Le parti d’Abdoulaye Wade est décimé par les multiples détentions de ses militants avant et après-verdict de la Crei. Estomaqués par la sentence de lundi dernier, les libéraux combattent sur plusieurs fronts juridiques et devront forcément faire passer certaines batailles de libération prioritaires, au détriment d’autres.
Effet collatéral du verdict du procès de Karim Wade devant la Crei, certains partisans du Parti démocratique sénégalais dans les liens de la prévention sont zappés dans la tornade médiatique qu’a suscitée la condamnation du fils de l’ancien président de la République. Mamadou Lamine Massaly, Victor Diouf, Amadou Bamba Ba, Me Amadou Sall, Serigne Assane Mbacké, Amina Nguirane, (et plus tard Toussaint Manga), pour ne citer que ceux là, qui ont fait les choux gras de la presse le temps d’un avant-verdict très attendu, risquent de voir leur séjour à la prison se prolonger, suite au pourvoi en cassation contre la sentence de Henri Grégoire Diop.
Massaly, Amina Nguirane, Toussaint, cas critiques
L’intérêt du parti semble s’être focalisé sur Karim. Mardi passé, lendemain du verdict, le président des jeunesses wadiste, Mamadou Lamine Massaly, qui faisait face au juge pour injures publiques, n’a pu compter que sur le soutien de Bachir Diawara. Son élargissement n’est pas à l’ordre du jour puisque des procédures le concernant se sont entremêlées. La demande de liberté provisoire (Lp), non encore vidée, dans l’affaire l’opposant à la Gendarmerie, retarde son procès en correctionnelle contre Aminata Tall. Ledit procès est de nouveau fixé au 28 avril, où un autre renvoi est envisageable si la Cour d’appel ne se penche pas rapidement sur sa demande de Lp.
Après trois retours de parquet, le leader du mouvement ‘Horizon 2017 Ak Karim’, Amina Nguirane et le lutteur Bathie Séras vivent un début de calvaire qui devrait durer un semestre avant leur première comparution. Placés sous mandat de dépôt le vendredi dernier pour troubles à l’ordre public, leur situation se complique d’autant plus que la bataille de procédure, à la Crei entame sa seconde manche après la condamnation du candidat du Pds à la présidentielle de 2017. Pour l’avocat Me Djibril Diallo, c’est une question politique. ‘’C’était prévisible, tout le combat du Pds se résume à Karim Wade. Toute la stratégie d’Abdoulaye Wade est bâtie autour de sa libération. Pour lui, l’essentiel est que son fils soit libre’’, estime-t-il. Entre un ministère public qui ne cède pas le moindre pouce de terrain et les suites de l’affaire Karim qui ne sont pas prêtes de s’estomper, ces détenus risquent de patienter encore pour un moment.
Le Parti démocratique sénégalais va-t-il laisser ses militants et sympathisants, pas moins de 26 au total, seuls face à leur destin judiciaire ? Certainement pas. Lors du comité directeur du parti tenu avant-hier, les responsables ont clairement déclaré leur intention de les tirer hors des griffes de la justice. ‘‘Le pouvoir en place veut décapiter l’aile jeune. Ils ont arrêté le responsable des jeunes et celui des étudiants. La jeunesse fera face à Macky’’, a lancé le porte-parole du parti, Babacar Gaye. Quant au coordonnateur de l’union des jeunesses travaillistes libérales (Ujtl), Toussaint Manga, déféré au parquet avant-hier mercredi, en compagnie de neuf autres personnes, rien d’officiel n’a encore filtré sur leur cas. Mais les quatre chefs d’inculpation retenus contre eux, dont les troubles à l’ordre public, laissent présager que le bout du tunnel est encore loin.
Me Amadou Sall bien entouré
Même si rien n’indique un traitement diligent des trois cas précités, l’affaire Me Amadou Sall semble être la seule éclaircie dans cet amas nuageux au dessus du Pds. En prison pour offense au chef de l’Etat et atteinte à la sûreté de l’Etat, la solidarité de corps pourrait jouer en sa faveur. ‘‘Nos confrères sont disposés à ce qu’il soit jugé dans les plus brefs délais. Pour le moment, le dossier est à l’instruction, après c’est l’enquête. Mais il y a une solidarité de corps qui s’active pour qu’il soit jugé le plus rapidement possible’’, déclare Me Djiby Diallo. Le cas de l’ancien ministre de la justice, sous mandat de dépôt depuis le 17 mars dernier, pourrait connaître une évolution rapide.
Pour Me Diallo, la stratégie d’évitement est à ne pas adopter de la part des conseils car ‘‘cela affaiblit les forces de la défense. C’est pourquoi il faut savoir raison garder’’, poursuit-il. Mais de façon générale, tous les membres du camp libéral peuvent s’attendre à bénéficier d’une solide défense, rassure également Me Madické Niang. ‘‘Un pool d’une cinquantaine d’avocats sera constitué pour défendre Me Amadou Sall’’, faisait-il savoir lors du comité directeur de mercredi. Pour le moment, la priorité demeure le pourvoi en cassation contre le verdict de la Crei. En attendant qu’elle porte ses fruits, ces détenus doivent prendre leur mal en patience au frais.