Il est rare de voir des journalistes qui font un service minimum. L’Agence de presse sénégalaise l’a fait durant 6 jours. Dénonçant le manque de considération de la part des autorités envers leur organe ainsi que les difficiles conditions de travail, ces travailleurs sont prêts à aller jusqu’au bout pour obtenir gain de cause. La frustration et la démotivation sont les sentiments les mieux partagés dans les locaux de cet organe du service public.
Le manque de considération des autorités envers leur organe de presse a sapé le moral des travailleurs de l’Agence de presse sénégalaise (Aps). En mouvement d’humeur depuis quelques jours, ils ont pris certaines mesures comme le service minimum à contrecœur. Malgré la passion qu’ils débordent pour informer et rendre service au public, ils ont été obligés de ranger leurs calepins pour se faire entendre. Après 3 jours de service minimum, les agents ont repris le travail hier matin.
Sur les lieux, ce n’est pas le rush. La plupart des agents de l’équipe du matin sont encore sur le terrain. Ceux qui sont dans les locaux sont assez concentrés sur leur boulot. N’empêche, la frustration ne se cache pas quand on évoque la situation qui prévaut dans cet organe. Frustrés et démotivés par l’attitude des autorités qui ne se rendent pas compte de l’importance du travail qu’ils abattent tous les jours, ils sont prêts à mener le combat jusqu’au bout. Abdoulaye Iba Faye, journaliste à l’Aps, visiblement irrité par la situation, ne cache pas sa désolation. Selon lui, c’est dramatique, «les gens n’ont même plus leur rendement réel». A cela, il ajoute les conditions difficiles dans lesquelles les gens font leur boulot.
Logée dans les locaux de la Maison de la presse, l’Aps ne dispose toujours pas de locaux qui lui sont propres. Déplorant les conditions et l’environnement dans lequel ils travaillent, le journaliste estime que cette salle n’est même pas digne d’une rédaction normale. Pour un média qui relève de l’Etat, il trouve anormal que l’on puisse déplorer le manque de machines, de matériels pour travailler. Car, d’après lui, c’est le minimum requis dans un organe. «Les gens sont démotivés, personne n’a le cœur au travail, le leadership est au plus bas, on ne sent pas la présence de la tutelle», fustige-t-il. En évoquant les conditions de travail, on perçoit la frustration des agents.
Ces derniers ne peuvent pas s’empêcher de dénoncer le traitement disproportionné entre leur organe et les autres médias du service public (la Rts et le Soleil). Ils soutiennent qu’il est inimaginable qu’on ait dans une rédaction du mal à trouver un stylo ou une feuille blanche. Si on en croit M. Faye, c’est la situation qui se vit dans cette rédaction. Appuyant les propos du journaliste, un des photographes de l’Aps confie que même l’achat des piles pour l’appareil photo pose problème. «Quelque fois même, on est obligé de sortir de notre poche pour acheter ces matériels pour le boulot alors qu’on est mal payé», ajoute-t-il. Quid du traitement salarial ? Là aussi, les travailleurs soutiennent que de tous les agents des médias du service public, ils sont les plus mal payés. Pour eux, tout comme les conditions de travail, cet aspect aussi doit être revu parce qu’il faut être motivé pour travailler.
«Indigne d’une agence de l’Etat»
Pour exiger plus de considération et d’importance de la part des autorités du pays, comme elles le font avec les autres médias du service public, les travailleurs sont prêts à aller jusqu’au bout de cette lutte. Selon Adama Diouf Ly, cela fait 3 ans qu’ils essayent d’attirer l’attention des autorités sur leurs conditions, mais jusqu’à présent rien n’a été fait. «On a formé un bloc, on écoute notre syndicat, s’il y a lieu d’arrêter le travail on va le faire pour avoir gain de cause. Ce qui nous intéresse le plus, c’est d’être traité au même pied que les autres médias publics», a-t-elle dit. Du côté de la section du Syndicat des professionnels de l’information et de la communication (Synpics) de l’Aps, l’on informe que la seule nouveauté c’est la mission d’audit de l’inspection générale des finances qui a commencé il y a 3 jours. Ce qui, d’après son secrétaire général, Ousmane Ibrahima Dia, est une bonne chose. Sans toutefois préciser que la principale revendication reste l’amélioration des conditions de travail et la revalorisation des salaires. «On est prêt à tout, et on est conscient que le combat va durer longtemps», a-t-il dit. Pour l’heure, le travail a repris en attendant l’Assemblée générale prévue lundi prochain, au cours de laquelle la base déterminera la suite à donner à ce combat.