L'ancien commissaire en charge des politiques économiques et de la fiscalité intérieure de l'UEMOA, le Sénégalais El Hadj Abdou Sakho, a jugé "brusque et brutale", l'entrée en vigueur, en janvier 2015, du Tarif extérieur commun (TEC) de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO).
Cette perspective n’est pas sans lien avec des "pressions" extérieures résultant de la conclusion des Accords de partenariat économique (APE) devant lier les pays ACP à l'Union européenne (UE), a laissé entendre M. Sakho, qui fut également commissaire de l'UEMOA en charge des politiques fiscales, douanières et commerciales.
Il introduisait samedi une communication, lors d’un séminaire de deux jours du Collectif des journalistes économiques du Sénégal (COJES). Cette rencontre porte sur le thème: "Les Accords de partenariat économique et le Tarif extérieur commun : enjeux et perspectives".
L'avènement des APE a, selon lui, amené la CEDEAO à se doter d'un TEC, étant entendu qu'un accord de partenariat économique ne peut lier que deux pays disposant d'un instrument permettant d'organiser leurs relations commerciales avec des pays tiers.
Cela dit, l'entrée en vigueur du TEC de la CEDEAO, en janvier 2015, relèvera d'une perspective "brusque et brutale", a indiqué M. Sakho, aujourd'hui consultant. Il a indiqué que la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest devait s'inspirer de l'UEMOA dont le TEC est entré en vigueur de façon échelonnée.
La CEDEAO aurait été plus inspirée en faisant "entrer le texte (du TEC) de façon progressive dans le système fiscal", dans le but notamment de donner aux commissaires compétents le temps de mettre à la disposition des Etats "la substance technique" nécessitant sa bonne mise en œuvre, a-t-il dit.
"Si vous voulez réformer la fiscalité douanière, vous allez impacter sur le budget. Ce qui fait que les pays devaient être préparés à cette éventualité'', a-t-il dit, se demandant si un TEC bâti sur des logiques extérieures est de nature à répondre à des préoccupations externes.
"C'est un problème de marginalisation qui se pose. Il y a un risque qui est là", relatif au déplacement du centre de l'économie mondiale du bassin de l'atlantique vers celui du pacifique, obligeant l'UE à vouloir signer des APE avec les pays africains, a-t-il fait valoir.
Les pays européens "veulent freiner ce mouvement de marginalisation" par le biais des APE, en impliquant le continent africain, également concernée par ce processus, a insisté l'ancien commissaire de l'UEMOA.
''Les APE sont une bonne chose et peuvent développer des opportunités, mais c'est à nous de saisir ces opportunités et de les transformer en points de croissance", a soutenu El Hadj Abdou Sakho.
"Les relations internationales deviennent de plus en plus transversales, pour dire que les mouvements de marché passent progressivement au second plan au profit des transactions de services avec la nouvelle économie", a-t-il analysé.
Dans ce nouveau contexte, ''les pôles qui ont le mieux réussi correspondaient à ceux qui ont un fond culturel commun'', a-t-il relevé, appelant la CEDEAO à s’inspirer sur ce plan de l’exemple de l’Union européenne.
En réalité, "nous n'avons pas toujours été en marge de la prospérité mondiale", a-t-il expliqué, en évoquant des références historiques liées à l’apogée des empires du Mali et du Ghana.
Selon M. Sakho, "il se trouve simplement que les excédents commerciaux que l’Afrique de l'Ouest a accumulés grâce à son commerce n'ont jamais été utilisés pour réformer les structures productives de nos Etats".