Dans le cadre de son combat contre le Président Macky Sall et pour la libération de son fils Karim, la coalition dirigée par Me Abdoulaye Wade a adressé une lettre à Barack Obama et François Hollande. Ainsi, le Front patriotique pour la défense de la République (Fpdr) demande aux chefs d’Etat français et américain de se prononcer sur la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) qu’il estime illégale, en engageant des experts.
Alors qu’ils ont donné rendez-vous au peuple dans la rue pour tous les mercredis, les membres du Front patriotique pour la défense de la République (Fpdr) se sont retirés hier dans la salle de réunion du Parti démocratique sénégalais pour échanger avec la presse. «On l’avait dit pour conquérir le droit de manifester. Elles (les autorités) nous l’ont rendu», a rétorqué Oumar Sarr. Le coordonnateur du Front, Mamdou Diop Decroix, étant toujours alité, c’est Me El hadji Amadou Sall épaulé par le second de Wade, qui a partagé la lettre ouverte datée du 10 février 2015 que leur coalition a adressée aux Présidents français, François Hollande, et américain, Barack Obama. Abdoulaye Wade et ses partisans demandent à ces «Etats amis d’accepter d’envoyer deux juristes au Sénégal». Leur mission «d’assistance technique» consistera à répondre à la question suivante : «La Crei (Cour de répression de l’enrichissement illicite) est-elle une juridiction fiable qui respecte les droits de l’Homme ?» Ces experts étudieront donc le fonctionnement de la Cour, qui est en train de juger Karim Wade. Ils permettront, disent-ils, aux Présidents de deux puissances occidentales ciblées «d’émettre un avis».
Karim, le candidat du Pds en 2017 ?Toutefois, les partisans de l’ancien chef de l’Etat sénégalais ont déjà le leur sur la Crei. «Elle (la Crei) est aux antipodes des principes démocratiques. Elle a été ignorée pendant 30 ans avant d’être ressuscitée par le Président Macky Sall. Il a voulu ressusciter un Tribunal politique pour se débarrasser d’adversaires politiques», déplorent les Libéraux et leurs alliés. Pour ces derniers, «Karim Wade est le candidat de plus populaire d’un sondage réalisé par le cabinet Intercom, en 2014», ont-ils mentionné dans leur correspondance. Le Pds et ses alliés insinuent de plus en plus un éventuel choix porté sur Wade-fils pour l’élection présidentielle de 2017. D’ailleurs, ils ont fait part aux destinataires de leur missive que la Crei pourrait lui empêcher de se présenter. «Si la Cour va jusqu’à dire que Karim Wade ne sera pas candidat, nous empêcherons Macky Sall d’être candidat. Nous espérons que nous n’en arriverons pas là», a martelé Oumar Sarr. D’ailleurs, le Fpdr invite ainsi ces chefs d’Etat à «prodiguer des conseils au Président Macky Sall». Sur la légitimité d’une telle invite, cette coalition de l’opposition a rappelé que Washington avait aidé à élaborer un Code électoral consensuel dans les années 1990. En outre, Abdoulaye Wade, candidat sortant et contesté, avait sollicité l’expertise de juristes français pour justifier la légalité de sa participation à l’élection présidentielle de 2012. C’était dans un cadre privé. «Le Conseil constitutionnel nous avait donné raison», s’est tout de même réjoui Me El Hadj Amadou Sall.
Les motifs de la récusation de Henri Grégoire Diop Pour ce cas précis, le Fpdr se désole que l’actuel chef de l’Etat ait lancé la traque des biens mal acquis malgré la disponibilité exprimée par Wade de l’aider. Ce faisant, «entouré de conseillers connus pour leur adversité à Abdoulaye Wade, il a ressuscité la Crei», interdit de sortir du territoire national certains proches de l’ancien Président «sans qu’aucune action judiciaire ne soit intentée contre eux à ce jour», ceci en dépit de la position de la Cour de justice de la Cedeao. Dans la composition de la Cour qui traite l’affaire Karim Wade, un magistrat dérange les Libéraux. Il s’agit de son président Henri Grégoire Diop. Me El hadj Amadou Sall a livré hier les motifs qui ont amené les avocats de la défense à déposer auprès de la Cour suprême «une requête aux fins de sa récusation». Pour l’avocat, ce juge entrave «des droits de la défense». Il a violé «la présomption d’innocence». Il a requis «la force publique pour faire comparaître leur client de force». Il se trouve que les plaidoiries démarrent lundi prochain. «Nous espérons que la Cour suprême va statuer avant les plaidoiries et non pas a posteriori», prie Oumar Sarr. Quoi qu’il en soit, Me Sall a réitéré que ses collègues ne reviendront pas à la barre «tant que les conditions d’un procès équitable ne seront pas garanties».
Troisième faux bond de Wade
Lundi dernier, Abdoulaye Wade avait promis de se rendre au Palais de justice pour assister au procès de son fils. Avec cette annonce, la salle d’audiences de la Crei était à moitié remplie. Cependant, le Libéral en chef avait fait faux bond. La veille, il avait annoncé une conférence de presse à son domicile après avoir rencontré des délégations du Front patriotique pour la défense de la République (Fpdr) et de l’Union des jeunesses travaillistes libérales (Ujtl). Le pape du Sopi avait encore reporté le rendez-vous avec les journalistes. Hier, ses collaborateurs avaient précisé qu’il allait animer la rencontre avec la presse, à la permanence Omar Lamine Badji. Rien que l’ambiance indiquait que le secrétaire général du Pds ne serait pas présent. Et il en avait été ainsi. En lieu et place de Me Wade, Oumar Sarr et Me El hadj Amadou Sall ont assuré le service, sans apporter la moindre précision sur l’absence de leur leader.