Au total 141 organisations africaines de défense des droits humains de plus de 32 pays ont publié une lettre dans laquelle elles affirment leur soutien aux efforts entrepris par le Sénégal et l'Union africaine pour juger l'ancien président tchadien Hissène Habré, rapporte Human Right Watch (HRW).
"Si les preuves retenues permettent aux poursuites d'avancer, un procès juste, équitable et transparent de Monsieur Hissène Habré serait une étape cruciale de la lutte contre l’impunité des dirigeants auteurs d’atrocités", écrivent les organisations signataires.
L’Organisation nationale des droits de l’Homme (ONDH), la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’Homme (RADDHO) et d’autres organisations sénégalaises figurent parmi les signataires.
Il y a aussi des ONG tchadiennes – l’Association tchadienne pour la promotion et défense des droits de l’Homme (ATPDH), Appel à la paix et à la réconciliation (CSAPR), l’Association des victimes de crimes du régime de Hissène Habré (AVCRHH), entre autres.
"Alors même que certains leaders africains ont déclaré que l’Afrique était injustement visée par les juridictions internationales, le réel défi est de consolider la justice africaine", a déclaré George Kegoro, directeur exécutif de la section kenyane de la Commission internationale de juristes, un des signataires de la lettre. "Le procès de Hissène Habré permettrait d’y contribuer", a ajouté M. Kegoro, cité dans un communiqué.
"Les victimes de Hissène Habré ont œuvré sans relâche pour que ce dernier soit traduit en justice", a de son côté déclaré Yasmin Sooka, directrice de la Fondation pour les droits de l’Homme en Afrique du Sud.
"Il est crucial que le procès et la procédure soient exemplaires, afin d’envoyer le signal fort qu’il est possible de juger les responsables d’atrocités et de montrer que les victimes d’abus en Afrique peuvent être prises en compte", a ajouté Sooka.
Ce dernier fut membre de la Commission Vérité et Réconciliation d’Afrique du Sud puis de la Commission Vérité et Réconciliation de la Sierra Léone.
Cette lettre ouverte "appelle également le gouvernement du Tchad à organiser des procès justes et transparents pour les responsables de l’administration Habré qui y sont poursuivis, dont deux qui sont également recherchés par le Procureur des Chambres", selon Human Right Watch.
L'organisation internale rappelle qu'il est prévu que ces procès débutent le 13 novembre.
Hissène Habré, au pouvoir entre 1982 et 1990, est en détention à Dakar. Il est accusé de "crimes de guerre, crimes contre l’humanité et actes de torture".
Il a été inculpé par les Chambres africaines extraordinaires (CAE), créées au sein des juridictions sénégalaises, et chargées de le juger. Elles ont démarré leurs activités en février 2013.
En août 2012, le Sénégal a donné son accord au projet de l’Union africaine (UA), pour juger M. Habré devant un tribunal spécial au sein du système judiciaire sénégalais, présidé par des juges africains nommés par l’organisation continentale.
M. Habré vit en exil à Dakar depuis la chute de son régime. Il avait été renversé par l’actuel président tchadien, Idriss Deby Itno, qui était un de ses proches collaborateurs avant d’entrer en rébellion.
Selon une commission d’enquête tchadienne, le régime de M. Habré a fait plus de 40.000 morts parmi les opposants politiques et parmi certains groupes ethniques.