Le programme financé à plus de 270 milliards de francs Cfa par le gouvernement américain, afin de réaliser des infrastructures dans le Sud et le Nord-Est du pays, a de grosses difficultés pour tenir la cadence imposée. Or, dans moins d’un an, le programme doit être bouclé pour que le pays espère bénéficier d’une suite…
Dans environ 306 jours à partir de la publication de ce journal, le programme sénégalais du Millennuim challenge account (Mca), qui finance des projets d’infrastructures dans le Nord-Est et le Sud du pays, aura pris fin après cinq ans d’activités. Comme beaucoup d’autres pays, l’Etat sénégalais espère que le gouvernement américain, qui a financé ce «compact», sera suffisamment satisfait de nos efforts pour accepter de renouveler un autre programme de ce Mca, qui va probablement financer d’autres projets structurants. Néanmoins, entre le rêve et le possible, reste à savoir ce qui nous sera accordé. Car, les niveaux de réalisation des travaux du Sénégal ne répondent pas tous aux critères.
Ce sont 540 millions de dollars américains, l’équivalent de 270 milliards de francs Cfa, que les Américains ont offert au Sénégal dans le cadre du Millennium challenge account, à travers un accord de cinq ans, qui devait débuter en 2010. En plus de la construction et de la réhabilitation de certaines infrastructures routières, aussi bien au Nord qu’au Sud du pays, le Mca Sénégal vise une valorisation des ressources en eau dans le Delta et la Vallée du fleuve Sénégal, pour permettre «une production agro-industrielle compétitive soutenant une croissance durable réduisant de façon significative la pauvreté au Sénégal». Dans le cadre hydraulique, le projet comporte deux activités principales que sont, la réalisation du schéma hydraulique du Delta du fleuve, ainsi que l’aménagement des cuvettes d’inondation dans le Podor.
Sur le site du Mca Sénégal, il est également dit que «la mise en place des infrastructures hydro-agricoles dans les départements de Dagana et de Podor dans la Vallée du fleuve Sénégal, aura comme principal effet d’augmenter l’attractivité de ces zones, avec l’arrivée de nouveaux acteurs et la disponibilité foncière par famille, mais aussi d’assurer une disponibilité permanente de l’eau pour des cultures durant toute l’année».
Retard inquiétant
Néanmoins, si au Nord, les programmes de réalisation des infrastructures progressent au rythme voulu, cela est très loin d’être le cas dans le Sud du pays. Si Macky Sall s’est félicité de pouvoir danser le wango lors de l’inauguration du pont de Ndioum en octobre dernier, s’il a pu se rendre compte que les travaux de la route Richard Toll -Ndioum sont presque achevés, il n’aurait pu dire la même chose en ce qui concerne les travaux au Sud du pays, notamment en Casamance naturelle.
Pour preuve, sur le site internet même du Mca, il est indiqué que la route reliant Ziguinchor à Tanaff, longue de 116 km, n’a pu être réalisée qu’à 11%, alors que les travaux sont prévus pour prendre fin en mars 2015. La route Tanaf-Kolda quant à elle, n’est faite qu’à 25%, et le tronçon Kolda-Kounkané n’est achevée qu’à moitié. De même que le pont Ibou Diallo, qui enjambe le fleuve Casamance dans la ville de Kolda même, n’était réalisé, au mois d’octobre dernier, qu’à 50%.
Ce niveau de retard est devenu tellement inquiétant que même les bailleurs américains n’ont pas trouvé d’objection à ce que l’on impose à l’entreprise espagnole Corsan Corviam construction, qui avait gagné le marché, de se joindre deux sous-traitants sénégalais, afin que les travaux aillent plus vite.
Le ministre des Infrastructures et des équipements devait, dans le cadre de la préparation de son budget pour 2015, être auditionné par la Commission des finances de l’Assemblée nationale, hier dans la journée. Le Quotidien n’avait pu hier, faire l’économie des échanges. Cependant, il était attendu que le ministre soit interpellé sur ce retard.
Les représentants du Peuple, en particulier ceux originaires du Sud du pays, mesurent bien les enjeux liés au retard dans la réalisation des travaux de cette route. Et tous savent bien que si le Sénégal visait un autre projet à faire financer dans le cadre du Mca, il devrait l’abandonner si les niveaux de réalisation au Sud restent aussi faibles à la fin du compact.
Il semble toutefois que les choses ne devraient pas être aussi faciles pour les Américains. Au ministère, on se plaint aussi de n’avoir pas eu les coudées franches dans la réalisation et le contrôle des projets. «Les Américains ne décaissaient qu’après l’avis de leurs experts du Mca Sénégal, laissant les agents de l’Ageroute totalement à l’écart», expliquent des agents du ministère. Néanmoins, certains mettent aussi l’accent sur les méfaits de la rébellion dans la zone.