Elle porte un jean bleu qui a du mal à cacher ses formes généreuses, un top fleuri et un voile bleu gracieusement noué sur la tête. Fardée à outrance, elle dandine au rythme de sa jeunesse. Comme toutes les petites filles de son âge, Anna vit pleinement son époque. Accompagnée d’un jeune homme visiblement plus âgé qu’elle, elle rigole de temps à autre des propos de son compagnon.
«C’est mon petit ami», renseigne t-elle après lui avoir bombardé de questions. «Vous voyez, je n’ose même pas lui tenir la main dans la rue. Pourtant je suis tentée de le faire des fois. Mais comment avec les commentaires malsains et tous ces regards d’autrui? », se demande Anna, sur un air dépité.
Jeune et séduisante, Anna est souvent handicapée par son voile. Une situation qui pose la relation entre les femmes voilées et les hommes. Est-ce que les «ibadous» ont des «petits amis»? Comment elles vivent leurs relations amoureuses? Comment les jugent la société? Autant de difficultés auxquelles elles sont confrontées dans leur quotidien.
Interpellé à se prononcer sur la question, Ibrahima Diop dira : «c’est vrai que «les ibadous» sont des êtres humains comme nous tous, mais ce n’est pas beau de les voir en compagnie des hommes. Je pense qu’elles peuvent avoir des copains, mais ne doivent pas sortir avec eux. Ils doivent se limiter à des visites amicales en présence des gens de la famille. Sinon, on ne sait jamais avec les tentations», pense t-il.
«En plus une femme voilée doit choisir son partenaire. Sinon ce serait contradictoire d’être «ibadou» et de fréquenter un voyou. Je suis une fois sorti avec une fille voilée mais quand j’ai su que je ne pouvais même pas l’embrasser j’ai aussitôt rompu avec elle. Parce que je sais qu’il faut tant bien que mal être sérieux avec elle» ajoute t-il.
Aissatou est une femme voilée depuis plusieurs années, mariée et mère d’un petit garçon elle raconte sa relation amoureuse avec celui qui est devenu son mari. «On s’est connu quand j’étais à l’université par l’intermédiaire d’un ami commun. Nous sommes sortis près de trois ans ensemble. Tantôt il venait chez moi tantôt c’était des sorties au restaurant, à la plage, des promenades etc. Cela s’est passé ainsi jusqu’à ce que je devienne son épouse.»
Le point de vue de l’Islam. De l’avis de Outaz Iran Ndao, islamologue et animateur religieux à la Sen Tv, une femme voilée doit être en adéquation avec la religion musulmane. C'est-à-dire respecter tout ce que l’Islam dit dans le Saint Coran à propos de la femme.
«Aux yeux de l’Islam il n’y a pas de règle valable pour une femme voilée ou d’autres qui ne le sont pas. La femme doit être tout simplement pudique de par son habillement, son comportement et ses actes. Si un homme aime une femme, il peut l’appeler au téléphone. S’il ne peut pas se limiter à la relation téléphonique, il le trouve chez elle. Mais à condition qu’il ait quelqu’un en leur compagnie (témoin)», pense t-il.
Avant de s’insurger contre une certaine catégorie de «voilées» «il y’a certaines femmes qui se cachent derrière le voile pour attirer les hommes. On ne peut pas être mauvais et montrer une autre facette à l’extérieur. Tôt ou tard la vérité éclatera. Donc je conseille à ces dernières d’être sincères dans ce qu’elles font. Parce qu’aussi, mieux vaut faire du bien et avoir la grâce divine que de chercher la grâce des êtres humains».
Si Oustaz Iran Ndao déplore les amourettes chez les femmes voilées, d’autres plus indulgents et moins religieux pensent que les «ibadous» sont des êtres humains . Ils peuvent tomber amoureuses et vivre librement avec leurs copains. Quoiqu’il en soit, force est de constater qu’au Sénégal les «ibadous» sont surveillées de près. Leurs moindres faits et gestes sont suivis.