Saoudite, à mon avis, fait œuvre utile d’autant plus que c’est légal parce que c’est lui qui définit la politique de la nation. Et ce n’est pas une première fois que le Sénégal s’engage dans ces types de combat. Nous sommes allés au Congo, nous sommes allés au Liberia, en Sierra Léone. Tout ça parce que le Sénégal est un pays de paix et nous voulons que la paix règne dans le monde. Vous n’êtes pas au courant d’un conflit entre l’Arabie Saoudite et une autre confrérie. Nous allons pour sécuriser les frontières de l’Arabie Saoudite. A ma connaissance, je ne suis pas au courant d’une guerre entre l’Arabie Saoudite et un pays chiite.

OUMAR SARR (REWMI)

‘’Cette décision est démesurée’’

Nous avons écouté la très forte et brillante plaidoirie du ministre des Affaires étrangères mais j’estime qu’elle a été insuffisante pour justifier qu’on prenne une décision aussi grave d’amener en Arabie Saoudite 2 100 soldats. Je pense que cette décision est démesurée par rapport à l’amitié qui nous lie à l’Arabie Saoudite. On aurait pu le faire pour le Cameroun, on aurait applaudi. Qu’on le fasse pour le Nigeria, ce serait la même chose. La question que nous nous posons, c’est : qu’est-ce qui vaut au président de la République la décision ? Déjà, il y a des voix qui s’élèvent pour suspecter qu’il y ait des dessous économiques ou financiers. Personne aujourd’hui ne peut soutenir le contraire. Je pense qu’elle a été démesurée et les conséquences peuvent être incalculables pour notre pays, sa sécurité, sa diplomatie.

AIDA MBODJ (Pds)

‘’Un envoi inopportun’’

C’est un envoi inopportun et je pense que c’est une décision qu’il ne fallait pas prendre. Nous ne sommes pas d’accord. C’est une guerre et donc le gouvernement devrait venir à l’Assemblée pour faire une déclaration de guerre. C’est une guerre d’autant plus que c’est un bon nombre. 2100 éléments, c’est un bon nombre. Je suis sûre que même les militaires ne sont pas d’accord. Le faire, c’est exposer le Sénégal et nous n’avons pas besoin de prendre un tel risque. C’est l’Arabie Saoudite qui a demandé au Sénégal mais le théâtre des opérations, c’est au Yémen. Je pense que le Yémen est un terrain inconnu et nos troupes ne sont pas préparées à affronter ces genres de situation. En ce qui me concerne, je ne suis pas d’accord et je trouve que c’est une décision inopportune et un risque auquel on expose le Sénégal.

AÏSSATA TALL SALL (Ps)

‘’Le président doit des explications au peuple sénégalais’’

Pour une fois, nous participons à une coalition décidée par un pays autour de ses pays amis pour aller intervenir dans une guerre interne d’un autre pays. Je pense que cela n’est pas dans la tradition diplomatique sénégalaise. La diplomatie, ce n’est pas de l’affection, ce ne sont pas des sentiments. La diplomatie, c’est quelque chose de lucide. Sur ce coup, M. le président de la République doit des explications au peuple sénégalais pour qu’on comprenne les raisons fondamentales qui l’ont poussé à intervenir au Yémen. Y a-t-il une résolution des Nations unies ? Y a-t-il une résolution de l’Union africaine ? Sur quelle base ? Sur la base de l’amitié ? Nous prenons des risques assez graves.

J’ai entendu ce matin le Pakistan qui est un pays proche de l’Arabie Saoudite comme nous le sommes, peut être même beaucoup plus que nous le sommes, dire qu’il ne va pas s’engager dans cette guerre qui non seulement est une guerre interne mais est une guerre confrérique entre des sunnites et des chiites. Si nous n’y allons pas dans le sens d’être un arbitre, nous ne devrions pas être partisans. C’est une bataille de géostratégie entre elle et l’Iran. Voilà ce qui est en train d’être joué. L’Iran soutient les chiites et l’Arabie Saoudite soutient les sunnites. Si l’Arabie Saoudite était menacé, c’est une résolution du Conseil des Nations unies qui l’aurait réglé et là, le Sénégal aurait eu le bon prétexte, le bon argument pour intervenir au Yémen mais pas de cette façon-là.

ABDOU MBOW (Apr)

‘’Des arguments convaincants’’

La diplomatie, c’est une question d’intérêt et c’est seul le président de la République qui est habilité à apprécier l’intérêt ou non du Sénégal à être aux côtés de l’Arabie Saoudite. Les arguments qui ont été avancés par le ministre des Affaires étrangères sont des arguments convaincants. C’est pourquoi nous parlementaires, devons quand même éclairer la lanterne des Sénégalais et des Sénégalaises pour qu’ils sachent que le président de la République n’a pas décidé d’envoyer des soldats en Arabie Saoudite rien que pour aller amuser la galerie. Le ministre des Affaires étrangères a bien dit que d’autres pays participent à cette coalition. La coalition internationale est très importante parce qu’il faut le rappeler, depuis 1960, 25 000 soldats ont été envoyés dans 20 opérations de maintien de la paix.

MODOU DIAGNE FADA (PRESIDENT GROUPE PARLEMENTAIRE DES LIBÉRAUX)

‘’Nous courons des risques’’

Les lieux Saints de l’Islam ne sont pas menacés, ni La Mecque, ni Médine. Je n’ai pas aussi entendu un seul pays de l’Afrique subsaharienne envoyer des troupes en Arabie Saoudite. Et aujourd’hui, on ne sait pas si les gens vont rester en Arabie Saoudite ou alors ils vont être déployés au Yémen. Rien n’a été dit de ce point de vue-là. Nous avons des raisons d’avoir des réserves d’autant plus que jusqu’au moment où nous parlons, nous n’avons pas encore fait l’objet d’attaques de la part de terroristes, de la part de groupes djihadistes. Mais c’est clair que si nous nous mêlons de choses qui ne nous concernent pas trop, nous courons des risques.