Le trafic de chanvre était à l’honneur hier lors des assises. De lourdes peines ont été prononcées contre Mathurin Aliou et son neveu Abdou Diatta, dans la première affaire. Dans la seconde, seul Moussa Mballo a été condamné à 12 ans de travaux forcés et d’une amende de 12 millions. Son compère El hadj Ibrahim Seck a été acquitté.
C’est bien connu, depuis l’essor des mafias sicilienne et calabraise, ‘’Cosa Nostra’’ ou ‘’Camora’’, la criminalité est avant tout une affaire de famille. Fort de cette conviction, Mathurin Aliou Diabang (50 ans) a décidé de faire de son neveu Abdou Diatta (26 ans) un convoyeur de chanvre indien. Ainsi, sous ses traits de ‘’parrain’’, il a confié un sac de voyage contenant 11 kg de chanvre indien à son neveu pour le livrer à un dénommé Ernest. Interpellés par la police, le 23 février 2009, ils ont été jugés pour trafic de chanvre indien. Après leur procès, ils ont été reconnus coupables et condamnés respectivement à 15 ans d’emprisonnement et à une amende de 5 millions, pour Mathurin Aliou Diabang et 10 ans de travaux forcés exempts d’amendes pour Abdou Diatta.
Devant la barre, Mathurin Alioune Diabang a brisé l’omerta et reconnu être le propriétaire du sac de voyage. ‘’Je l’ai fait venir de Diamaguene à Thiès, pour qu’il vienne rapporter ce sac à un de mes clients qui répond au nom d’Ernest qui vit à Dakar‘’, a-t-il dit avec force. Ainsi, le président s’est tourné vers Abdou Diatta ‘’le capo’’, pour l’interpeller sur le contenu du sac. ‘’Je n’étais pas au courant du contenu de la valise. Je n’ai pas posé de questions sur la contenance de ce sac. Et si je le savais, j’aurais essayé de le cacher’’, a-t-il répondu en s’appuyant sur ses béquilles. Ces propos ont fait réagir l’avocat général. ‘’Pourquoi ne pas avoir dit aux policiers la provenance du sac, lors de votre interpellation. Et pourquoi avoir tenté de cacher le propriétaire de la valise?’’, a-t-il déclaré, en brandissant le PV.
Multirécidiviste
‘’Je n’ai rien caché au policier, c’est que je n’étais qu’un simple convoyeur d’un sac que je devais remettre à un Ernest. Mon rôle s’arrêtait là dans cette affaire’’, a-t-il déclaré, en se tournant vers son oncle. ‘’Qui est Ernest ?’’, a repris le Président. Un long silence s’est installé, avant qu’il ne réponde : ‘’Je ne le connais pas. Mon oncle a dit qu’il allait lui donner mon signalement et qu’il viendrait récupérer la marchandise’’, a lancé Abdou Diatta en baissant les yeux. Et le président d’en rajouter pour demander à Mathurin Diabang la provenance des 106 kg découverts chez lui, après son arrestation. ‘’Depuis 1996, je vais chercher de la drogue en Casamance que je garde chez moi. Ensuite, j’envoie une grande partie à mes clients, à raison de 20 kg à 25 000 francs le kilo.’’
Dans sa plaidoirie, l’avocat général a réclamé une sanction exemplaire, à savoir 40 ans de réclusion criminelle contre un multirécidiviste qui a déjà été condamné à deux reprises pour des affaires de drogue. Son neveu Abou Diatta a déjà purgé 5 ans de prison. L’avocat de Mathurin, Me Ndao a jugé la demande du parquet disproportionnée, en soutenant qu’on est en présence d’un trafic de drogue dure. Il a demandé une sanction clémente pour son client.
Rencontre malheureuse
La criminalité est aussi une affaire de ‘’hasard’’. Une rencontre malheureuse sur la route Mbour-Dakar a jeté El hadj Ibrahima Seck (47 ans), un mécanicien travaillant à Dakar dans les filets de dame justice, depuis cette nuit du 19 juin 2009. En provenance de Mbour, il a transporté un client du nom de Moussa Mballo (49 ans) originaire de Tambacounda qui avait en sa possession trois sacs. Arrivés à Diamniadio, les douaniers ont découvert cachés dans les sacs 80 kg de chanvre indien. Poursuivi pour trafic de chanvre indien, El hadj Ibrahim Seck a finalement été acquitté par la Cour, avec restitution de sa voiture. Son passager Moussa Mballo, propriétaire des sacs, a lui écopé de 5 ans pour contrebande, de 12 ans de travaux forcés et d’une amende de 12 millions avec confusion des peines.
Devant la cour, Moussa Mballo, paysan originaire de Tambacounda, a perdu tous ses moyens. Sous le feu roulant des questions du président du tribunal et de l’avocat général, il s’est perdu dans ses déclarations. Il a été incapable de donner une explication cohérence sur l’origine des 80 kg de chanvre indien et sa vraie destination. Face à ses multiples contradictions, souvent trahi par de longs silences, l’avocat général a requis la peine de 20 ans de réclusion criminelle. L’avocat de Mballo a tenté d’expliquer les nombreuses versions servies par son client, durant toute la procédure, par le fait qu’il ne jouit pas de toutes ses facultés mentales.