La troisième édition de l'Afterwork culturel "SN Art" a permis à trois panélistes invités, de répertorier les "outils" intellectuels et techniques utiles au développement de carrières artistiques, et de mettre l'accent sur la formation comme élément indispensable dans la mise en place de stratégies.
Organisée jeudi soir à la Galery Kemboury, la rencontre a été animée par Cécile Rata, promotrice de projets à Africa Fête, Canabasse, musicien et producteur, et la galeriste Thérèse Turpin Diatta, en présence d'artistes, d'acteurs culturels et de journalistes.
La galeriste Thérèse Turpin Diatta a d'emblée relevé que dans son métier l'amène à être "un écran entre le collectionneur, l'amateur d'art et l'artiste". Le galeriste est "quelqu'un qui comprend l'artiste et peut faire sa promotion aux niveaux national et international, a-t-elle dit. Il faut une alchimie, une entente totale entre l'artiste et le galeriste pour que les choses puissent marcher."
Mme Diatta a dit que, concrètement, il opère la sélection des œuvres, organise leur exposition de façon permanente dans la galerie, ajoutant : "Il faut arriver à expliquer le choix des artistes et des œuvres et arriver à faire leur promotion dans les médias".
Selon elle, travailler au développement d'une carrière est un exercice "difficile". "L'artiste ne peut pas créer une œuvre et, en même temps, faire la promotion de son œuvre. Il faut une complicité pour que le galeriste puisse parler de lui les yeux fermés", a-t-elle expliqué à ce sujet, précisant que c'est cela qu'elle essaie depuis 1996, date de création de la sa galerie.
Elle a ajouté : "Le manager est là pour sentir qu'il y a un potentiel. J'ai exposé des têtes d'affiche, mais mon challenge c'est les jeunes artistes. C'est contribuer à leur donner cette assurance qui leur manque".
Pour le rappeur Canabasse, l'artiste apprend au fur et à mesure qu'il développe sa carrière. Parlant de "Buzz Lab", la structure qu'il a créée avec des amis, il a signalé que chaque artiste enregistre un mixtape de 16 à 20 titres, proposé en téléchargement libre, aux mélomanes qui, après écoute, expriment aussitôt une nouvelle demande, celle de la scène.
"Le but est d'établir Buzz Lab en tant que label. On donne nos albums gratuitement, on gagne avec les spectacles que nous organisons", a expliqué Canabasse, tandis que la promotrice Cécile Rata a dit que le travail du label Africa Fête pour lequel elle travaille consiste principalement à voir "comment un artiste peut discuter avec un producteur, comment comprendre un contrat, connaître ses droits pour pouvoir les défendre".
Il s'agit aussi, a-t-elle souligné, de mieux connaître les métiers qui encadrent l'artiste, rappelant que le festival Africa Fête – qui existe depuis 14 ans sur le continent africain - est "la vitrine" de ce travail de conseil et d'encadrement.
En plus de la démarche tendant à le rendre itinérant, pour faire découvrir des artistes, les responsables d'Africa Fête ont contribué à la mise en place du Bureau Export de la musique africaine (BEMA), un réseau de producteurs de 12 pays, et du Salon internationale de la musique africaine (SIMA), dont la troisième édition est prévue en septembre prochain au Bénin.
La "nouvelle approche" est qu'Africa Fête travaille avec les artistes sur des projets, a dit Cécile Rata, relevant que "le manque de formation reste un vrai problème".
"Il reste des artistes qui ont besoin d'être accompagnés et qui le demandent", a-t-elle ajouté, signalant, au sujet du financement de leurs activités, que la structure essaie de marcher sur les deux pieds, le privé, pour les ventes, et le public, pour les subventions et aides publiques.
"Nous devons chercher nous-mêmes les moyens de financer nos activités", a pour sa part indiqué Thérèse Turpin Diatta, estimant toutefois que pour le transport et l'assurance des œuvres, "il faut des supports étatiques, au plan administratif, pour expliquer à des autorités douanières que nous ne serons taxés que sur les œuvres vendues".
"La présence dans les foires est une question de moyens, parce que c'est l'Etat qui peut se charger convenablement de l'achat d'espaces pour des structures comme les galeries, a insisté Mme Diatta. La recherche de sponsors peut aider, mais il faut sensibiliser les autorités sur le fait qu'au-delà de l'aspect rémunérateur, il s'agit de promouvoir des artistes."
Parlant du cas spécifique du rap, Canabasse a dit que ce genre musical "étant encore victime de préjugés, tout part des initiatives individuelles des acteurs eux-mêmes". "Nous sommes dans une posture de montrer aux sponsors que nous aussi nous pouvons être des vecteurs".