Dakar - Le Sénégal a interdit mercredi la diffusion "par tout moyen" de l’édition du jour de l’hebdomadaire satirique français Charlie Hebdo et du quotidien français Libération qui publient une caricature du prophète Mahomet en Une.
"Il est interdit de distribuer et de diffuser, par tout moyen, les éditions
de ce jour de l’hebdomadaire français +Charlie Hebdo+ et du quotidien français
+Libération+, sur toute l’étendue du territoire national", rapporte l’agence
de presse sénégalaise (APS, publique), citant un communiqué du ministère de
l’Intérieur.
"Les contrevenants s’exposent aux lois et règlements en vigueur", ajoute le
texte.
Aucun journal sénégalais ni site d’information n’avait mercredi reproduit
la Une de Charlie Hebdo, journal non distribué en kiosque dans le pays, mais
disponible dans certaines librairies, dont la rédaction a été décimée le 7
janvier par un attentat revendiqué mercredi par Al-Qaïda dans la péninsule
arabique (Aqpa).
Sur cette Une, un personnage barbu en turban censé représenter Mahomet
tient une pancarte "Je suis Charlie", le slogan des millions des manifestants
qui ont défilé en France et à l’étranger pour condamner les attentats
jihadistes qui ont visé l’hebdomadaire satirique, une policière et un
supermarché casher, faisant 17 morts au total à Paris.
Cette édition, critiquée par de nombreux musulmans, l’islam interdisant le
représentation des prophètes, va bénéficier d’un tirage record de cinq
millions d’exemplaires cette semaine. De nombreux journaux dans le monde ont
reproduit sans attendre cette Une d’un numéro exceptionnel, préparé dans les
locaux du quotidien de gauche Libération.
Le Sénégal, "république laïque" où la presse est libre et les censures de
journaux rares, compte plus de 90% de musulmans. Plusieurs chefs religieux
locaux ont dénoncé les caricatures du prophète par Charlie Hebdo.
Le chef de l’Etat sénégalais Macky Sall, également président de
l’Organisation de la coopération islamique (OCI), a participé à la "marche
républicaine" organisée à Paris dimanche contre "le terrorisme", s’attirant
des critiques dans le pays.
Un billet du journal privé Le Quotidien lundi soulignait que les dirigeants
africains présents "ont voulu se donner une bonne image de protecteurs de
droits et libertés", alors que chacun, y compris M. Sall, "a des dossiers de
violations des libertés élémentaires dans son propre pays".
Une marche dans les rues de Paris ne nous fera pas oublier cela. Au
contraire, Macky aura intérêt à bien faire attention à ses prochains actes,
car on les lui rappellera certainement à la prochaine interdiction !",
prévenait le journal.
De son côté, le quotidien privé Walfadjiri, dont le propriétaire appartient
à une famille religieuse musulmane, assimilait la participation à ce
rassemblement à une approbation des caricatures, déplorant que "Macky marche
avec les caricatures du Prophète", soulignant que "six chefs d’Etat africains
acceptent ce que le Maroc a refusé".
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