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Le Soleil N° 13092 du 16/1/2014

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Macky Sall à la rentrée des cours et tribunaux : « la lutte contre la délinquance économique et financière est une exigence du peuple »
Publié le vendredi 17 janvier 2014   |  Le Soleil


Macky
© Autre presse
Macky Sall
Président de la République du Sénégal


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Le président de la République prône des sanctions plus dissuasives telles que les fortes amendes ou la confiscation totale des biens des délinquants à col blanc. Il dit attendre de ses collaborateurs et de tous ceux qui participent à la gestion des ressources publiques « un comportement irréprochable ». « La lutte contre le fléau de la corruption et son corollaire, l’enrichissement illicite, la lutte contre le blanchiment de l’argent sale, contre le financement du terrorisme, en somme contre la délinquance économique et financière, est une exigence du peuple sénégalais », a déclaré Macky Sall, hier, lors de la rentrée solennelle des Cours et tribunaux. C’est pourquoi, il dit attendre de ses collaborateurs et de tous ceux qui participent à la gestion des ressources publiques, « un comportement irréprochable et à la hauteur des aspirations et attentes des Sénégalais ». Le président Sall a indiqué qu’aucun effort ne sera ménagé dans ce combat pour l’éthique et la bonne gouvernance et qu’aucun écart ne sera toléré. « Notre volonté politique à cet égard est sans faille », a-t-il lancé. Le chef de l’Etat a rappelé que la lutte contre la délinquance économique et financière est « un des aspects majeurs » de son programme gouvernemental, c’est-à-dire la « gouvernance transparente et vertueuse ». « Le traitement judiciaire de la délinquance économique et financière est un sujet qui exprime bien mon engagement sans faille pour une gestion saine, sobre, rationnelle et efficiente des ressources publiques au profit de tout le peuple sénégalais », a-t-il rappelé, en soulignant que ces efforts sont reconnus, aujourd’hui, par le Groupe intergouvernemental d’action contre le blanchiment d’argent en Afrique de l’Ouest (Giaba). Macky Sall a encore rappelé les différentes initiatives prises, au plan international, pour lutter contre le phénomène.

Le dernier mot doit revenir à la justice
Il a cité, entre autres, le code international de conduite des autorités publiques du 12 décembre 1996, la déclaration des Nations unies contre la corruption active et passive du 16 décembre de la même année et la Déclaration de Dakar adoptée lors du séminaire régional ministériel sur le crime organisé et la corruption du 23 juillet 1997. Des instruments que le Sénégal a intégrés dans son arsenal juridique.
S’agissant des commentaires suscités par la lutte contre les détournements de deniers publics, d’escroquerie portant sur les deniers publics, d’enrichissement illicite, de blanchiment d’argent, etc., le chef de l’Etat estime que ce débat est normal. « Beaucoup de commentaires, de complaintes, notamment de la part des personnes visées par les actions en justice, sont enregistrés. Quoi de plus normal dans un Etat de droit », a-t-il affirmé. Mais, il soutient que le dernier mot doit revenir à la justice. « Cette institution (…) devra observer, de façon stricte et sans faiblesse, les règles de procédure et de droit pénal qui gouvernent la matière », a-t-il indiqué.

Concilier rigueur de l’instruction et présomption d’innoncence
Le président Sall a insisté, dans son discours, sur « la nécessité de concilier la rigueur de l’instruction et le respect des droits des personnes poursuivies, notamment la présomption d’innocence et le droit à un procès équitable ». A l’image des autres intervenants, il a reconnu la nécessité de mettre en place des juridictions ou de sections spécialisées avec des magistrats hautement qualifiés dans ce domaine, pour mieux lutter contre la délinquance économique et financière. Il a aussi suggéré une collaboration plus étroite entre magistrats, auxiliaires de justice et experts de tous ordres, notamment des douanes, des impôts et domaines, de la finance, etc.

Fortes amendes et confiscation des biens
Macky Sall a également prôné de fortes amendes et la confiscation des biens pour dissuader les délinquants à col blanc. « Le délinquant financier qui pose des actes répréhensibles, dans le seul but de s’enrichir, devrait, parallèlement à la peine d’emprisonnement, subir une condamnation pécuniaire de nature à l’appauvrir à la mesure de son enrichissement, voire davantage », a-t-il dit. « Ce qui est certain, c’est que si les peines d’emprisonnement et d’amende sont, du point de vue de l’impact, inférieures à son gain, il n’hésitera point à accomplir son forfait », a-t-il ajouté. Le président de la République mise également sur la prévention. Il souligne que la mise en place d’instruments juridiques et de structures comme la loi du 27 décembre 2012 portant code de transparence dans la gestion des finances publiques, la création de l’Office National de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac) et le projet de loi sur la déclaration de patrimoine qui est actuellement sur le bureau de l’Assemblée nationale entrent dans le cadre des stratégies de réduction des opportunités de corruption. « L’objectif est de faire preuve de transparence et de lever ainsi toute équivoque sur l’état du patrimoine de toute personne participant à la gestion de la chose publique. Le contrôle n’en sera que plus aisé », a-t-il soutenu.

Vers la création d’une école des avocats au Sénégal

Pour l’administration d’une bonne justice s’appuyant sur une parfaite connaissance du droit, le Bâtonnier de l’Ordre des avocats du Sénégal a plaidé, hier, pour la création d’une école des avocats qui prendra en charge la formation d’élèves-avocats, des avocats stagiaires ainsi que la formation continue des avocats en exercice. Pour lui, l’appui de l’Etat à la réalisation de ce projet est indispensable « s’il y a une réelle volonté de voir le barreau s’élargir, se professionnaliser davantage et accompagner le déploiement de l’appareil judiciaire dans tous les régions et départements du Sénégal ». Ce plaidoyer a été bien accueilli par le président de la République qui, a réaffirmé « la volonté non équivoque de l’Etat d’accompagner tous les acteurs de la justice ». Me Ameth Bâ a aussi invité le gouvernement à faire intégrer, au titre des priorités stratégiques, la correction des inégalités judiciaires en apportant une assistance juridique à toutes les personnes qui en ont besoin, en matière civile comme pénale. « Mobiliser davantage de ressources et à temps serait une décision hautement appréciée des justiciables et des personnes chargées d’assurer leur défense pour une justice plus efficace et plus humaine », a-t-il déclaré.

MAMADOU BADIO CAMARA, PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR SUPREME : « Le pari du traitement des affaires dans un délai raisonnable est pratiquement gagné »
Le Procureur général près la Cour suprême, Mamadou Badio Camara, a affirmé, hier, que cette juridiction a gagné le pari de la célérité dans le traitement des dossiers. Statistiques à l’appui, il a indiqué que sur 355 affaires reçues en 2012, il n’en restait que 3 à juger. « Le pari de la célérité et du traitement des affaires dans un délai raisonnable est pratiquement gagné. C’est pour nous une obligation conventionnelle et légale, mais aussi morale », a-t-il déclaré.
Mamadou Badio Camara révèle que les affaires de l’année 2013 en cours de finalisation confirment la tendance à la hausse du nombre d’affaires reçues par la Cour suprême. En fait, la Cour suprême s’est imposée le jugement des affaires reçues dans délai maximum de 12 mois alors que ce délai était de 3 à 5 ans en moyenne, a expliqué M. Camara. Il analyse la hausse des dossiers enregistrés au rôle de la Cour suprême comme « le signe d’une confiance accrue de la part des justiciables ». C’est pourquoi, il a plaidé pour le maintien de cet acquis. Malgré ces résultats, Mamadou Badio Camara rappelle que la commission d’indemnisation chargée d’examiner les demandes de dédommagement des personnes ayant fait l’objet d’une détention provisoire et qui bénéficient par la suite d’une décision de non lieu, de relaxe ou d’acquittement et le bureau de l’aide juridictionnelle ne sont pas encore opérationnels « faute de mesure d’accompagnement d’ordre législatif ou réglementaire ». « La Cour suprême est prête à formuler des propositions concrètes afin que ces innovations significatives deviennent une réalité dans son activité quotidienne », a dit M. Camara. Dans son discours, le Procureur général a rendu un vibrant hommage au premier président de la Cour suprême Papa Oumar Sakho.

LE JUGE ADAMA NDIAYE SUR LA DELINQUANCE ECONOMIQUE ET FINANCIERE : « Le recouvrement des biens détournés ou dissipés constitue une plus grande sécurité juridico-judiciaire »

Dans son discours d’usage, à l’occasion de la Rentrée solennelle des cours et des tribunaux, le conseiller à la Cour Suprême, Adama Ndiaye, a déclaré que le recouvrement des biens dissipés constitue un moyen de lutte contre la délinquance économique et financière. Pour lui, le recouvrement de ces biens entraîne une meilleure attractivité économique du Sénégal, une plus grande sécurité juridico-judiciaire.

Le juge Adama Ndiaye, conseiller à la Cour Suprême, a affirmé, hier, que le recouvrement des biens dissipés ou détournés constitue un moyen de lutte contre la délinquance économique et financière. Il s’exprimait à l’occasion de la rentrée solennelle des cours et tribunaux portant sur : « Le traitement de la délinquance économique et financière ». Le juge souligne que la délinquance économique et financière recouvre une gamme d’infractions aux lois, des violations des normes techniques comptables, financières ou économiques commises à une échelle nationale ou transnationale par des personnes physiques ou morales, et entraînant une désynchronisation de l’ordre public économique et financier. « Pour le commun des mortels, dit-il, il l’entend que comme l’existence et la répression des infractions aux règles de gestion des finances publiques ».
Pour le juge, la répression n’est pas le seul moyen permettant d’atteindre le véritable but de toutes ces procédures, qui est la cessation du trouble causé à l’ordre public économique. Il considère que le recouvrement des biens détournés ou dissipés peut être une alternative favorisant une meilleure attractivité économique du Sénégal. A son avis, ce mode alternatif pourrait garantir la transparence dans la gestion des finances publiques et assurer un développement harmonieux des affaires et un ordre économique et financier sécurisé. Il soutient aussi que d’autres modes de règlement de la délinquance économique et financière annihilant les effets pernicieux d’un procès mécanique peuvent avoir des effets réels sur les acteurs économiques. Cependant, il reconnaît que certains demeurent « problématiques » même si, au plan textuel, la possibilité d’opter pour ces modes de règlement des litiges existe et est légalement reconnue au procureur de la République et au juge. Il précise que le code de procédure pénal, le code des Douanes et le code général des Impôts prévoient la transaction. Le juge Adama Ndiaye souligne que la médiation pénale est également prévue.

Médiation pénale
S’agissant du recouvrement, le conseiller à la Cour Suprême a fait remarquer qu’il « est souhaitable que tout mode alternatif de règlement soit fait sous l’égide d’un juge ou au moins d’un parquet ». « Un recouvrement réalisé en secret risque d’être en contradiction avec l’esprit des normes de déontologie contenues dans la loi de 2012 portant Code de transparence, dans la gestion des finances publiques », a-t-il déclaré. « Cette loi a permis au Sénégal de transposer dans son droit interne la Directive de l’Uemoa de 2009 portant Code de la transparence dans la gestion des finances publiques au sein de l’Uemoa, et donne à la lutte contre la délinquance économique et financière une dimension préventive salvatrice », a-t-il poursuivi.
La conviction du juge est que les résultats d’une « démarche discrète » sont parfois moins dommageables que ceux découlant des prétoires. « Ces derniers sont souvent considérés, à tort ou à raison, comme des lieux où l’honneur des mis en cause n’est pas toujours bien préservé. Le législateur sénégalais a toujours cherché l’efficacité discrète hors des prétoires », a estimé le conseiller. Pour ce dernier, le recouvrement, avant poursuite et jugement de biens dissipés ou détournés, permet d’éviter, « d’une part, des pertes de temps générées par des procès souvent gangrenés par toutes sortes de dilatoires ou autres difficultés de fond et de forme et, d’autre part, une mauvaise publicité pouvant entraîner une fuite des capitaux et une délocalisation des entreprises ». Selon lui, le traitement judiciaire de la délinquance économique et financière ne peut atteindre les cimes de l’efficience s’il n’articule pas une osmose entre un dispositif répressif et préventif ».

Des contraintes relevées dans la détermination de l’infraction

Le conseiller à la Cour Suprême a également relevé des contraintes dans l’exercice des pouvoirs des juges en matière de délinquance économique et financière et de blanchiment d’argent.

Le juge Adama Ndiaye a évoqué quelques contraintes dans la détermination des infractions sur la délinquance économique et financière et le blanchiment de capitaux. « Il peut surgir, a-t-il noté, à l’occasion de l’exercice des fonctions des juges, des difficultés relatives à la prescription de l’action publique, au respect de certaines principes, des exigences ou des garanties comme le double degré de juridiction, les droits de la défense, la présomption d’innocence, les immunités ou privilèges, etc. ». Il a ajouté que des entraves à leur liberté d’appréciation, des écueils découlant de la subordination hiérarchique des magistrats du parquet principaux pourvoyeurs de dossiers, des atermoiements générés par la dispersion normative, ou par leur non-spécialisation peuvent aussi se manifester. Pour certaines infractions instantanées, a-t-il indiqué, le fait de faire courir la prescription le jour de la commission des faits risque de laisser hors du champ de la répression des actes délictueux souvent dissimulés durant de nombreuses années. D’ailleurs, pour des considérations d’efficacité, il a souligné que les juges ont été amenés à faire courir le délai de prescription de l’action publique le jour où le fait délictueux a été décelé ou révélé ou a pu être constaté dans des conditions permettant l’exercice de l’action publique.
Pour M. Ndiaye, une telle position est pertinente dans la mesure où les faits qui sous-tendent des délits comme l’abus de biens sociaux, le détournement de deniers publics ne sont découverts qu’au moment des changements de dirigeants sociaux, économiques ou politiques qui, eux-mêmes, utilisent, pour ce faire, couramment des audits. D’ailleurs, a-t-il précisé, ils sont appelés délits dissimulés à cause de leur caractère occulte passager et du temps considérable qui peut s’écouler entre leur commission et leur découverte.
Au demeurant, le juge Adama Ndiaye fait remarquer que toutes ces contraintes de fond et de forme peuvent aussi être rencontrées quand la délinquance économique et financière est prise en charge, sous d’autres qualifications, par des juridictions singulières comme, par exemple, la Cour de répression et de l’enrichissement illicite (Crei) et la Haute Cour de justice. Il donne l’exemple de l’aliéna 2 de l’article 163 bis du Code pénal qui dispose que « le délit d’enrichissement illicite est constitué lorsque, sur simple mise en demeure, une des personnes désignées ci-dessus se trouve dans l’impossibilité de justifier l’origine licite des ressources qui lui permettent d’être en possession d’un patrimoine ou de mener un train de vie sans rapport avec ses revenus légaux ». Selon lui, tout porte à croire que le législateur de 1981, en différant la constitution du délit d’enrichissement illicite après la mise en demeure, voulait éviter de laisser en dehors du champ de la répression des faits frauduleux commis et occultés par leurs auteurs quand ils avaient des responsabilités.

TRAQUE DES BIENS MAL ACQUIS : Le Bâtonnier plaide pour la poursuite et l’évaluation de l’initiative

Le Bâtonnier de l’Ordre des avocats du Sénégal, Me Ameth Bâ, a défendu l’idée de poursuivre la traque des biens et son évaluation, ainsi que la moralisation de la gestion des derniers publics. Selon lui, de telles options doivent devenir « irréversibles».
Dans son intervention, le bâtonnier de l’Ordre des avocats du Sénégal, Me Ameth Bâ, a souligné la nécessité de poursuivre la traque des biens mal acquis. « Que l’on s’entende bien ! Il n’est nullement question pour moi de prôner l’abandon de la traque des biens ou la renonciation à la moralisation de la gestion de derniers publics », a-t-il déclaré, à l’occasion de la rentrée solennelle des cours et tribunaux. Il estime que de telles options doivent devenir « irréversibles ». C’est pourquoi, il s’est félicité de la décision du président de la République, Macky Sall, de faire de la reddition des comptes « un crédo », conduisant « à mettre dans le viseur plusieurs dignitaires suspectés de s’être considérablement enrichis, au détriment du trésor public ». Selon lui, cette initiative « forte et inédite » du chef de l’Etat doit être saluée.
Toutefois, il a insisté sur la pertinence d’évaluer cette initiative. « Dans les démocraties, les politiques, dans tous les domaines, sont constamment discutées, scrutées par des personnes ou des organes ayant reçu le mandat de le faire, sans que nul ne s’en offusque. Il ne serait pas inutile de susciter une réflexion des personnalités compétentes et intègres pour évaluer la traque des biens mal acquis telle que pratiquée sous nos cieux, pour en déceler les forces et les faiblesses », a-t-il dit. En outre, il a rappelé l’impérieuse nécessité de s’inscrire dans l’assainissement des mœurs de « nos responsables publics qui exercent directement ou indirectement des charges, des fonctions les conduisant à la gestion de deniers publics ». Me Bâ, au nom de l’Ordre des avocats du Sénégal, a salué les signes « encourageants et la réelle détermination du chef de l’Etat d’instaurer une gouvernance vertueuse de la chose publique ».

Délinquance financière
Abordant le thème de cette rentrée judiciaire, le bâtonnier a défendu l’idée de la définition d’une véritable politique criminelle de lutte contre la délinquance économique et financière impliquant l’ensemble des segments de la société, dans le cadre d’un « dialogue sociétal franc et ouvert ». « Si nous voulons développer ce pays, promouvoir les valeurs cardinales tenant lieu de socles d’une société dynamique, il n’y a pas d’autre choix que de lutter de manière ferme et intransigeante contre la délinquance, sous toutes ses formes, pour une nouvelle éthique de la culture de la citoyenneté fondée sur la culture de l’honnêteté, de l’intégrité et du mérite », a-t-il ajouté. Il estime que pour faire face à la délinquance et à la corruption, « il est crucial de promouvoir les clauses anti-corruption à insérer dans les contrats, les chartes éthique et d’impliquer les entreprises du secteur privé et les organisations de la société civile ».
Pour Me Bâ, la criminalité économique et financière a des effets négatifs réels sur la dignité humaine et le devenir des sociétés. Cela, du fait qu’elle « menace la paix et la stabilité de nos organisations, fausse le libre jeu de la concurrence et compromet la bonne administration de la justice et le développement de qualité ». Toutefois, le Bâtonnier indique que la corruption doit être envisagée dans sa globalité pour être combattue de manière efficace. D’où, a-t-il dit, la pertinence d’une politique criminelle cohérente et crédible, cernant « la parenté évidente reliant la corruption à la traque des biens mal acquis ».

LUTTE CONTRE LA DELINQUANCE ECONOMIQUE : Magistrats et avocats pour la création de juridictions spécialisées

Le premier président de la Cour Suprême, le conseiller à la Cour Suprême, le bâtonnier de l’Ordre des avocats du Sénégal ont préconisé, hier, à l’occasion de la Rentrée des Cours et tribunaux, la création de juridictions spécialisées en matière de lutte contre la délinquance économique et financière.

Le juge Adama Ndiaye, conseiller à la Cour Suprême, a suggéré, hier, à l’occasion de la rentrée des cours et tribunaux, la création des juridictions spécialisées en matière de lutte contre des infractions de délinquance économique et financière et des délits connexes. Selon lui, la plupart des juges n’acquièrent une formation que dans le tas de la polyvalence systémique. Il souligne que les juges font recours à des experts pour mieux cerner les notions comptables ou fiscales à manipuler. Il pense que la création de juridictions spécialisées permettrait d’y remédier et éloignerait également la défiance délétère, source de conflits, qui conduit souvent des hommes d’affaires ayant maille à partir avec la justice à traiter, avec une condescendance mal venue, le juge en charge de leur dossier de « juge incompétent ». Dans le traitement de la délinquance économique et financière, selon lui, le juge vit également la pénibilité de la dispersion normative. Le bâtonnier de l’Ordre des avocats du Sénégal, Me Ameth Bâ, a aussi préconisé la création d’un corps de magistrats spécialisés dans le traitement du contentieux économique et financier. « Ces magistrats pourraient être recrutés sur concours parmi ceux qui exercent déjà, formés aux techniques les plus pointues en la matière et bénéficiant d’un régime spécial », a-t-il laissé entendre. Il pourrait s’agir, a expliqué le chef du barreau, d’un pôle économique près le Tribunal régional hors classe de Dakar, qui comprendrait un parquet, un corps de magistrats instructeurs et des juges du siège spécialisés. « La création de ce corps pourrait sonner le glas de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) dont les praticiens n’ont pas eu de cesse de dénoncer les insuffisances et ce qu’ils estiment relever de graves violations des principes d’un procès équitable », a-t-il soutenu.
Le premier président de la Cour Suprême, Papa Oumar Sakho, a lui-aussi insisté sur la nécessité d’avoir des juges « économistes en puissance susceptibles d’interpréter des concepts économiques » et de se livrer à des raisonnements économiques ». Il faut, a-t-il souligné, « opérer des choix tant sur le plan institutionnel qu’au regard des règles de procédure applicables ». D’ailleurs, Papa Oumar Sakho a reconnu que le législateur sénégalais n’a pas cru devoir créer, comme dans certains pays, des juridictions d’exception relativement à l’organisation et au fonctionnement des institutions chargées d’assurer le traitement de la délinquance économique et financière.

Mamadou GUEYE, Souleymane Diam SY

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