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Sud Quotidien N° 6495 du 29/12/2014

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1974 - 2014 - Le Sénégal fête quarante années de Foire: Dakar, l’étincelle de Décembre
Publié le mardi 30 decembre 2014   |  Sud Quotidien


La
© aDakar.com par MC
La Foire Internationale de Dakar bat son plein
Dakar, le 24 Décembre 2014 - La Foire internationale de Dakar se déroule à au Centre International de Commerce Extérieur du Sénégal. Cette 23e édition a démarré le 18 et prendra fin le 29 Décembre 2014.


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En cette fin d’année 2014, Dakar commémore sous les coups de vents capricieux de décembre, les quarante années de sa foire. Placée sous le signe de l’intégration africaine, cette fête du donner et du recevoir, se veut encore comme à ses débuts, comme un levier du développement économique et social pour le Sénégal et la sous-région. Dakar avait accueilli sa première foire internationale du 28 novembre au 15 décembre 1974. A l’époque, ni la Vdn et ses environs, encore moins la ville de Dakar, n’avaient l’ampleur et la démesure que connaît la grande mégapole sénégalaise aujourd’hui. Dakar, ville en fragments. La foire est aussi un symbole à travers la transformation des aires de vie, de l’espace autour, mais également des pavillons. Même un Senghor ressuscité, lui, qui voyait à travers ce bijou, la marque d’un leadership moral imposé sur la sous-région, par son pays, n’y verrait plus rien.

2014 s’achève lentement. Jeudi 25 décembre, lendemain d’un Noël devenu un rituel chrétien et une fête musulmane, la foire de Dakar refuse du monde. A l’entrée, dans les travées de passage pour arriver dans les pavillons, le bruit des énormes baffles, et la cacophonie des discours pour servir ou vendre tout et n’importe quoi, éblouissent le visiteur inhabitué à ce type de vacarme qui ôte dés fois à l’évènement, tout son sens.
Sur les visages, la gueule de bois des nuits bien arrosées de la veille, pour certains, cèdent tout de suite, la place au réveil brutal ; tant le vacarme et les décibels sont puissants pour des oreilles normales.

Tout y est depuis les vendeurs de la friperie, la petite racaille, pour la bourse du pauvre jusqu’aux agences de la téléphonie avec du tout venant : Iphone 4, Iphone 5, Galaxy et encore jusqu’aux poupées en tout genre, mais vraiment tout est dans ce big bazar. Bienvenue au Cices, avec les drapeaux de tous les pays présents pour cette année.
Dakar, ville de foires. On l’avait dit l’année dernière pendant l’ouverture de cet évènement devenu annuel. Ajoutez tous les déguisements des dames, ces filles qui se promènent sur les allées ; faisant mine d’acheter, discutaillant à tout bout de champs pour trouver après que la marchandise coute chère.

Mais, c’est cela aussi la foire de Dakar, un rendez de l’excellence et de la médiocrité. De la débrouille et de l’excellence, comme ce belge venu présenter ses belles lampes et lampadaires à basse tension pour intéresser le marché sénégalais. L’Etat a semble-t-il fait de gros efforts cette année. Ces dernières années, seuls certains pays de la sous-région brillaient par leur présence, la Mali, le Burkina Faso et le Niger pour l’essentiel. Cette édition 2014, on semble vouloir revenir aux fondamentaux. Il était temps, car la réputation de la foire commençait à en prendre un coup. Elle n’intéressait plus grand monde.

La foire 2014, c’est aussi l’Egypte au Pavillon vert, mais aussi le Maroc, la Turquie, terre de coton et de cotonnade. Ils sont là avec les tapis, draps, les costumes, chemise haut et bas de gamme, les couvertures lourdes en coton etc. L’univers médiatique a changé. Radios et télévisions se bousculent sans programme. C’est à tout va. On fait du bruit comme tous. On crie aussi dans ce désordre.

APRÈS UNE VINGTAINE D’ANNÉES DANS L’ANONYMAT…DAKAR VEUT LA RUPTURE

Très originale au départ, la foire a son histoire derrière elle. Jusqu’à la fin des années 1980, c’était l’un des évènements sinon la fête la plus attendue. Espace de rencontres et d’échanges pour hommes d’affaires, responsables économiques et exposants de toutes régions auxquels elle a offert tous les deux ans, l’occasion de participer à l’une vaste des manifestations commerciales les plus grandioses à l’échelle de l’Afrique. Avec comme moment le plus important le fameux forum des investisseurs.

Rien que pour l’esprit et le contexte économique qui ont prévalu à sa création, la foire de Dakar mérite d’être racontée aux enfants, aux élèves, aux lycéens pour la postérité. En 1974, le pays n’est indépendant que depuis quatorze ans. Un homme est à la tête du pays : Léopold Sédar Senghor. Le Sénégal sort d’une année 1973, particulièrement pénible avec la sécheresse et les mauvais rendements agricoles conséquence du manque d’eau. C’est aussi une année où au Sahel, le cheptel a connu un nombre élevé de mortalité du bétail surtout chez les ovins et bovins.

L’ambiance politique s’amorce cependant avec un certain désir du président de la République de revenir sur certaines de ses décisions qui ont dû faire mal à un moment dans son propre parti, l’Union progressiste sénégalaise (Ups). Senghor vient de libérer le prisonnier politique le plus célèbre connu encore au Sénégal, Mamadou Dia. On rêve de retrouvailles et de fastes, une fois la misère de 1973 avec ses longues pénuries de riz et les rangs interminables devant les magasins des grossistes et demi-grossistes libanais ou français dans Dakar et les villes comme Mbour, Thiès, Rufisque, Bambey ou Kaolack. Les Sénégalais ont besoin de nouvelles vibrations.

LES SIGNES D’UN CHANGEMENT DE MONDE

Un climat donc apaisé, avec un président qui ne manque pas d’idées. Certains rêvent d’un retour de Dia aux affaires. Brillant et homme d’action ; leur union durable aurait permis au Sénégal de franchir allègrement tous les obstacles qui devaient être surmontés après la décolonisation.
Ce sera chose vaine. Senghor a des idées derrière la tête et ne semble plus en vouloir. Ce sera l’une de ses plus grosses erreurs que Mamadou Dia d’ailleurs, raconte dans le film d’Ousmane William MBaye au nom de l’ancien Président du Conseil, « Président Dia ». Un hommage émouvant d’un homme d’honneur dont le Sénégal, à travers Abdoulaye Wade, hier et aujourd’hui Macky Sall refuse de consacrer le talent et la mémoire. Mais Ousmane William Mbaye au moins l’a fait et mérite aussi l’éloge faite aux hommes et femmes d’honneur.

C’est dans ce contexte que naît cette foire sur l’espace qu’on lui connaît encore aujourd’hui. Mais, l’histoire va nul doute plus loin pour celui qui veut bien suivre ce qui pourrait faire l’objet de plusieurs ouvrages, mémoires et thèses de recherches. Le complexe qui l’abritera, proche de l’aéroport de Dakar-Yoff, deviendra aussi un centre d’affaires permanent équipé de bureaux, de halls d’exposition, de facilités hôtelières, d’une banque de données. C’est là que sera implanté le Centre international de congrès, dont l’ouverture doit coïncider avec la tenue de la première foire.

Vous avez dit Cices, connu après sous l’appellation du Centre international du commerce extérieur au Sénégal. Ces esquisses du quatrième plan, sont ainsi relatées dans un grand numéro du Monde diplomatique de ce mois de février 1974, sous la plume de journalistes connus, comme Jean de La Guérivière, Phillipe Decraene, José Alain Fralon, Jean-Claude Gautron, Dmitri-Georges Lavroff etc. Et la Foire de Dakar en est le symbole vivant.

Le Sénégal devenait d’un coup, un pays intéressant avec ses faiblesses au plan économique certes ; mais surtout sa foi en lui, ses forces également par la magie et le génie de ses élites, hommes et femmes réunis.

Fils aîné de l’association entre la Communauté économique européenne et les pays africains « francophones », le Sénégal a toujours manifesté à l’ancien colonisateur français et ses espaces communautaires, un farouche attachement. Pour le président Senghor, en effet, la convention de Yaoundé, base juridique de cette association, reste, malgré ses imperfections et ses lacunes, un des ciments de cette Eurafrique à laquelle il croit tant. D’où les efforts des dirigeants de Dakar pour s’opposer à toute tentative d’affaiblissement de cette association, alors que jamais les fondements de celle-ci n’ont été plus menacés.

Autre chose qui ne manque pas d’intérêt et qui reste un point important pour l’époque, l’entrée de la Grande-Bretagne dans le Marché commun en 1971 a posé au président sénégalais, ainsi qu’à la plupart des chefs d’Etat des pays africains francophones, un dilemme pénible : ainsi, aux termes du protocole 22, annexé au traité d’élargissement de la Cee, les pays en voie de développement du Commonwealth situés en Afrique, dans les Caraïbes et dans l’océan Pacifique se voient proposer la possibilité de s’associer à la Communauté, c’est-à-dire de se joindre aux dix-neuf Etats africains (Eama) signataires de la convention de Yaoundé.

La première association entre les États africains et Madagascar associés connue sous l’appellation (Eama) et les États membres de la Cee (1963-69) a été élaborée dans la capitale camerounaise, d’où son nom. Cette convention octroyait des avantages commerciaux et une aide financière aux anciennes colonies africaines.
A Dakar, comme d’ailleurs dans d’autres capitales africaines francophones, on se félicite de ce qui pouvait être considéré comme un renforcement de l’unité de l’Afrique, mais on va manifester aussi une certaine inquiétude à l’idée de voir les cousins « anglophones », dont certains très turbulents, entrer ainsi en force dans cette association.

LIGNES DE FORCE : DÉMOLIR ET RECONFIGURER LA FOIRE, UNE NÉCESSITÉ

Aujourd’hui, l’espace foire mérite toutes les attentions et les études des universités à commencer par celles de l’Ecole nationale d’économies appliquées (Enea) dans ses missions d’origine. Si le prestige du Sénégal, un moment pâli, semble s’être un petit bout, refait une santé après la Francophonie et le sommet sur les crises en Afrique, les missions de la foire devraient être revues à la hausse.

Cela ne se fera pas sans des mesures énergiques de reconfiguration de la vocation de l’espace, avec la démolition des maisons figées au milieu d’une zone réservée, mais encore la volonté du Sénégal de rejouer ce rôle de leadership moral que cherchait le président Senghor à travers un effort de repositionnement du pays sur la scène diplomatique africaine et internationale.

Monument parmi les monuments à sauvegarder sur certains de ses pans, l’espace-foire devrait être revu et redessiné avec une conception futuriste confiée au génie architectural sénégalais ; mais encore au travail de recherche d’hommes et de femmes extravagants et brillants comme Jean Nouvel et d’autres architectes du monde conviés dans une forme d’offres et d’échanges qui donnerait une idée de design et de l’ingénierie d’aujourd’hui et de demain.

Une des étoiles de décembre, la foire manque de mémoire. Pour toutes les générations qui y sont passées depuis 40 ans, ceux qui l’ont conçue et dessinée pour les enfants d’hier et d’aujourd’hui, l’avaient aussi pensé pour ceux de demain. Une aire de promenade qui fait parler l’histoire du développement d’un pays. Voilà en sorte ce, à quoi devrait ressembler la foire. Qu’il serait beau de revivre le souvenir de toutes ces classes ou écoles de l’époque venues y découvrir les facettes du monde merveilleux dans lequel Dieu a invité les hommes à vivre.

Facebook comme l’Internet auraient aujourd’hui, aidé à mieux camper ces décors d’époque ; moment où la photographie était encore un grand luxe pour l’Africain ordinaire et pendant lequel, poser le doigt sur un déclencheur d’un appareil analogique ou classique n’était pas chose aisée. A l’ère de l’image numérique, les images de la foire d’aujourd’hui ont énervé beaucoup d’observateurs, d’ingénieurs, d’architectes et d’urbanistes mais également et des géographes, comme des historiens de la ville et du pays, qui ont connu le lieu à une certaine époque. On est dans le passé en plein présent. Aujourd’hui saboté et chahuté par un homme et ceux qui l’ont suivi dans certaines de ses folies d’opposants ; le président Abdoulaye Wade a défiguré la foire.

Ainsi après avoir tout détruit autour de l’aéroport, il a, à la fois sacrifié la cité des affaires qui y était prévue ; mais encore, il a enlevé à cette fête du mois de décembre la saveur et les formes originales qui faisaient encore le rayonnement du mythe et son histoire. Pour l’épisode 2014, les cafouillages nés du démarrage de la foire, sont aussi le produit d’un manque de vision sur l’espace de l’actuel pouvoir de Macky Sall.

Annoncée pour le 18 décembre, l’ouverture de la foire n’était pas suffisamment préparée pour être sans encombre, ce jour-là. Avec des stands pas du tout fonctionnels, des marchandises en souffrance au port, l’on est retourné aux atermoiements d’une certaine époque.

Pour l’esprit du leadership moral qu’on attendait pour le Sénégal, ce sera nul doute pour la prochaine fois. En une trentaine d’années, le pays a enfoui chaque jour, sa mémoire. Par erreur. Et, dans ce décor, l’urgence est de revenir au sourire vrai des cartes postales de l’époque. Mais même redevenu assez belle, la foire a intérêt stopper le terrible folklore qui irritent les oreilles. On va à la foire pour rire et se parler.
Dans l’ambiance de folie dans laquelle on annonce tout et son contraire, l’Etat, les autorités publiques et la ville doivent veiller à corriger immédiatement les erreurs en attendant la prochaine édition. Il ya trop de folklore. Trop de bruits qui gènent. Et ce n’est pas seulement çà une foire…

POUR UN RETOUR LEADERSHIP MORAL DANS LA SOUS-RÉGION

Il faut préciser que les responsables sénégalais, justement parce qu’ils croient à cette association Cee-Afrique, ont rarement manqué l’occasion, par le passé, de critiquer la manière dont les Six (l’actuelle Union européenne ne comptait que six membres à l’époque) mettaient en œuvre cette coopération. On se souvient ainsi qu’en mai 1972, à Luxembourg, c’est le délégué sénégalais qui a vivement protesté – on ne fut pas loin de la rupture – contre un règlement de la Cee visant à restreindre les exportations africaines de fruits et légumes vers le Marché commun.

La foi du président Senghor lui-même en l’idée eurafricaine est incontestablement une des bases de la politique extérieure de Dakar, comme d’ailleurs et les deux choses se rejoignent – de la recherche de relations privilégiées avec la France. L’association entre les Six et les Eama permettait aussi au président, qui exerce une sorte de « leadership moral » sur une bonne partie de ces pays, de jouer un rôle qui se prêtait mieux à la dimension de son prestige qu’à la puissance réelle de son propre pays.

Or, bien d’autres candidats à ce «leadership» apparaissent, lorsqu’on imagine une association eurafricaine élargie à pratiquement toute l’Afrique. Et le Sénégal semble particulièrement mal placé – politiquement, mais aussi géographiquement – pour jouer un rôle de charnière entre les pays francophones et anglophones, ne serait-ce qu’en raison du caractère toujours très intime de ses relations avec l’ancienne métropole. Mais çà, c’était bien pour l’époque.

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