Alors que l’entreprise espagnole peine à faire avancer les travaux de la Rn 6, elle pourrait trouver le moyen de se faire payer 6 milliards de francs, du fait d’un retard de l’Etat dans la libération des emprises sur une partie du tronçon.
Le sud du pays verra-t-il bientôt l’achèvement de la Rn6, le pion majeur des travaux d’infrastructures financés dans le cadre du Millenium challenge account (Mca) ? Les informations obtenues par Le Quotidien, à la suite de la sortie de ses deux articles précédents, font craindre le pire. Rien n’indique que l’entreprise espagnole Isolux Corsan Corviam soit vraiment en mesure de tenir la cadence qui lui a été exigée. La société ne serait pas en mesure techniquement de le faire, n’ayant pas tout le matériel requis. Et par ailleurs, des complaisances coupables des contrôleurs du Mca ont permis aux fautifs de bénéficier de failles béantes qui sont à la base de l’énorme retard qu’ont connus les travaux.
Des personnes ayant travaillé avec les Espagnols de Isolux ne comprennent pas que pour un marché de 70 milliards de francs Cfa, il n’ait été demandé aux Espagnols aucune garantie. «Même le matériel de construction qu’ils utilisent ne leur appartient pas ; ils l’utilisent en location.» C’est dire qu’en matière de garantie de représentation, les dirigeants locaux d’Isolux ne sont pas un modèle. La preuve en a été donnée quand l’un de leurs partenaires sénégalais les a traînés en justice, jusqu’à faire bloquer leurs comptes, il a eu des difficultés auparavant à faire saisir du matériel par huissier.
En effet, dans les locaux de l’entreprise à Dakar, l’huissier commis n’avait pas trouvé du matériel valant 500 mille francs Cfa. Très loin des montants que réclamait le plaignant sénégalais.
Ce qui fait que les Sénégalais s’inquiètent même de savoir si l’Etat s’est donné des moyens de rétorsion en cas de préjudice de la part des personnes qui semblent avoir érigé la légèreté en mode de fonctionnement avec les Africains. Et une fois de plus, il est inexplicable que les Américains, qui ont imposé que les décaissements et le contrôle des travaux se fassent à travers le Mca Sénégal, au lieu que cela fut par Ageroute, dont l’expérience et l’expertise n’ont à ce jour jamais fait l’objet de contestation, que ces Américains, si fiers de leurs organes de contrôle, ne semblent pas s’être inquiétés outre mesure des problèmes notés dans cette partie du pays.
Or, il est, en plus de leur retard flagrant, prêté l’intention aux Espagnols de réclamer 6 milliards de francs Cfa au Sénégal. Prétexte ? Non-libération des emprises de la route. Parce qu’en un moment, sur un petit tronçon contesté par les rebelles de César Atoute Badiate, les travaux ont été déviés, et les pouvoirs publics ont traîné avant de sécuriser l’emprise. Suffisant pour que des esprits malins fassent comprendre aux Espagnols qu’il y avait là matière à dédommagement. Jusqu’à fixer le montant qui pourrait leur être accordé. Comme quoi, puisque tout est perdu, inutile de se gêner.