Pendant que le Président Macky Sall accueillait des hôtes pour les besoins du Sommet de la Francophonie, Malick Noël Seck tenait son contre-sommet. L’occasion lui a donné de se lancer dans un nouveau front, celui de s’interroger sur nos rapports avec la France en particulier. Le jeune leader politique est en train de se positionner sur un terrain citoyen relativement idéologique abandonné par les partis politiques.
Le combat contre Abdoulaye et son système est maintenant une «épopée» pour lui. Son exclusion du Parti socialiste et de la Convergence socialiste lui restent en travers de la gorge. Loin de prendre une revanche, Malick Noël Seck essaie d’écrire son histoire politique autrement. Les rues politiques ne trouvent point de jeunes marcheurs. Les circonstances politiques servent d’opportunité pour incarner une opposition radicale au pouvoir de Macky Sall. Mais sa nouvelle approche rompt d’avec la coutume de la classe politique sénégalaise qui ne se crêpe que pour des questions domestiques.
Dans ses tentatives de construire un positionnement politique, l’homme surfe sur la vague protestataire contre les tares de la gouvernance actuelle, mais surtout la dénonciation des intérêts occidentaux au Sénégal, la France en particulier. Prenant le gouverneur de la région de Dakar au mot, le leader du Front national de salut public «Mom sa reew» a décidé de tenir meeting après celui de Me Wade. Il a occupé un terrain orphelin d’initiatives, d’indignations pour s’offrir une rencontre alternative au Sommet de la Francophonie. «La Francophonie, le nouveau mot pour la coopération, c’est le colonialisme ! La coopération n’a qu’un seul propos : c’est d’assurer la continuité de l’exploitation économique, la domination politique, l’occupation stratégique de nos territoires et le pillage de nos ressources naturelles», assume-t-il.
Victime du rouleau compresseur socialiste
Edifiant sur le sens de son engagement. Ceux-ci l’ont amené à se joindre à des identités remarquables comme le professeur Malick Ndiaye, le docteur Dialo Diop, l’économiste Demba Moussa Dembélé, le commissaire Cheikhna Keïta, entre autres, pour animer le Front contre le sommet. Malgré les interdictions de leurs activités, ils parlent de succès, du fait qu’ils ont fait les choux gras des médias. Quoi pour la suite ? Le «francophobe» souhaite porter sur les fonts baptismaux un Front africain à l’égard des alter mondialistes. «Le contre-sommet de la Francophonie est un nouveau départ pour tous les mouvements politiques qui, en Afrique subsaharienne, veulent rompre avec le statu quo. Nous avons reçu énormément d’encouragements et d’adhésions de la part de ressortissants de l’Afrique de l’Ouest», dit-il dans les colonnes du Populaire. Au Niger, son manifeste compte déjà des signataires.
Pour le moment, l’homme ne draine pas, il contamine des indignés. Il compte plus sur son verbe et ses stratégies pour s’ériger en rempart. Son ancien camarade de lutte Barthélémy Dias n’est plus sur le front. Lui, il y reste. Son engagement lui a valu deux emprisonnements en 2011 et 2012. Son exclusion est une tâche noire au Parti socialiste. La victime en a gagné en sympathie.
«Je suis contre la France de Bolloré…»
Pourtant, Malick Noël se considère ni antifrançais, ni anticolonialiste. Joint par téléphone, il dit mener un combat pour une vraie «indépendance» des pays africains. «Je ne suis pas un antioccidental. Nous n’avons rien contre la France de Saint Just et la langue française. Une langue appartient au monde qui la parle. Elle nous permet d’échanger. Cependant, je suis contre la France de Bolloré, de Bouygues, de (Jacques) Focart…», s’explique-t-il.
Le leader du Front national pour le salut public «Mom sa reew» ne s’attaque pas «aux vendeuses de fleurs», mais plutôt aux institutions. Il est d’autant plus motivé à agir qu’il existe «en France des associations comme Survie, qui se bat pour l’indépendance totale de l’Afrique». L’ancien Socialiste estime que notre continent a une indépendance compromise par le passage de «l’esclavage» à la «colonisation», de la «décolonisation» à la «coopération». «On nous a donné une fausse indépendance. Après la Deuxième guerre mondiale, l’Amérique a mis une certaine pression sur la France par rapport à ses colonies. Avec les guerres d’Indochine et d’Algérie, la France a formé des cadres pour diriger nos Etats», rappelle-t-il.
Or, «il n’est pas possible de se développer sans liberté». Malick Noël prend pour preuve «la non-maîtrise de notre monnaie», qui est le franc Cfa. «50% de nos devises sont logées à la Banque de France. On nous prête notre propre argent. On nous impose l’entreprise qui réalise les travaux et l’argent retourne en France», s’indigne-t-il
Pourquoi l’homme politique intègre-t-il un tel combat dans sa lutte politique au moment où l’écosystème politique sénégalais n’interagit que sur des affaires sénégalo-sénégalaises ? «En fait, les partis n’ont plus d’idéologie. Ils créent des coalitions pour gagner des élections. A quoi sert d’être Socialiste si c’est le Fmi et la Banque mondiale qui décident ?». Une question à réponses multiples.