La Banque Mondiale a affiché hier ses inquiétudes par rapport aux dépenses communes qui ont connu une hausse et déjà atteint les 13% du budget 2015, mais aussi par rapport au PSE et la faible implication du secteur privé.
La Banque mondiale a des inquiétudes à propos de la loi de finance 2015, notamment en ce qui concerne les dépenses communes de l’Etat du Sénégal. Elles ont été exprimées hier par Philip English, l’économiste en chef, responsable de la Banque Mondiale pour le Sénégal, lors d’un point économique organisé par la Direction de la Prévision et des Etudes Economiques (DPEE). M. English faisait un exposé sur le rapport semestriel de la Banque mondiale sur la situation du Sénégal dont l’intitulé est : ‘’Apprendre du passé pour un meilleur succès du PSE’’. Il soutient que l’augmentation des charges communes ne milite pas pour la transparence budgétaire.
‘’Je félicite le gouvernement d’avoir fait plusieurs séminaires de formation pour les journalistes sur l’accessibilité de l’information budgétaire. Mais, je m’inquiète un peu de la taille des charges communes qui a augmenté sensiblement ces dernières années et qui a atteint l’ordre de 13% du budget. C’est difficile, sinon impossible pour un journaliste de savoir ce qu’il y a dedans’’, a-t-il prévenu. Selon l’économiste, si le budget est bien évalué et bien aligné avec les priorités de l’Etat, il faut savoir dans quel secteur il est alloué. ‘’Ce qui n’est pas possible pour les charges communes’’, a dit M. English.
Le secteur privé doit financer le PSE
En outre, l’économiste considère que l’Etat a un rôle important à jouer, pour faciliter le climat des affaires. Il soutient qu’il revient au secteur privé de financer tout l’investissement nécessaire, pour augmenter sensiblement le taux de croissance. Car, selon le rapport de la Banque mondiale, les investissements publics ne pourront pas, à eux seuls, amener le taux de croissance économique au niveau souhaité et que la réussite du PSE va dépendre de l’adhésion du secteur privé. ‘’Le gouvernement n’a pas tous les moyens. Il faut dialoguer avec le secteur privé, répondre aux problèmes et faciliter les procédures et le cadre de l’investissement’, exhorte l’économiste.
Pour lui, le gouvernement a toujours compté sur ses propres moyens. Alors que le PSE met beaucoup l’accent sur une augmentation importante des investissements publics dont l’efficacité fait défaut. ‘’On voit que dans le passé, l’efficacité de l’investissement public était assez faible et n’a pas donné le taux de croissance souhaité. Donc, on s’inquiète un peu d’une augmentation rapide de l’investissement public. On voudrait que les autorités prennent le temps de bien évaluer tout le projet et s’assurer que ce sont des projets fiables bien conçus qui vont donner les résultats escomptés’’, préconise M. English.
Selon la Banque mondiale, il est impérieux de faire une analyse coût-bénéfice, dans le cadre de la mise en œuvre du PSE. Dans ce sens, un investisseur privé va prendre le soin de bien préparer ses dossiers avant de mettre son argent. Il va avoir plus d’incitation personnelle à s’assurer que les investissements sont bien faits. De l’avis de Philip English, il y a un peu moins de risques, quand on promeut l’investissement privé par rapport à l’investissement public.
La masse salariale du Sénégal supérieure à la norme de l’UEMOA
Par ailleurs, le responsable de la Banque Mondiale pour le Sénégal juge le niveau de la masse salariale du Sénégal, par rapport aux recettes publiques, supérieure à la norme communautaire fixée par l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA). ‘’La masse salariale se situe à 46,3% des recettes, alors que la norme fixée par l'UEMOA est de 35%. Cette hausse s’explique par l'augmentation des indemnités des agents de l'Etat’’, souligne-t-il.
En outre, Philip English estime qu’il faut améliorer le climat des affaires pour permettre aux sociétés industrielles d'exploiter plus que 70% de leurs capacités. D’où l’urgence de ‘’sauver les investissements privés qui existent d’abord, finaliser les investissements en cours, assurer la rentabilité des investissements, et développer le tourisme qui est en baisse, depuis 2002’’.
Les facteurs de croissance
Selon le rapport de la Banque mondiale, les exportations et les services sont susceptibles d’être les moteurs principaux de la croissance. Car le marché sénégalais est très étroit et peut s’étendre, en exploitant mieux des opportunités régionales et mondiales. ‘’Les exportations doivent être stimulées par la suppression de certaines contraintes dans les secteurs clés tels que l’horticulture et l’exploitation minière. Les secteurs de la pêche et de l’arachide requièrent une attention beaucoup plus immédiate afin d’éviter un déclin qui pourrait sérieusement freiner l’économie. Les services continuent à dominer l’économie et devront jouer un rôle central dans la croissance économique’’, note le texte. En outre, le secteur du tourisme reste la première source de devises, mais il a été négligé, selon la Banque mondiale.
Les TIC détiennent un potentiel de croissance très important, tandis que les services tels que l’éducation, la santé et le commerce peuvent contribuer aux exportations. De son côté, l’agriculture, une activité relevant du secteur privé, selon le rapport, reste pour la majorité des pauvres la source de substance, avec un potentiel resté jusque-là sous-exploité, bien que sa part du PIB soit faible et qu’il soit possible qu’elle diminue. ‘’Force est de constater que les exportations horticoles ont déjà fait preuve de leur compétitivité et que le riz jouit d’un grand marché intérieur. Mais ce marché est encore dominé par les importations. Ces deux sous-secteurs dépendront en grande partie d’un recours plus large à l’irrigation’’, selon le texte.