Mi essai, mi carnet de pérégrinations fictives (ou pas tant que ça), le dernier opus du ‘’Ndakarologue en Sénégalogie’’ (et historien à la ville) Abdourahmane Ngaïdé est décidément un drôle de livre, à l’image du ''Mbourourou Mbarara'' qu’il dépeint avec esprit et humour.
‘’Mbourourou Mbarara’’, paru récemment aux Éditions Le Nègre International, est un ouvrage atypique dans le paysage littéraire sénégalais. Bizarre, parfois franchement déroutant, il se lit pourtant avec une alacrité qui frise la gourmandise, tellement les boutades, à l’image d’une tête pleine de poux, dont il est infesté, parlent à nos propensions respectives à la Schadenfreude… pour ne pas dire au masochisme.
Véritable satyre d’une culture galopante de l’oralité, faite d’onomatopées, de ‘’négrologismes’’ et d’ébahissements divers et bruyants devant un bordel magnifique dépeignant assez justement le Ndakaaru* d’aujourd’hui, l’opus peut sans conteste se réclamer de l’école du regretté ‘’Cafard libéré’’ ou, plus récemment, du ‘’P'tit railleur sénégalais’’.
Il s’agit donc, au fil des pages, de se laisser emporter par le récit pétillant et rythmé d’un narrateur se confondant sans complexe à l’auteur, alors qu’assis à la terrasse rouge d’un café populaire, il se désole du comportement incohérent de ses concitoyens.
Par chapitres, il consigne ainsi les nombreuses discussions qu’il entretient avec ses amis (et pas que ses amis, à son grand dam)… L’ensemble, malgré l’amusement des plus total qu’il suscite chez le moins tognkat** d’entre nous, n’en épargne pas pour autant les ego.
Tranches de vie rocambolesques et, parfois, scandaleuses, propos outranciers, exagérations comiques, curiosités mal placées et autres ‘’mêles-toi-de-ce-qui-ne-te-regarde-pas’’ quotidiens des Sénégalais sont ainsi disséqués, analysés, comparés, mais surtout fidèlement rapportés par Abdourahmane Ngaïdé, dans un français aromatisé de perles de wolof qui vous arrachent des ‘’Ëskëy!*’’ d’admiration.
Abdourahmane Ngaïdé est un Sénégalais d’origine mauritanienne, revenu au pays, à la suite des malheureux événements de 1989. Hier réfugié, il est aujourd’hui professeur d’histoire à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD). 148 pages pour un superbe livre de chevet aux fausses allures de dédales des mots et des mœurs (et bien plus)!