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Réquisitoire du procureur dans l’affaire des produits phytosanitaires : Aïda parquée 10 ans
Publié le vendredi 17 avril 2015  |  Le Quotidien
Aïda
© Autre presse par DR
Aïda Ndiongue




L’ex-sénatrice libérale, Aïda Ndiongue, le président de la Fédération nationale des cadres libéraux (Fncl), Abdoul Aziz Diop et l’Agent comptable particulier Amadou Ndiaye ont été jugés hier, en audience spéciale, devant le Tribunal correctionnel de Dakar. Le procureur a requis une peine de 10 ans de prison ferme contre les mis en cause, à qui l’Etat réclame 25 milliards de dommages et intérêts.

A l’ouverture du procès de Aïda Ndiongue et Cie, les débats se sont fondus dans des jeux juridiques qui mettent plus en lumière la complexité de l’affaire dite des produits phytosanitaires destinés au Plan Jaxaay, dont l’accusation chiffre les détournements à plus de 20 milliards. L’ex-sénatrice libérale, le président de la Fédération nationale des cadres libéraux (Fncl), Abdoul Aziz Diop, et l’Agent comptable particulier (Acp), Amadou Ndiaye, sont accusés d’avoir amassé de manière illicite des deniers publics, grâce à des montages financiers complexes. Le ministère public reproche à la responsable libérale de «s’être enrichie sur la base de marchés fictifs», en complicité avec Abdoul Aziz Diop et leurs autres co-prévenus qui lui auraient «apporté aide et assistance».

Face à cette charge, la responsable libérale a immédiatement clamé son innocence. «On a voulu me mettre en prison mais, j’ai livré tout le matériel», a d’emblée répondu la prévenue. A ses côtés, ses deux co-prévenus ne se sont pas tus face à des chefs d’inculpation de complicité de détournement, soustraction frauduleuse de deniers publics et faux et usage de faux.
L’ordonnance de renvoi a fait ressortir des irrégularités, dans le cadre d’un marché de fourniture de bacs à ordures gagné par l’entreprise Walo Services, appartenant à Aïda Ndiongue. Le supposé détournement de deniers publics prend aussi en compte d’autres marchés de fourniture de tentes en coton, de motopompes, entre autres.

Une amende de 5 millions de francs requise
Ce «cumul des marchés», selon le langage du procureur, «s’est fait sur la base de manœuvres frauduleuses». Dans son réquisitoire, le Parquet est revenu sur les circonstances de l’arrestation de Aïda Ndiongue et ses supposés complices. Le ministère public a rappelé qu’une enquête a été ouverte à la suite de la découverte de cinq chèques dont un problème de justification de prestation s’est posé. Le magistrat parle de «délinquance hyper adaptée».
Sur la création des sociétés qui ont gagné des marchés dans le cadre du Plan Jaxaay, «le système de prête-noms ne souffre d’aucun doute», aux yeux du procureur. Ce dernier a demandé au Tribunal de requalifier le délit de détournement reproché à Abdoul Aziz Diop en complicité d’escroquerie portant sur des deniers publics. Le procureur a demandé au juge de retenir l’ex-sénatrice dans les liens de la détention, considérant qu’elle est coupable d’escroquerie portant sur des deniers publics, faux en écriture privée de banque et exercice illégal du commerce.
Le procureur a requis une peine de 10 ans de prison ferme contre Aïda Ndiongue et Cie et la confiscation de l’ensemble des biens confisqués en plus d’une amende de 5 millions de francs Cfa. Il est d’avis que «la peine de 10 ans serait proportionnelle aux délits commis».
De son côté, la défense estime qu’une telle peine serait «choquante et inappropriée». Me Mbaye Jaques Ndiaye et ses collègues de la défense ont plaidé la relaxe pure et simple. Leur plaidoirie a été interrompue par le juge, qui a suspendu l’audience jusqu’au 30 avril prochain.

L’Etat réclame 25 milliards de dommages et intérêts
Bien avant cela, les conseils de l’Etat du Sénégal ont, à l’unanimité, démontré la «culpabilité manifeste» de l’ancienne sénatrice libérale et ses co-prévenus. Me Aly Fall est revenu sur les circonstances dans lesquelles les faits se sont réalisés, avant d’évaluer le préjudice subi par l’Etat du Sénégal à hauteur de 25 milliards de francs Cfa. Cette somme a été réclamée à titre de dommages et intérêts.
Au cours de l’audience, l’ex-sénatrice libérale n’a eu de cesse de se défendre. Tout juste avoue-t-elle avoir manqué de «formalisme», mais que «maintenant, tout est transparent». Mais dans son envie de se justifier, Aïda Ndiongue se trompe parfois. Par mégarde, elle attribue des sociétés, qui avaient gagné des marchés dans le cadre du Plan Jaxaay, à des membres de sa famille, cités en qualité de témoins. Devant le juge, des témoins ont renvoyé la paternité de ces sociétés à la responsable libérale.

«Nous les gens du Fleuve, nous aimons les bijoux»
Aïda Ndiongue s’est expliquée sur ses liens avec les sociétés au nom desquelles des procurations lui ont été établies. Elle avoue avoir été la seule personne habilitée à mouvementer les comptes de ces entreprises. Tout en réaffirmant qu’elle n’est propriétaire que d’une seule entreprise, en l’occurrence Dialla Waly. «J’ai commencé à travailler dans le cadre du Plan Jaxaay en 2008 et j’ai gagné un seul marché. Il s’agit du marché de fourniture de produits phytosanitaires. Aucune loi n’interdit de créer des sociétés au nom d’un membre de sa famille», se défend-elle. Pour Mme Ndiongue, le marché a été totalement exécuté et le matériel livré en intégralité. «Toute la commande publique a été livrée tant en quantité qu’en qualité», a réaffirmé la prévenue. Elle ne cache pas son amour pour les bijoux, en tant que native de Dagana, ville située au Nord du Sénégal. «J’achète de l’or. Je suis du Fleuve (Ndlr : ancêtre de la région de Saint-Louis du Sénégal). Vous savez, nous les gens du Fleuve, nous aimons les bijoux.»
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