Souleymane Ndéné Ndiaye n’est plus membre du Parti démocratique sénégalais. Il annonce la création de son parti sous peu en direction de la prochaine Présidentielle. Une démission qui intervient quelques jours après le choix de Karim Wade comme candidat du parti. Il suit sa logique de ne «jamais être derrière le gosse». Fin de ménage. Retour sur les incompatibilités d’humeur.
Il était une fois… Ainsi, se résume le départ de Souleymane Ndéné Ndiaye du Parti démocratique sénégalais que l’intéressé lui-même a annoncé -officialisé- hier sur les ondes de la Rfm. «Il est évident que je n’irai pas à cette élection présidentielle sous la bannière du Pds car, le Pds a déjà choisi son candidat. Et moi, je vais dans les prochains jours, les prochains mois, certainement, mettre sur pied un parti politique avec d’autres Sénégalais qui partagent ma vision du Sénégal de demain pour aller à cette élection présidentielle-là», a-t-il indiqué. Mais le divorce était prévisible au vu des «incompatibilités d’humeur» qui ont marqué ce «ménage» consommé pendant des décennies. S’il est vrai que la succession de Wade à la tête du Pds et le choix de Karim Wade ont accéléré la cadence de la rupture, les prémices étaient déjà là depuis la Présidentielle de 2012. Fait rare qu’un directeur de campagne soit mis à la touche pour avoir envoyé son candidat au second tour. Souleymane Ndéné Ndiaye n’a sans doute pas digéré que Wade le relègue au second plan pour mettre en place une équipe sans tête. Il disparaîtra des écrans, des radios, des journaux et même des dernières images du Président sortant et s’éloignera de Dakar. Crise de confiance étouffée, mais perceptible. A la chute le 25 mars, l’ancien Premier ministre qui -c’est légitime- espérait prendre la relève tout comme Pape Diop, voit Wade (r)abattre les cartes en choisissant Oumar Sarr pour coordonner le Pds. Il accepte d’être investi sur la liste des députés, mais ne semble pas trop «chaud» pour le poste. De chef du gouvernement à (simple) contrôleur du gouvernement, il y voit sans doute une déchéance qui ne lui va pas. C’est pourquoi sa démission de l’assemblée, 4 mois seulement après l’installation de la 12ème Législature, ne fut point une surprise. Grâce à lui, Iba Der Thiam, qui était sur la liste d’attente, devient titulaire. A cause de lui, soupirent les Libéraux, le Pds perd un de ses 12 députés qui s’acoquine plus avec le régime en place. Et petit à petit, Jules prend ses distances.
«Espérance bleue» noyée
La longue distance d’ailleurs, qui le mènera à Londres pour des études en anglais, n’était guère du goût de ses frères de parti. Et Doudou Wade ne s’en était pas caché en déclarant sur Rfm : «Souleymane Ndéné est allé à Londres pour apprendre l’anglais. Nous, nous en avons profité pendant son absence, certains comme moi pour apprendre le Sarakholé, le Sérère et le Diola pour pouvoir parler aux populations et prendre leurs préoccupations en charge. Quand il reviendra, il va revenir dans le parti sinon, peut-être qu’il doit aller en Gambie pour parler aux Gambiens…» Il ajoutera : «Nous n’avons pas les mêmes directions avec Souleymane Ndéné Ndiaye.» Le dernier Premier ministre de Wade a tracé quelques semaines plus tard sa direction en adressant une lettre à ses «frères», intitulée «L’Espérance bleue». Et ce, en pleine traque des biens mal acquis lancée contre des dignitaires de son parti. Une sorte de programme politique qu’il leur soumet. Ndéné, qui voyait le temps le fuir, était, aves ses exclamations, comme noyé dans le Lac de Lamartine. «Le temps de la Justice est lent ! Le temps de la Justice est long... Très long !», disait-il. «Il est venu, dans le Parti où j’ai construit toute la carrière politique, le temps du soupçon. (…) J’ai bien compris que c’est une manière subtile d’anticiper sur un débat dont on ne pourra, éternellement, faire l’économie. Celui de l’avenir du Parti démocratique sénégalais. (…) Faire renaître l’Esperance Bleue. C’est là le combat qui me fait sortir de mon mutisme et me préparer à revenir dans le champ politique. C’est ce que je dois à Me Wade : me battre de toutes mes forces, pour que son héritage survive à une Vie que nous lui souhaitons bien longue ! Pour que, jamais ne meure «l’Espérance bleue», avait-il écrit.
La logique du «jamais derrière le gosse»
Wade a décidé que cette «Espérance bleue» soit portée par son fils Karim. Mais pour Jules, comme il l’avait déjà indiqué dans sa lettre, «le temps de l’unanimisme est révolu !». Unanimisme imposé par Wade pour son fils ! Il est tout de même logique avec lui-même pour avoir juré : «Je ne serai jamais derrière le gosse.» Et le «gosse» est candidat du Pds, en tout cas investi par le Parti. Par l’autre partie du Pds. Dans L’EnQuête, la semaine dernière, Souleymane Ndéné Ndiaye avait pourtant déjà mis un pied hors du Pds. «(…) Jusqu’au moment où je parle, je suis au Pds. Maintenant, si les conditions ne sont pas réunies pour que je reste au Pds, j’en sortirais. Il n’y a pas de problème», disait-il. C’est qu’apparemment il n’y était plus. Et il a mis un point final à sa phrase, aux relents de menaces, qu’il avait confiée à L’Observateur : «Pour l’instant, mon souhait, c’est d’obtenir que le Pds m’investisse comme son candidat à l’élection présidentielle de 2017. Si mon parti décide autrement, je verrai justement quelle conduite adopter.» Sa conduite, c’était son départ et le lancement de son parti «dans les prochains mois».