Le projet de loi portant statut des ‘’daara’’ doit créer un cadre législatif des ‘’daara’’, devenu ‘’un impératif’’ du fait que ‘’les initiatives institutionnelles entreprises, notamment la création de l’inspection des ‘’Daara’’ et l’accord-cadre entre le ministère de l’Education nationale et les acteurs du sous secteur ''n’ont pas suffi pour relever les défis auxquels celui-ci est confronté’’.
Un projet de loi portant statut des ‘’Daara’’ a été élaboré en février 2014 par les autorités étatiques du Sénégal pour ‘’relever le taux de scolarisation en ouvrant le système éducatif à des centaines de milliers d’enfants qui en sont exclus’’, explique l’exposé des motifs.
Il s’agit également pour l’Etat de répondre au défi de la qualité de l’offre éducative dans le sous secteur en améliorant l’environnement et le contenu pédagogique des enseignements, ainsi que la qualité des personnels enseignant et de direction des ‘’Daara’’.
Pour les autorités étatiques, les motifs de ce projet de loi concerne également l’amélioration de la transparence et l’équité dans le financement et l’appui aux ‘’Daara’’ et répondre en même temps à une demande d’édification de citoyenneté sans distinction entre les enfants issus du système éducatif classique et ceux formés dans les ‘’Daara’’.
Cependant, relève le document du projet de loi, ‘’la réalisation des ambitions de l’Etat pour le secteur fait face à des difficultés et risques majeurs’’.
Entre autres, on cite ‘’un environnement précaire marqué par l’insécurité physique et sanitaire des enfants, la multiplicité des curricula, la prolifération incontrôlée des ‘’Daara’’, l’augmentation de la mendicité et des situations de maltraitance d’enfants’’.
L’Etat veut ainsi offrir aux apprenants dans les ‘’Daara’’ des opportunités d’accès aux savoirs, notamment scientifiques développés dans les programmes de l’école classique.
Le projet de loi portant statut des ‘’Daara’’ vise à faire face à ces enjeux. Il comprend cinq chapitres qui concernent les dispositions générales, les conditions d’ouverture d’un Daara, le programme et le personnel, les financements notamment les subventions, les appuis et autres primes accordés aux Daara, la délivrance des diplômes et certificats, les sanctions et pénalités, les dispositions transitoires et finales.
Le projet prévoit entre autres mesures une scolarisation des élèves selon les trois étapes. D’abord une première étape de trois ans, consacrée à la mémorisation du Coran, ensuite une deuxième étape de deux ans, alliant mémorisation du Coran et programme des classes de Cours d’initiation (CI), de Cours préparatoire (CP) et de Cours élémentaire-première année (CE1).
Il y a enfin une troisième étape de trois ans, réservée aux programmes des classes de Cours élémentaire deuxième année (CE2), de Cours moyen première année (CM1) et de Cours moyen deuxième année (CM2).
Il est également prévu une certification de l'apprentissage du Coran par un inspecteur d'académie.
Le document insiste sur le fait que le Sénégal, à l’instar de la communauté internationale, s’est engagé à la réalisation de l'éducation pour tous (EPT) et particulièrement à la scolarisation universelle à l’horizon 2015.
Dans l’exposé des motifs du projet de loi, il est indiqué que cet engagement est traduit dans l’article 8 de la Constitution qui garantit le droit à l’éducation à tous les citoyens. Pour mettre en œuvre cette obligation constitutionnelle, l’Etat développe et encourage la diversification de l’offre éducative.
La loi 91-22 du 16 portant orientation de l’éducation nationale encourage l’initiative privée. La loi 2004-37 du 15 décembre 2004 est venue la modifier et la compléter pour introduire l’obligation scolaire de dix ans dans le cycle fondamental et prévoit la possibilité pour l es établissements publics et privés de proposer une éducation religieuse optionnelle.
Pour compléter cet arsenal juridique, renseigne le gouvernement, à travers l’exposé des motifs, l’Etat a ainsi élaboré une politique éducative qui prend en compte le sous secteur spécifique des ‘’Daara’’.
La Lettre de politique sectorielle 2013-2025, dont la vision est entre autres de mettre en place un ‘’système plus engagé dans la prise en charge des exclus se fixe comme ambition de ‘’poursuivre le programme de modernisation des ‘’Daara’’.
Cette modernisation se fera à travers les infrastructures, les équipements, les programmes d’enseignement, la formation des enseignants et la protection nutritionnelle et sanitaire des enfants talibés’’.
De même le Programme d’amélioration de la qualité, de l’équité et de la transparence dans le secteur de l’éducation (PAQUET 2013 -2025) recommande de développer des modèles alternatifs de formation à travers entre autres stratégies la modernisation des ‘’Daara’’.
L’Organisation islamique Jamra et l’Observatoire de veille et de défense des valeurs culturelles et religieuses, Mbañ Gacce, saluent l’initiative du gouvernement actuel d’avoir conçu un montage financier avec des institutions bancaires comme la Banque islamique de développement 5BID) pour financer ce ‘’Projet de Réforme des Daara’’. Il n’en regrettent pas moins l’absence de concertation avec les intéressés au premier chef, les maîtres coraniques.
Regroupés dans des associations et fédérations, ils se plaignent d’avoir été laissés en rade.
‘’Le fait que le ministère de l’Education nationale, maître d’œuvre de ce projet, a effectué une tournée d’information auprès des chefs religieux de différentes confréries est certes louable mais insuffisant’’, relève l’ONG Jamra, dans un communiqué de son Bureau exécutif.
Pour les maîtres coraniques, ce projet de loi vise à introduire le français dans l’enseignement coranique au Sénégal. ''Ce qui est anormal, car estiment-ils, il détruit totalement le système de l’enseignement coranique qui est jugent-ils, un des meilleurs systèmes du monde''.