Dakar, 21 mars 2015 (AFP) - Karim Wade, fils de l’ex-président Abdoulaye Wade, a été choisi samedi par l’ex-parti au pouvoir comme son candidat pour la prochaine présidentielle au Sénégal, gagnant ainsi une stature politique à deux jours du verdict de son procès pour "enrichissement illicite".
"Karim Wade a été choisi par 257 délégués sur 268. Il a été désigné candidat" du Parti démocratique sénégalais (PDS) pour la présidentielle, dont la date n’est pas encore connue, a affirmé à l’AFP Tafsir Thioye, membre de la commission du PDS chargée de recueillir les candidatures. Des propos confirmés par Lamine Bâ, un responsable de la section jeunes.
Au moins huit candidats étaient en lice.
Si Karim Wade, en détention préventive depuis avril 2013 dans une prison de Dakar, était absent du congrès, son père, l’ex-président Abdoulaye Wade, 88 ans, assistait à la réunion. Secrétaire général du PDS, il a dirigé le Sénégal de 2000 à 2012.
Karim Wade, ancien conseiller et ministre de son père, est jugé depuis le 31 juillet 2014 par une cour spéciale pour "enrichissement illicite et corruption". Son jugement est attendu lundi, le parquet ayant requis contre lui sept ans de prison ferme, ainsi qu’une privation des droits civiques.
Des observateurs estiment que la désignation samedi de Karim Wade permet à son camp d’asseoir ses critiques contre un procès selon eux "politique", qui serait destiné à écarter Karim Wade, obstacle sur la route du président Macky Sall vers un second mandat.
Macky Sall, élu en 2012 face à Abdoulaye Wade qui briguait un troisième mandat, a assuré mardi ne pas craindre une éventuelle candidature de Karim Wade.
"S’il y a un candidat plus fort que moi que les Sénégalais vont désigner, on en prendra acte", avait-il dit lors d’une rencontre avec les représentants de la presse étrangère au Sénégal, en réponse à une question sur Karim Wade.
Karim Wade est accusé d’avoir illégalement acquis 178 millions d’euros par le biais de montages financiers complexes du temps où il était conseiller puis ministre de son père, ce qu’il nie.
- ’la faute’ au pouvoir -
Le choix de Karim Wade intervient dans une atmosphère fébrile depuis quelques jours au Sénégal, dans l’attente du verdict de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI), la juridiction spéciale qui le juge.
Selon les médias locaux, la sécurité a été renforcée à plusieurs endroits de la capitale, en banlieue notamment.
La principale coalition de l’opposition, dont fait partie le PDS, a appelé vendredi ses partisans à se retrouver en masse lundi au palais de justice de Dakar pour soutenir Karim Wade.
Le PDS a également annoncé dans un communiqué la présence à la cour d’Abdoulaye Wade qui "va commenter sur place la décision qui sera rendue".
Abdoulaye Wade a plusieurs fois déclaré qu’il ne permettrait pas une condamnation de son fils, qualifiant la CREI de "machin" et évoquant des manoeuvres pour empêcher Karim Wade de se présenter face à Macky Sall.
Plusieurs membres et responsables du PDS ont été arrêtés ces derniers jours à Dakar dont l’ex-ministre de la Justice El Hadji Amadou Sall, un des avocatsde Karim Wade, pour diverses imputations.
"Si le pays bascule dans la violence, ce ne sera pas la faute de l’opposition mais celle de ceux qui mettent en prison des gens", a déclaré à des journalistes le député de l’opposition, Mamadou Diop Decroix.
Face à ce climat de tensions, "l’Etat va assurer la sécurité des citoyens et des biens", a répondu à la presse le ministre de la Justice, Sidiki Kaba.
"La libre expression sera respectée mais dans le cadre de la loi. La décision qui sera rendue sera celle de la Cour, une décision indépendante", a-t-il ajouté dans une interview au quotidien pro-gouvernemental "Le Soleil".
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